
Alors que la situation se décante en Libye après dix ans de guerre, la communauté internationale ne cache pas son enthousiasme de voir les efforts déployés aboutir. La Libye a été le témoin de la réalisation d’objectifs incroyables que les Nations unies s’étaient fixées pour elle, s’est félicité le chef de la diplomatie italienne. Il est vrai que peu de capitales croyaient en leur faisabilité il y a de cela juste quelques mois. Mais l’effort diplomatique, encouragé par les pays qui n’ont eu de cesse d’affirmer que la solution en Libye ne pouvait qu’être politique, au moment où d’autres prônaient l’option militaire, a payé. Mais faut-il pour autant céder à l’euphorie collective ? Le chemin vers la stabilité, durable et définitive, en Libye est encore long, voire compliqué. C’est pourquoi des spécialistes préfèrent tempérer l’enjouement général. Car en dépit des progrès réalisés, soulignent-ils, les questions les plus sensibles, telles que le devenir des milices, le pétrole et le pouvoir, sont toujours sur la table. Et selon eux, la paix ne tient qu’à un fil. A ces craintes, il y a lieu de rajouter une récente déclaration du chef de la diplomatie russe, reprise par des médias libyens, et selon laquelle, il aurait déclaré ne pas savoir «si le calendrier des élections libyennes est réaliste dans les circonstances actuelles». Quel sens donner à ce propos ? Il y a, en effet, matière à réfléchir. Ceux qui se refusent à croire que le plus dur est derrière ont peut-être raison de tempérer les ardeurs de ceux qui pensent que la Libye est tirée d’affaire. Car quand bien même le pays s’est doté d’un gouvernement unifié et que des signes d’un retour à la normale sont nombreux, en témoigne la réouverture par de nombreux pays de leur ambassade à Tripoli, il n’en reste pas moins qu’il ne faut pas crier victoire tant que les élections du 24 décembre n’auront pas été tenues. Ce qui se passe aujourd’hui semble plus une manière pour les acteurs étrangers de se positionner dans l’après-conflit qu’autre chose. Le retour à la stabilité aiguise les appétits, et tout un chacun a à cœur de ne pas être loin le moment de la reconstruction venu. Il y a des milliards de dollars à la clé. Il s’agit aussi pour certains de vouloir reprendre une place de laquelle, turcs et russes les ont éjectés. Il est vrai aussi que la chef de la diplomatie libyenne a réitéré, ce dimanche, son invitation adressée à tous les pays à rouvrir leurs ambassades et consulats en Libye. Mais elle sait aussi que l’urgence pour le gouvernement intérimaire est ailleurs. Elle a trait au départ, le plus rapidement, des mercenaires et combattants étrangers se trouvant sur le sol libyen. Ils constituent une menace pour la stabilité du pays et risquent d’entraver le processus de sortie de crise.
Nadia K.