Salah Goudjil au journal Al Ahram : «La réforme de la Ligue arabe est incontournable»

M. Salah Goudjil, président du Conseil de la nation, a accordé une interview à Joudha Abou En-Nour, directeur adjoint de la rédaction du quotidien égyptien Al Ahram. Nous avons jugé utile de publier les principales questions de cet entretien traduit par notre rédaction.

Quelle est votre opinion sur les relations algéro-égyptiennes actuelles ?

Avant toute chose, je tiens à adresser, à travers votre titre enraciné dans l’histoire, mes salutations les plus chaleureuses et les plus sincères à la République arabe d’Égypte, peuple, Président et Parlement, dont me reviennent, à l’occasion de cette interview, des souvenirs, une histoire et des haltes révolutionnaires et humanitaires inoubliables…
Nous savons tous que l’Algérie et l’Égypte sont deux États pivots en Afrique du Nord et que chacun d’eux jouit d’une position géographique et géopolitique particulière. De même, ils sont liés par des relations fraternelles fortes et une histoire commune riche en étapes révolutionnaires et en victoires restées vivaces dans la mémoire mondiale, en général, et dans la mémoire arabe, en particulier. Nous partageons avec nos frères égyptiens les préoccupations de la nation, ainsi que des martyrs, du sang pur, une lutte commune et une coopération sincère, pour rejeter le colonialisme et soutenir les causes justes.
À partir de ce postulat, les relations entre les deux pays s’articulent sur deux dimensions importantes : stratégique et historique. En ma qualité de moudjahid de la première heure, j’ai constaté le soutien ferme et multiforme que l’Égypte a apporté à la glorieuse Révolution de Novembre, ce qui lui avait valu une pression des plus hostiles qui n’avait fait qu’accentuer chez les Égyptiens le sentiment de fusion avec leurs frères algériens, et leur attachement à soutenir et à aider les Algériens jusqu’à leur indépendance entière. Je me rappelle, comme tous les Algériens, la radio «Sawt Al Arab» qui était une voix retentissante de vérité contre le colonialisme en Algérie et sur le continent africain. Je me souviens avec fierté de la diffusion de la Proclamation du 1er Novembre 1954 sur ses ondes au Caire.
Vu que nous sommes liés à nos frères par le soutien mutuel, mon pays ne s’est pas fourvoyé devant l’appel du devoir, en participant avec force, avec l’Armée nationale populaire, digne héritière de l’Armée de libération nationale, à la guerre arabe contre l’entité sioniste en 1967, ainsi qu’à l’épopée du 6 octobre 1973, bien qu’il s’agisse des premières années de la reconstruction de l’État après l’indépendance. Ces étapes de solidarité constituent un authentique modèle sur lequel les générations arabes doivent prendre exemple et s’inspirer sur le sens de la fraternité effective et sur la façon dont se matérialise le destin arabe commun.
Les relations algéro-égyptiennes se sont considérablement renforcées, ces dernières années, du fait de la compatibilité des visions et de la convergence des points de vue entre les leaders des deux pays, M. Abdelmadjid Tebboune et M. Abdel Fattah al-Sissi, au sujet de bon nombre de questions internationales et régionales. À ce titre, il faut rappeler que la première visite du Président Abdel Fattah al-Sissi à l’étranger a été en Algérie. De même, il y a eu la visite de travail qu’avait effectuée le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, en Égypte, les 24 et 25 janvier 2022, une visite qui a contribué au soutien des relations bilatérales et au renforcement de la coordination commune sur les plans africain et arabe. Cela en sus de l’activité de la haute commission mixte égypto-algérienne, laquelle encadre les voies de la coopération entre les différentes instances des deux États et l’élan important au partenariat bilatéral dans les domaines politique, économique et culturel que cela induit.

Quels sont les domaines de coopération entre les parlements égyptien et algérien ?

Les relations parlementaires algéro-égyptiennes revêtent une grande importance pour les deux parties. Elles tiennent de leur rôle dans le renforcement des relations bilatérales officielles et populaires, et également de leur rôle dans la défense des positions des deux pays, ainsi que des valeurs que consacrent leur politique extérieure, notamment les intérêts de la nation arabe.
Pour ce faire, nous veillons, à travers les mécanismes de la diplomatie parlementaire, à accentuer la fréquence de la coopération entre les instances législatives des deux pays, et ce par des échanges de visites et d’expertises, et l’activation des groupes de fraternité et d’amitié parlementaires, ainsi qu’à travers la coordination au sein des organisations et associations parlementaires internationales et régionales, à l’instar des unions parlementaires internationale, africaine et arabe, le Parlement africain et le Parlement arabe, ainsi que l’Union parlementaire des États membres de l’Organisation de la coopération islamique et l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée.
Les parlements algérien et égyptien possèdent un crédit appréciable en matière de coordination et de coopération, notamment au sein du groupe arabe de l’Union parlementaire internationale, où leurs efforts se sont conjugués pour imposer une clause d’urgence sur les crimes de génocide et de déplacement forcé que pratique l’occupant israélien à Ghaza et dans les territoires palestiniens occupés. De même, leur coopération se matérialise par le travail parlementaire multilatéral, afin de concrétiser les ambitions des peuples africains, arabes et méditerranéens en matière de sécurité, de progrès, de stabilité et de développement.

Comment voyez-vous le rôle diplomatique du parlement algérien ?

C’est un rôle conforme au dynamisme que connaît la diplomatie officielle, laquelle a retrouvé ses lettres de noblesse sous les orientations et l’impulsion du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune. Notre diplomatie parlementaire a un petit particularisme qui tient de la spécificité de sa source historique permanente qu’est la Proclamation du 1er Novembre 1954. Nous avons des principes et des valeurs sur lesquels nous ne transigeons pas sous quelque prétexte que ce soit, ainsi que des pratiques diplomatiques séculaires dictées par nos positions immuables envers les causes justes dans le monde. Nous avons une démarche solidaire connue et des politiques de coopération et de coordination dans les cadres de l’amitié, du partenariat et du bon voisinage. De même, nous avons un sens élevé des responsabilités envers les causes de notre nation arabe et du continent africain.
Ce sont-là les axes principaux de la diplomatie algérienne, à la lumière desquels nous composons la diplomatie du parlement algérien et dont les préceptes nous guident pour mener nos rencontres bilatérales et nos activités internationales et régionales multiformes.
Je peux affirmer que le parlement algérien a vu sa présence renforcée sur le plan diplomatique durant les quatre dernières années, en concordance avec la dynamique qui a caractérisé toute chose dans l’Algérie nouvelle, dont les fondements ont été jetés par le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune. Il a abrité la 17e session de l’Union parlementaire des États membres de l’Organisation de la coopération islamique, ainsi que la 36e session de l’Union parlementaire arabe. Les déclarations d’Alger de ces deux sessions contiennent des recommandations et des solutions, pour traiter les dysfonctionnements et solutionner les crises dans les mondes arabe et islamique.

La jeunesse a été au cœur du processus de changement. Le Président Tebboune a misé sur les jeunes depuis son accession à la magistrature suprême et s’était même engagé à œuvrer à les porter vers les plus hautes responsabilités. Peut-on considérer que ce sont les prémices d’un rajeunissement de la classe politique et de la classe gouvernante en Algérie ?

Effectivement, permettre aux jeunes de participer à la vie politique et économique, et à la prise de décisions constitue un axe essentiel des programmes du président de la République. Il s’agit d’un engagement qu’il a pris et qu’il a tenu. Par exemple, de nombreux membres du Parlement, de ministres et de walis sont jeunes.
Les jeunes conduisent avec mérite la locomotive de l’économie nationale :
les start-up. De même, nous comptons sur eux pour réussir la transition énergétique, en raison de leur maîtrise des nouvelles technologies.
Comme je l’ai dit auparavant, l’Algérie se dirige vers la consécration de l’économie des connaissances et c’est un domaine de jeunes par excellence, en raison de son lien avec la révolution numérique et les réalisations scientifiques.
À partir de ce postulat, le président de la République,
M. Abdelmadjid Tebboune, a veillé à la création et à l’installation du Conseil supérieur de la jeunesse en tant qu’instance constitutionnelle s’occupant des affaires et des préoccupations des jeunes et qui constitue une tribune pour les associer à la prise des décisions les concernant. La jeunesse algérienne a pris les commandes durant plusieurs étapes charnières de notre histoire. Elle n’a pas besoin de préambules, pour prendre en mains le présent et l’avenir. C’est un processus inévitable.

L’Algérie vit au milieu d’un voisinage bouillonnant et subit de grandes pressions, en raison de ses positions soutenant les peuples et les causes indépendantistes, à la tête desquelles la cause palestinienne. Quel est le secret de cette résistance et du succès de votre pays à faire face à tout cela ?

Il est vrai que notre fidélité à nos principes nous a attiré des adversités, des complots, des pressions et des chantages. Affronter un tel environnement n’est pas chose aisée, mais notre résistance n’est pas chose aisée non plus pour ceux qui tentent de s’immiscer dans nos affaires ou de toucher à la sécurité de notre peuple, à notre souveraineté et à l’indépendance de nos décisions. Le monde entier connaît notre capacité de résistance et notre long souffle qui nous ont permis de vaincre un colonialisme ayant duré 132 ans. Le secret réside également dans la justesse de ce à quoi nous croyons et que nous défendons, dans la cohésion du peuple algérien qui a constitué un front interne fort et imperméable aux manipulations et à la désinformation, ainsi que dans le sens politique élevé de notre jeunesse et le rassemblement des Algériennes et des Algériens autour de notre direction qui jouit de la confiance du peuple, ainsi que d’un lien unique les unissant à l’Armée nationale populaire, digne héritière de l’Armée de libération nationale révolutionnaire et héroïque.
De là, apparaît la pertinence de la détermination de l’Algérie à matérialiser l’indépendance de la décision économique, afin de prémunir nos positions des chantages et des pressions.
L’Algérie jouit d’une estime internationale dont nous sommes fiers. Nous sommes pour les moyens pacifiques dans la résolution des conflits et nous prohibons la violence et l’extrémisme. Nous n’aspirons pas à nous positionner sur la scène internationale, continentale et régionale à des fins de suprématie, mais plutôt pour perpétuer le message de nos martyrs, concrétiser les hautes valeurs que le peuple algérien a héritées d’eux et contribuer au renforcement de la paix et de la sécurité internationales.
Vous avez remarqué les priorités que l’Algérie s’est fixées dans son mandat comme membre non permanent du Conseil de sécurité, dont celle de porter la voix de l’Afrique et ses peuples oppressés et pousser la communauté internationale à assumer ses responsabilités envers les peuples colonisés. Les questions de décolonisation en Afrique et dans le monde, à la tête desquelles la cause palestinienne qui a saigné les cœurs, est un fondement de la politique étrangère de notre pays et un choix officiel et populaire irréversible.

L’Algérie a vécu sa deuxième élection présidentielle après le hirak, lors de laquelle les Algériens ont choisi la continuité en élisant le Président Tebboune pour un second mandat.
Est-ce la confirmation du succès des réformes et une reconnaissance de ses réalisations ?

Oui, effectivement. La continuité ne peut être que pour le bien et l’Algérie nouvelle n’a engendré que du bien. Les Algériens ont choisi la continuité, en élisant M. Abdelmadjid Tebboune comme président de la République pour un second mandat présidentiel en toute liberté et souveraineté, dans le cadre d’une pratique démocratique authentique, car ils ont constaté de visu le respect de ses engagements au cours de son premier mandat, à travers les campagnes de réformes et de changements qu’il a initiées dans divers domaines, ainsi qu’à travers sa prise en charge du dossier de la mémoire nationale et les ponts qu’il a jetés entre le passé, le présent et l’avenir que certains ont voulu couper. C’est vraiment la confirmation du succès de ses réformes et une aspiration à davantage de réalisations. C’est une confiance renouvelée en la capacité de l’Algérie nouvelle à relever les défis et à préserver les acquis, et une nouvelle confirmation de l’attachement des Algériennes et des Algériens à la République novembriste qui a adopté avec sérieux le projet national de la Proclamation du 1er Novembre 1954 et son slogan éternel «Par le peuple et pour le peuple».

Traduction : Farid A.

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