S’atteler à consigner un legs quelles que soient sa nature et sa portée, accomplir cette tâche avec ferveur, constance et scrupule, dans l’espoir jamais assouvi d’avoir atteint l’exhaustivité, est à la fois un tour de force. Mais le jeu en vaut la chandelle car une œuvre de cette nature permet, à coup sûr, de lutter contre l’oubli, de fixer des repères aux citoyens, et de fortifier l’ambition de forger un solide lien intergénérationnel, de cultiver un sentiment de fierté envers son patrimoine littéraire, artistique, culturelle… On perçoit, très modestement, dans cet ouvrage, ce que l'auteur et ses collaborateurs visent à travers ce « Dictionnaire des écrivains et des érudits algériens, à savoir, rafraîchir les mémoires et stimuler les esprits. Dans une introduction, Rabah Kheddouci expose les traits saillants de sa démarche pour parvenir à ses fins. Il écrit : « Les savants et les créateurs algériens, penseurs, chercheurs, inventeurs ou écrivains, ne peuvent être tous regroupés dans un seul livre. La liste est longue. Certains d'entre eux restent encore méconnus, leurs ouvrages ou manuscrits conservés dans les grandes bibliothèques d'Espagne, de France ou de Turquie. Et parmi ses savants et écrivains, nombre de ceux vivant à l'étranger, ont enrichi et enrichissent encore la connaissance et l'imaginaire universels par leurs travaux scientifiques, littéraires ou encore artistiques ». Il poursuit son argumentaire en rappelant que des connaissances se trouvent également dans les anciennes zaouïas à l’instar de celle de Touat au sud-ouest algérien et l’Athmania à Tolga (Biskra) ; en plus des mausolées des « aimés de Dieu » parsemés, çà et là à travers tout le pays, qui, pour la plupart, sont des érudits de la langue, du fiqh, de la philosophie, la médecine ainsi que des hommes de lettre. Sans oublier, les trésors de l’imaginaire populaire de la culture orale, tous genres confondus ; mais encore les experts émigrés en Orient et en Occident qui ont apporté à la connaissance humaine de nouveaux acquis scientifiques, dans toutes sortes d’arts, de littératures ou encore dans les moyens technologiques modernes. Au-delà de ce souci de conserver, ou d’exhumer autant que faire se peut, ce legs foisonnant, il est question aussi, de savoir-faire preuve d’une sincère reconnaissance et marques d’estime à tous ces arpenteurs du savoir. A leur adresse, il mentionne : «Nous estimons que la réalisation de ce dictionnaire n’est autre qu’un hommage collectif et symbolique aux personnalités qui ont offert à l’humanité jusqu’à «la substantifique moelle» de leur pensée, à celles qui donnent encore jusqu’à l’essence même de leur existence. C’est également une réponse à tous ceux qui prétendent qu’il n’y a point de culture en Algérie ancestrale et contemporaine». Rabah Kheddouci, écrivain et journaliste, est né à Béni Misra. Il a vécu pour la passion de la nature, de l’enfance et de la patrie, pour la lutte de Libération nationale de 1955 à 1956 en compagnie des révolutionnaires des monts de l’Atlas blidéen et de 1957 à 1962 dans le camp de concentration français situé au centre de la zone interdite. Il remporta plusieurs prix. Dans le domaine de l’éducation, il fut enseignant, puis inspecteur. Parmi ses œuvres on peut citer : La victime (roman) ; Les étrangers (roman) ; Contes algériens ; Mes voyages (récits de voyages) ; Visages et phénomènes - miel amer - (récits très courts) ; Paroles contre-courant (articles). Il est aussi l’auteur de «Proverbes algériens», issus du terroir, présentés dans un modeste livre qui contient toute la sagesse, les valeurs sociales et morales qui peuvent servir d’aide aux chercheurs, aux étudiants et aux curieux et autres profanes qui s’intéressent au passé de notre pays.
M. B.