Ukraine : L’Algérie rapatrie ses enfants

Ph. : Nacera I.
Ph. : Nacera I.
  • 76 ressortissants arrivent à Alger
  • D’autres vols sont prévus

Pas moins de 76 ressortissants algériens ont été rapatriés d'Ukraine, jeudi, via un vol spécial en provenance de Bucarest (Roumanie), et des membres de leurs familles sont venus les accueillir à l'aéroport international Houari-Boumediène, où l'émotion était à son comble au niveau des arrivées du terminal 4.

Romaissa, 26 ans, étudiante en cinquième année de médecine à Kharkov, est la première à sortir sous les youyous et les larmes de ses proches qui lui ont tendu un bouquet de fleurs pour lui souhaiter la bienvenue au pays. «Notre quotidien était rythmé par le retentissement des sirènes d'alerte», a-t-elle fait savoir. «J'étais la seule Algérienne au sein d'un groupe d'Ukrainiennes», a-t-elle précisé avant d'ajouter qu'elle était en communication constante, outre avec ses parents, avec ses copines qui lui remontaient le moral et lui permettaient de tenir bon. Romaissa a, par ailleurs, indiqué que quitter le territoire ukrainien a été le parcours du combattant. «J’ai quitté l'Ukraine via le passage frontalier avec la Roumanie. Les Roumains ont été fort sympathiques et nous ont bien pris en charge», a-t-elle déclaré avant de remercier vivement les services de l'ambassade d'Algérie à Bucarest qui ont mis, poursuit-elle, l'ensemble des moyens humains et matériels à leur disposition. Elle a confié avoir reçu un e-mail de son établissement universitaire en Ukraine lui notifiant la suspension des cours jusqu'à nouvel ordre et la possibilité de poursuivre son cursus dans n'importe quelle autre université européenne. Oussama, 20 ans, étudiant en chirurgie dentaire dans la ville d'Odessa, enlace sa maman qu'il n'a pas revue depuis 3 ans. «J'ai pu quitter l'Ukraine via la Moldavie avant d'être transféré en Roumanie par bateau», a-t-il confié. Revenant sur ce périple de tous les dangers, le jeune Oussama a affirmé que lui et quelques amis tunisiens ont pu quitter Odessa par bus à destination des frontières. «Nous avons dû continuer sur une longue distance à pied avant de fouler le sol moldave», a-t-il soutenu avant de mette en évidence le fait que les conditions météorologiques étaient défavorables. «Il faisait très froid et nous avions très peu mangé avant notre arrivée dans un camp d'accueil roumain où nous avons été très bien pris en charge avant l'arrivée des membres de notre représentation diplomatique qui nous ont assuré une prise en charge totale à Buccarest», a-t-il souligné avant d'ajouter que l'ambassade lui a réservé une chambre d'hôtel avant de lui annoncer qu'il allait être rapatrié via un vol spécial. Sa mère témoigne : «Je remercie Le Tout-Puissant car je ne pensais plus jamais revoir mon enfant chéri», a-t-elle clamé. De son côté, Bilal, 35 ans, étudiant en doctorat de physique bio-médicale à Kiev a, d'emblée, noté qu'il avait une pensée pour l'ensemble des Algériens qui sont encore sur place ou qui sont en route vers les frontières. «La situation est chaotique et l'instabilité est totale en Ukraine», a-t-il estimé avant de saluer l'élan incroyable de solidarité de la communauté algérienne résidant en Pologne et de notre ambassade à Varsovie qui se sont activement mobilisées pour prendre soin d’eux. Tenant la main de son oncle, Khouloud, 21 ans, étudiante en deuxième année de médecine, a affirmé, quant à elle, avoir vécu les pires jours de sa vie. «Je vivais à Kiev que j'ai dû quitter sous les bombardements. Et ce, en prenant le strict minimum soit juste une valise», a-t-elle insisté en affirmant, au passage, que dans une telle situation, notre instinct de survie se met en route et vous ne réfléchissez plus trop. «Heureusement, poursuit-elle, que nous étions avec nos proches au téléphone pour nous soutenir d'autant plus que notre ravitaillement se réduisait à une portion congrue». «Faire ses courses devenait un véritable défi donc nous mangions très peu. Puis, au fur et à mesure, les magasins et autres supérettes ont définitivement fermé», se remémore-t-elle. Khouloud a, d'autre part, affirmé que dès le début du conflit, l'ambassade d'Algérie en Ukraine a pris contact avec elle pour s'enquérir de son état. Revenant sur son parcours, la jeune fille a précisé qu'elle a pu quitter le territoire ukrainien via la ville frontalière de Lviv avant d'entrer en Pologne. «La dernière ligne droite était pénible. J’ai dû marcher sur une distance de 5 km. Il y avait des réfugiés de tous les côtés», a-t-elle déclaré. Mohamed, 22 ans, originaire de la ville de Batna, était, pour sa part, étudiant en 3e année de pharmacie à Odessa. «Nous avons survécu à une mort certaine», a-t-il confié avant de mettre en exergue que son principal projet est à présent de trouver une solution pour terminer ses études pour que l'ensemble de ses efforts ne tombe pas à l'eau. «Nous n'avons, à ce propos, plus eu aucune nouvelle de nos enseignants», a-t-il fait savoir avant d’embrasser sa mère sur le front. Djilali est venu spécialement de Tebessa pour accueillir sa fille, Baya, étudiante en médecine à l'université Olexandre-Bogonolets de Kiev. Il a révélé que l'université a refusé de donner aux étudiants étrangers leurs attestations de scolarité. «Les banques et les supermarchés ont fermé leurs portes du jour au lendemain. J'ai donc conseillé à ma fille de se regrouper avec d’autres Algériennes pour mieux s'organiser», a-t-il souligné avant d'ajouter que sa fille Baya et ses nouvelles amies avaient peur des pillages à Kiev. «Nous étions constamment avec elle sur whatsapp pour lui donner du courage ainsi que lui faire oublier la gravité de la situation. Ce n'était pas facile», a-t-il avoué. Mettant à profit cette opportunité, Djilali a tenu à nous relater le trajet de sa fille à destination de la Roumanie. «Baya a pu monter à bord d'un train à destination de Tchernovsky, une ville située à 20 km des frontières roumaines. Une fois en Roumanie, son transfert vers Bucarest était assuré», a-t-il précisé, avant de noter que lors de ses échanges avec sa fille, cette dernière lui a confié que l'afflux des ressortissants étrangers aux frontières était impressionnant. Parmi eux de nombreux Indiens et Jordaniens. Lotfi, le père de Rayane, qui suit des cours de pilotage d'avion à Kiev, soutient avoir vécu, avec son épouse, un véritable enfer. «Nous étions accrochés à nos téléphones et téléviseurs avec nervosité», a-t-il affirmé avant d'ajouter que lorsque la connexion téléphonique se coupait avec sa fille l'angoisse atteignait son paroxysme. «On imaginait le pire et à chaque coupure on se disait on vient de perdre notre fille», a-t-il conclu, les yeux larmoyants.
Sami Kaidi

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