
Que de fois chantée pour ses eaux majestueuses, pleurée par beaucoup aussi lorsque les forces du mal ont failli, plus d’une fois, l’effacer de la mémoire des Sétifiens, cette fontaine mythique au cœur du vieux Sétif continue de conquérir, au fil des ans, la sympathie de multiples générations qui ont accompagné cette gardienne du temple depuis des lustres, à l’ombre de ses quatre platanes centenaires.
Depuis des lustres, en effet, Ain El Fouara, symbole de la ville et partie intégrante de son quotidien, a été aussi ce point de rencontres conviviales de ceux qui y transitent, notamment durant la saison estivale, un lieu de rencontres obligé à l’ombre de plus d’un siècle d’histoire mouvementée, sans pourtant que la beauté sublime de cette belle œuvre d’art ne soit affectée. Cette fontaine mythique continue d’offrir, de jour comme de nuit, hiver comme été, son eau fraîche et limpide à tous les passants. Ain El Fouara est donc «restée de marbre», elle a résisté à bien des humeurs. tantôt elle est vénérée, tantôt reniée. Elle a même été attaquée à la dynamite en 1997 par les forces du mal et, plus tard, au burin et au marteau par des déséquilibrés mentaux. Les Sétifiens sont restés attachés à cette compagne centenaire, l’accompagnant dans ses moments de tristesse et de joie. L’histoire de ce monument emblématique commence, en fait, le 4 juin 1894, alors que le conseil municipal, siégeant sous la direction du maire Aubry, adopte une proposition du conseiller Bastide pour la reconstruction de la fontaine édifiée sur ces mêmes lieux et qui menaçait de s’effondrer. Lors d’un déplacement du maire à Paris durant l’été 1896, il demande alors à rencontrer le directeur des beaux arts duquel il sollicite la remise d’une belle statue pour décorer le projet de la fontaine nationale qui devait être édifiée à Sétif. Le premier magistrat de la ville est alors conquis par cette belle œuvre qu’il découvre et demande aussitôt au sculpteur Francis de St Vidal d’en faire don à la ville. Le directeur des beaux arts, représentant alors le ministre de l’instruction publique, informe les responsables locaux que cette belle œuvre d’art serait expédiée vers Sétif au mois de juillet 1898, après son exposition au salon universel de Paris. Les frais de transport sont évalués approximativement à 2650 francs, non compris les frais de débarquement au port de Philippeville (Skikda). La part de la commune pour la réalisation de cette œuvre est de 9000 francs. A la suite de quoi, le conseil municipal vote alors une autorisation spéciale de crédit dont l’inscription sera régularisée en novembre 1898 et l’entrepreneur Francione est alors chargé de la réalisation du socle devant recevoir cette œuvre d’art, au moment où la statue monumentale entame son voyage par voie maritime de Marseille vers Skikda d’où elle mettra 12 jours pour arriver à Sétif sur une charrette accompagnée d’un garde champêtre qui recevra une récompense de 20 francs. Qui boira de son eau, reviendra un jour, dit-on !
F. Z.