
Cette onzième édition est marquée par l’absence de compétition comme c’était le cas lors des précédentes éditions, comme l’a indiqué le commissaire du festival Abdelkader Bendamache lors de son allocution d’ouverture. Il précise que la prochaine édition, prévue pour le mois de ramadan 2023 sera compétitive et que les inscriptions sont d’ores et déjà ouvertes. La ministre de la Culture et des Arts Soraya Mouloudji a, de son côté, rappelé le rôle important de la poésie melhoun qu’elle qualifie de «matière historique» qui témoigne des liens sociaux et des relations humaines que les grands poètes ont relatés à travers les siècles. «La jonction de la poésie melhoun avec le style musical local a enfanté le chaâbi, ce genre authentique devenu un phénomène lié au quotidien culturel de chaque Algérien. Le chaâbi est une source d’adages, de sagesse et d’expérience de vie, un art complet qui a accompagné la lutte du peuple algérien contre le colonialisme», a-t-elle soutenu. Le spectacle d’ouverture a été grandiose en proposant au public plusieurs tableaux à commencer par une introduction de la pittoresque zorna de la troupe Tchougal, conduite par Abdelhamid, élève du grand Boualem Titiche. Place à un court film documentaire retraçant la vie et le parcours de Mahboub Safar Bati, grand compositeur, rarement interprète et auteur d’une centaine de textes devenus cultes dans le répertoire de cette musique citadine. Introducteur de la chansonnette dans ce style musical dominé par le qsid, la 11e édition du festival rend hommage au natif de Médéa qui avait la particularité de pouvoir passer, avec une grande aisance, d’un orchestre à un autre, collaborant ainsi avec les plus grands musiciens algériens de la fin du XXe siècle. Il a écrit et composé des merveilles historiques pour des maîtres du chaâbi à l’exemple de «Allo allo» pour El Hachemi Guerouabi, «Rah el ghali rah» pour Boudjemaâ El Ankis, «Sali trach kalbi yatik khbaro» pour Amar Ezzahi ou encore «Ma tahleflich» pour la grande Seloua. La programmation musicale a été de haute facture avec la quinzaine d’instrumentistes virtuoses ayant gratifié le public en interprétant un florilège de morceaux écrits et composés par Mahboub Bati sous la baguette du maestro Djamal Thaâlibi. Des artistes confirmés des quatre coins du pays ont fait sensation sur scène en interprétant entre autres «Kif amali w hilti, khalitini mahmoum, ach adabni», «a Mohamed ay sidi» face au grand bonheur d’un auditoire réceptif et mélomane, constitué essentiellement de connaisseurs. Il s’agit de Samir Lalleug de Blida, Aissa Baba Ami de Ghardaïa, Yacine Zouaoui de Bejaia, Rachid Guettafa de Mostaganem et enfin, le grand Abderrahmane Kobi d’Alger. Et puisque le poème est l’essence du chaâbi, Yacine Ouabed a déclamé «Heni heni ya henana» pour faire les louanges des caractéristiques de la personnalité algérienne tandis que Khaled Chehelal de Mostaganem a récité «Ya mhal el djoud» du grand poète Sidi Lakhdar Benkhlouf. La relève assurée Ce festival vise la découverte et l’encouragement des jeunes talents qui constitueront la relève des grands maîtres de ce genre musical populaire à l’image de Badji, El Anka et Amar Ezzahi. Dès l’entame de cette seconde soirée, la salle Ibn Zeydoun a vibré aux airs de la célèbre chanson «El barahe» (Hier) de feu Hachemi Guerrouabi. Après cette musique très appréciée des spectateurs, c’est au tour du chanteur Rachid Bellik de Tizi-Ouzou à la voix mélodieuse et idoine pour ce genre musical. Djamel Megharia de Chlef a interprété avec brio la chanson « Nafessi Ana Moulaha » de feu Mahboub Safar Bati. Par la suite, c’est Laidaoui Hamid et Nacereddine Galiz, tous deux d’Alger, qui se produisirent après une déclamation poétique de Khaled Chahelal de Mostaganem. Après leurs diverses prestations, tous ces musiciens reçurent un lot de livres. Notons que ce spectacle, sous la direction du chef d’orchestre Nacer Henni, a réuni un ensemble composé de 13 musiciens dont une femme, tous en tenue traditionnelle, dans un décor tout de velours rouge. Cette soirée chaâbi a ravi les spectateurs venus nombreux à cette manifestation culturelle.
K. Bentounes et K. Attouche.