Anciens métiers : Cordonnier… un héritage en voie de disparition

De plus en plus de communes sont confrontées à une pénurie de cordonniers. Peu attractif, le métier n’est plus beaucoup enseigné. Les cordonniers sont renommés pour leur savoir-faire et leur travail sur les matières telles que le cuir. Mais ils ne sont plus ce qu’ils étaient auparavant. Du point de vue du professionnel, il est devenu rare que les enfants suivent les traces de leurs parents. C’est un savoir-faire qui s’est longtemps transmis de père en fils. Certaines boutiques existent depuis des générations. Mais aujourd’hui, beaucoup de cordonniers qui s’apprêtent à partir à la retraite ne trouvent pas de repreneur. Il devient de plus en plus difficile de trouver un endroit pour faire réparer ses chaussures. Ami Mohamed a roulé sa bosse pendant quelques années dans d’autres villes, en exerçant son métier.
Dans son petit coin de la rue à Oued Tarfa dans la commune de Draria, il doit à la fois faire les réparations et accueillir les clients. « Ce qui me plaît, c’est de pouvoir à la fois travailler de mes mains et en même temps être en contact avec les gens », raconte-t-il. Il conseille ses clients, connaît par cœur le nom des plus fidèles et même leurs petits tracas. Selon lui, le plus difficile est de se faire connaître, surtout auprès des plus jeunes : « certains ne savent pas ce qu’est un cordonnier », nous dira-t-il. « Entre les années 1995 et 2000, avec l’emploi du plastique et le développement des chaussures à bas coût, la moitié des cordonneries ont changé de métier », explique-t-il. Et les habitudes ont changé « aujourd’hui, on jette tout », déplore ami Mohamed. Au quotidien, ce dernier répare surtout les chaussures.
Il change un talon, ressemelle, pose des patins. Pour s’assurer un revenu minimum, il a diversifié son activité. Les bambins du quartier, s’adressent aussi à lui pour faire réparer leur ballon. Depuis qu’il est dans l’activité, il constate que les mentalités changent. Les cordonniers sont membres d’une profession en voie de disparition. Les gens sont davantage intéressés par le jetable. Ce sont les marques qui intéressent les gens même si c’est en plastique. Les choses faites de manière artisanale n’ont plus autant de considération qu’avant. La transmission d’un métier de génération en génération se fait de plus en plus rare. Actuellement, nombreux sont ceux qui font des études. Le choix d’une orientation est devenu trop vaste, selon Ami Mohamed. Alors qu’avant, certains avaient la chance d’avoir un père boucher, boulanger, cordonnier… Il raconte aussi qu’on ne pense jamais à dire "de père en fille" lorsqu’on évoque ces métiers, ce qui est inhabituel. Ce qui est difficile dans ces situations-là, c’est d’être le patron de son enfant. Ami Mohamed repense à son père qui lui dictait des ordres pour lui apprendre le métier.
Pour la descendance de Ami Mohamed, la situation sera différente. La boutique de cordonnerie ne suivra plus les descendances puisque le choix est désormais possible. « Il faut aimer son métier pour le faire », indique-t-il, passionné. Même si son travail est prenant, il est en fier « tous les matins, je viens travailler avec le sourire ». Un luxe qui n’est pas donné à tout le monde.

Sihem Oubraham

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