Migrants clandestins, traite des personnes, trafic de drogue et réseaux terroristes : Les connexions dangereuses

Le ministre de l’Intérieur, Brahim Merad, a mis l’accent sur l’engagement de l’Algérie à veiller «à l’établissement d’un cadre juridique actualisé et intégré, afin de lutter efficacement contre les réseaux de trafic et de traite des personnes».

Consciente des enjeux liés aux phénomènes du trafic de la traite des migrants et de la traite des personnes, l’Algérie a adopté, ces dernières années, sur instructions du président de la République Abdelmadjid Tebboune, une approche globale et intégrée, fondée sur des dimensions juridique, sécuritaire, opérationnelle et humanitaire, mise en place en coordination avec l’ensemble des parties concernées, et continuellement renforcée pour s’adapter à l’évolution des méthodes criminelles associées. C’est ce qu’a affirmé le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, Brahim Merad, à l’ouverture, hier au CIC d’Alger, des travaux d’un colloque scientifique consacré «aux méthodes d’investigation et de surveillance de la traite des migrants et de la traite des êtres humains». M. Merad a aussi tenu à préciser que l’approche en question «est mise en place en coordination avec l’ensemble des parties concernées, et continuellement renforcée pour s’adapter à l’évolution des méthodes criminelles associées». «Le trafic des migrants et la traite des personnes figurent parmi les crimes les plus graves menaçant nos sociétés aujourd’hui», a-t-il insisté, ajoutant qu’il s’agit là «d’un pilier central des réseaux criminels qui génèrent d’énormes profits en exploitant la souffrance humaine et l’espoir d’une vie meilleure, pour en tirer des gains financiers illicites». Selon le ministre, «l’évolution de ces phénomènes criminels et de leur lien avec les réseaux de trafic de drogue, d’armes et les organisations terroristes, les approches unilatérales jusque-là adoptées par divers pays ont montré leurs limites». Il y a donc nécessité «d’adopter une réponse coordonnée et intégrée entre les pays et les organisations internationales, afin d’y faire face et d’assurer la protection des victimes de toutes formes d’exploitation et de violation», a-t-il affirmé. D’une durée de trois jours, l'événement du colloque, organisé par l’Université arabe Naïf des sciences de la sécurité, relevant du Conseil des ministres arabes de l’Intérieur, en coopération avec l’Organisation internationale pour les migrations, et avec la participation du ministère de l’Intérieur, a pour objectif d’approfondir les échanges constructifs, susceptibles de renforcer les capacités des différentes instances impliquées dans la lutte contre ces crimes. Les exposés qui seront communiqués, à l’ occasion, par les experts et les spécialistes du domaine, permettront «d’ouvrir de plus larges perspectives pour une coopération durable sur les différentes problématiques liées, dans le but de renforcer les cadres de protection des victimes et d’assurer une plus grande efficacité dans le démantèlement de ces réseaux criminels transnationaux», a encore ajouté le ministre. En ce sens, Brahim Merad, qui a mis l’accent sur l’engagement de l’Algérie en la matière, a veillé, dit-il, «à l’établissement d’un cadre juridique actualisé et intégré, conforme aux normes internationales de lutte contre ces crimes transnationaux, fondé sur des lois strictes permettant aux services de sécurité et de justice de lutter efficacement contre les réseaux de trafic et de traite des personnes, tout en préservant les droits et la dignité des individus». Plus explicite, il cite la loi promulguée en 2023 qui définit clairement les procédures de détection de la traite des personnes et les sanctions applicables à ses auteurs, et a également institué une commission nationale de lutte contre la traite des personnes, chargée notamment de sensibiliser, de renforcer la formation et d’apporter un soutien aux victimes. De leur côté, les services de sécurité ont accordé une attention particulière à ce domaine, en renforçant leur vigilance et leur présence opérationnelle, ce qui a permis le démantèlement d’un nombre important de réseaux criminels actifs et de contrecarrer leurs plans, a-t-il poursuivi. «Ces services œuvrent aussi à l’adaptation constante de leurs méthodes de travail, notamment par l’intégration des technologies les plus avancées», a encore insisté M. Merad. Le cadre juridique national a été également renforcé, appuie-t-il, «par de nouvelles mesures visant à améliorer les mécanismes et les dispositifs de protection des migrants victimes de ces crimes, en veillant à leur prise en charge humanitaire à tous les niveaux, sanitaire, psychologique et social, conformément aux valeurs de respect de la vie humaine, de solidarité et des droits humains». Saluant le rythme de la coopération et de la coordination avec les organisations onusiennes actives dans ce domaine, a l’instar de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), qu’il a citée, le ministre s’est félicité, dans ce cadre, des avancées réalisées et de la gestion exemplaire et efficace des programmes de retour volontaire des migrants en situation irrégulière et leur réintégration dans leur pays d’origine. Un programme très ambitieux a été établi pour l’année en cours avec le Bureau de l’OIM en Algérie, avec à sa tête Mme Veerassamy Lalini, nouvellement installée à ce poste et à l’égard de laquelle Brahim Merad a exprimé ses vœux de bienvenue, l’assurant de la disponibilité permanente de l’Algérie le but de protéger les migrants, de préserver la sécurité de notre pays et d’agir en conformité avec la Charte des Nations unies et les règles de fonctionnement de l’OIM. Il a également rappelé que la collaboration étroite entre l’Algérie et l'instance onusienne a déjà facilité, dans les meilleures conditions en 2024, le retour volontaire de plus de 8.000 migrants en situation irrégulière. Notons enfin que l’ouverture du Forum a vu la présence du ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaâ, du Secrétaire général du ministère de la Défense nationale, le Général-Major Mohamed Salah Benbicha, du Conseiller auprès du président de la République, chargé des affaires en lien avec la défense et la sécurité, M. Boumediene Benattou, du Directeur général de la Sûreté nationale, Ali Badaoui, de walis et de responsables d’instances nationales concernées par le traitement de ce phénomène et de représentants du corps diplomatique accrédité.

Le ministre s’est félicité des avancées réalisées et de la gestion exemplaire et efficace des programmes de retour volontaire des migrants en situation irrégulière et leur réintégration dans leur pays d’origine.

K. A. 

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Les périls à éviter

L’Algérie a été, à travers l’histoire, un pays de migrations, de partages et d’échanges. Cependant, cette ouverture sur autrui ne peut s’affranchir du souci de se prémunir contre les éventuels dangers que pourraient entraîner une trop grande porosité des frontières. L’accueil de migrants en état de détresse, surtout ceux fuyant des guerres ou la famine, ne saurait être une caution à l’immigration de masse, porteuse de dangers multiples et de défis socioéconomiques. Hassan Kacimi, qui occupait, il y a trois ans, la fonction de Directeur au ministère de l’Intérieur, chargé du centre opérationnel de la migration, actuellement à la retraite, avait cerné le danger principal en ciblant, à la radio nationale, «la montée en puissance de l’activité des réseaux criminels spécialisés dans le trafic illicite de migrants africains à travers les frontières algériennes», tout en soulignant «les graves répercussions de l’activité de ces réseaux sur la sécurité nationale et géostratégique de l’Algérie, car l’activité de ces réseaux est en harmonie avec les plans internationaux et sionistes qui visent à modifier la composante démographique des régions frontalières situées dans le Grand-Sud, ce qui permettrait de saper plus facilement l’unité et la stabilité du pays à l’avenir». Il y a quelques années, M. Kacimi était allé plus loin, en affirmant que les migrants «suivent des routes encadrées par des groupes armées», permettant à des éléments terroristes de s’y infiltrer. La reconduite, par les autorités algériennes, de migrants clandestins aux frontières participe du souci de se prémunir d’éventuelles infiltrations terroristes de l’extérieur sous couvert de détresse humaine. Elle se fait d’ailleurs en concertation avec les autorités du pays frontalier et en coordination avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui est une organisation intergouvernementale, et le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR), relevant des Nations unies. Dans ses opérations de reconduite aux frontières, l’Algérie ne sollicite l’assistance ou l’aide matérielle d’aucun pays, utilisant sa logistique propre. De plus, ces opérations se font par groupes et non pas individuellement, comme le font d’autres pays. L’approche algérienne de lutte contre le trafic de migrants a été affinée, à travers les années, pour s’adapter aux méthodes sans cesse changeantes des réseaux de trafiquants. L’arsenal juridique a évolué justement pour s’y adapter, en témoigne la promulgation, le 7 mai 2023, de la loi 23-04 relative à la prévention et à la lutte contre la traite des personnes, où sont nettement mentionnées les sanctions à l’encontre des trafiquants et aussi l’assistance due aux victimes, ainsi que la mise sur pied, dans la foulée, du Comité national de prévention et de lutte contre la traite des personnes, pour sensibiliser l’opinion publique aux dangers de la traite des personnes. Dans un environnement de plus en plus hostile, se défendre par la prévention est autant un droit international qu’un devoir envers la nation.

F. A.

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