
La question de l’emploi en Algérie, et notamment celui des diplômés, continue à faire partie des priorités de l'heure. Pour Abdelkader Djeflat, de l’université de Lille, l’un des traits communs à toutes les politiques menées jusque-là est d’avoir «marginalisé la sphère du savoir, notamment par des politiques de formation et de recherche qui ont largement évolué en marge de la sphère économique et n’ont pas déployé l’effort nécessaire pour relever le défi de l’emploi des jeunes». Pour pallier les insuffisances et les limites des stratégies et modèles adoptés, l’universitaire relève qu’il est «nécessaire d’envisager un autre mode de développement plus centré sur le capital humain, le savoir et la créativité». À ses yeux, une fenêtre d’opportunité vient de s’ouvrir : l’économie de la connaissance, que l’Algérie a choisie afin de mobiliser au mieux et valoriser son potentiel humain. «Cette performance ouvrira la voie à ce qu’on appelle la Gig Economy, fortement créatrice d’emplois», affirme M. Djeflat. Le taux de pénétration du Smartphone en un temps record, dit-il, «a montré l’appétence des jeunes à s’engouffrer massivement dans le digital». Et précise : «Cette insertion donne tout son sens au dividende démographique si elle est proprement accompagnée par les politiques publiques adéquates.» C’est à partir de cet atout, explique l’auteur de cette étude pour le compte des Cahiers du Cread, que «l’économie de services, une dimension fondamentale de l’économie de la connaissance, pourra exploser. Le phénomène d’ubérisation de l’économie peut absorber une bonne partie des diplômés chômeurs. L'ubérisation de l'économie entraîne, d'une part, une individualisation de l'activité, d'autre part, la pluriactivité». Par ailleurs, M. Djeflat recommande «d’intensifier l’usage des TIC pour des besoins professionnels d’une manière plus intense, en croisant cela avec les avantages comparatifs en termes de coûts salariaux pour bénéficier du processus de délocalisation des services des entreprises du Nord». Le secteur des services en Algérie atteignant les 48.14% du PIB en Algérie en 2020, ce qui représente un potentiel de développement «non négligeable et un retard à rattraper par rapport aux autres pays de la région». Le secteur des services hors TIC, lui, «recèle un potentiel de croissance absolument phénoménal et qu’il s’agit de capturer et de valoriser». Dans son analyse, l’universitaire préconise également de «stimuler le rendement des entreprises locales en augmentant le niveau de concurrence. Il y lieu de libérer son fort potentiel de création d’emplois pour les diplômés». Pour M. Djeflat, «l’axe d’effort principal à développer est de trouver le moyen pour réhabiliter la fonction recherche au niveau des entreprises et du milieu socioprofessionnel, d’une manière générale». Enchaînant, l’auteur de l’étude souligne que «les pouvoirs publics ont mis en place un certain nombre de mécanismes, notamment à travers les incubateurs, nouvellement créés au niveau des établissements d’enseignement supérieur». Ces incubateurs «constitueront le fer de lance en matière d’innovation, de création de richesse, de création de start-up, et en matière de création d’entreprise de la part des étudiants».
Fouad Irnatene