Abdelkrim Bira, entraineur: "Le Sénégal mérite amplement son sacre"

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Dans cet entretien, le coach Abdelkrim Bira revient sur les différents aspects de la 33éme édition de la CAN, qui a vu la consécration des Lions de la Terranga.

El Moudjahid : Le rideau vient de se baisser sur la Coupe d'Afrique des nations. De manière globale, quel analyse faîtes de cette 33éme édition ?

 Abdelkrim Bira : Sur le plan organisationnel, je pense qu'il y a eu beaucoup d'insuffisances et ce à tous les niveaux. De l'avis de pratiquement toutes les délégations participantes, le cahier des charges n'a pas du tout été respecté. Je pense que le pays organisateur n'a pas mis tous les moyens nécessaires pour la réussite et le bon déroulement de cette fête continentale, qui reste l'événement sportif le plus important en Afrique. Cela dit, le continent africain a aussi ses réalités. L'autre point négatif, c'est l'absence du public. À l'exception des rencontres du Cameroun et des matchs du dernier carré, on n'a pas vu des stades pleins. Je n'en connais pas les raisons. Cependant, pour un pays de football, le fait de venir voir de près des stars mondiales, évoluant dans les plus clubs européens, est quand un évènement. 

 

Et sur le plan technique, qu'en est-il ?

 

Sur le plan technique, je pense qu'il y a eu un bon niveau quand même. À l'exception de certaines rencontres, nous avons assisté à de bons matchs. Sans aller loin dans l'analyse et à titre d'exemple seulement, sachez qu'il y a presque le même nombre de buts réalisés lors de cette édition et sa précédente. On a eu moins trois réalisations par rapport à l'Egypte. Par ailleurs, plus de 60% des buts ont été inscrits lors des 5éme et 6éme quarts d'heures. Cela démontre la qualité de la préparation physique des différentes sélections, le bon coaching et la richesse des bancs des remplaçants. Je pense que le niveau aurait pu être encore meilleur, si les joueurs des différentes sélections étaient mis dans de meilleures conditions pour s'exprimer. Jouer à 14h sous un soleil de plomb, ce n'est pas recommandé. C'est des joueurs qui évoluent en Europe où il fait moins chaud et à des horaires plus favorables.

 

Que pouvez-vous dire sur le niveau des différentes sélections ?

 

Le fait que la majorité des joueurs des différentes sélections évoluent dans les championnats Européens et les conséquences de la loi des Bahamas, initiée par l'Algérie, font qu'on assiste ses dernières années à une compétition Africaine avec un contexte et des éléments de nature Européens. C'est pratiquement une mini coupe d'Europe. Cela nous emmène à dire, une fois de plus, qu'il n'y a plus de petites sélection en Afrique. Dans cette édition, chaque sélection a évolué selon ses moyens, de manière générale, et a montré un visage propre à elle, en fonction de ses objectifs. On a vu trois catégories différentes de sélections. À l'image de l'Algérie ou encore du Cameroun, on avait cette classe de formation qui avait une obligation de résultat et où la charge émotionnelle était palpable. On avait aussi des équipes d'un autre rang, comme l'Égypte, le Maroc et la Côte d'Ivoire qui s'étaient fixé comme premier objectif atteindre le carré. On avait par ailleurs, des sélections, comme la Gambie et la Guinée Équatoriale et les Comores, qui n'avaient rien à perdre. Leurs objectifs étaient de tout donner dans cette compétition et bien évidemment jogger leurs niveaux en se mesurant aux meilleurs formations du continent pour préparer l'avenir. Comme vous le savez, il n'y rien de mieux qu'une compétition officielle pour faire une évaluation réelle.

 

Pensez-vous que c'est la meilleure équipe qui a remporté le tournoi ?

 

Oui, sans aucun doute. C'est une sélection qui jouit d'une stabilité, d'une part. Le staff technique est en place depuis cinq ans. L'équipe, déjà très compétitive en 2019, a été renforcée. Cette formation est très équilibrée dans ses compartiments, avec le meilleur gardien de but au monde, à savoir Mendy, une charnière centrale infranchissable composée du Napolitain Coulibaly et du défenseur du PSG Diallo, ainsi que de redoutable attaquant à l'image du sociétaire de Liverpool FC Mané. C'est une équipe qui est très dangereuses sur la verticalité. Le Sénégal dispose de joueurs rapides sur les côtés, notamment, qui lui permettent de créer le danger à chaque fois. Aussi, lorsque vous regardez la richesse de l'effectif, avec des joueurs évoluant dans les plus grands clubs Européens, on ne peut que rester admiratif de cette sélection qui mérite son titre. Le Sénégal a su tirer les enseignements nécessaires de sa finale perdue face à l'Algérie en 2019. Cela dit, j'ai beaucoup apprécié la sélection Égyptienne, qui a sorti trois grosses cylindrées dans les tours à élimination directe, avant la finale, et en jouant quatre fois de suite 120 minutes. Cette équipe, avec son jeu collectif à la perfection, a dû neutraliser ses adversaires,  qui disposaient pourtant meilleurs sur le plan qualités techniques individuelles. Aussi, l'Égypte, qui est aussi une belle équipe, perd aux tirs aux buts.  

 

L'échec du Cameroun dans cette compétition, aurait-il un impact sur cette sélection en prévision des barrages face à l'Algérie ?

Certes, c'est une grosse déception pour le Cameroun qui a tout fait pour garder le trophée à la maison. J'imagine que cet échec est difficile à digérer pour les joueurs. Cela dit, les barrages interviennent dans sept semaines. D'ici-là beaucoup d'eau aura coulé sous les ponts. Beaucoup de paramètres vont rentrer en ligne de compte. Notamment l'état de forme des joueurs et leurs santés. C'est une autre compétition qui va débuter. Jouer le mondial reste une motivation et un objectif important pour les deux sélections. Les staffs techniques auront le temps de tirer les conclusions nécessaires et de préparer leurs stratégies de jeu. Cela dit, j'ai beaucoup apprécié cette équipe du Cameroun. Certes, c'est une formation qui a bien sûr ses lacunes, mais qui reste très dangereuses sur le plan offensif. Être capable de remonter un score de 3-0 dans les vingt dernières minutes, est révélateur de la force de cette équipe. Il possède une paire d'attaquant qui peut faire mal à n'importe quelle défense. Ekambi et Aboubacar sont les buteurs du Cameroun. À eux deux ils ont inscrit 13 buts dans cette édition. Donc on doit prendre cette équipe très au sérieux.

M.S.N.

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