Les statistiques du Bac le confirment : Les filles prennent le pouvoir par le savoir

Les trois meilleurs bacheliers cette année en Algérie sont des… bachelières. Le podium des meilleures moyennes nationales dans cet examen si emblématique, véritable tournant dans le parcours éducatif du citoyen, est accaparé par des filles.

À bien analyser la cartographie du développement scolaire, c’est tout sauf une surprise. Plus même : c’est la confirmation d’une tendance nationale qui tend à se propager à travers l’ensemble du pays. Rawnak Zani (Souk-Ahras), Malak Yahiaoui (Mascara) et Nardjes Kamel (Alger) ont été omniprésentes dans les médias, ces deux derniers jours. Totalement inconnues du grand public avant dimanche, deux chiffres les ont sorties de l’anonymat : 19,70 et 19,52, soit les moyennes obtenues au bac respectivement par la première nommée et les deux autres. Que des filles brillent au baccalauréat et figurent parmi les meilleurs n’est pas (ou plutôt n’est plus) une nouveauté. Ce qui l’est, en revanche, c’est que les trois premières places soient accaparées par des filles. Des filles issues de l’est, de l’ouest et du centre du pays, soit de presque toutes les régions. Tout un symbole. Est-ce là le seul fait d’armes des demoiselles bachelières ? Non. Il y a plus significatif : la majorité des lauréats sont des filles. Il s’agit d’une tendance devenue vérité, tant les examens des dernières années ont confirmé que les filles réussissent dans les études mieux que les garçons. On pourrait croire que dans les grandes villes, la gent féminine, en raison d’une supposée plus grande ouverture d’esprit vers les études, s’affirme sur le terrain du savoir. Or, les résultats à travers les régions révèlent que cela n’est qu’un préjugé : les filles bonnes élèves se trouvent dans les différentes régions du pays. Qu’on en juge par quelques chiffres du baccalauréat 2025. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, encore une fois N°1 en matière de taux de réussite, les filles sont devant sur tous les plans : plus grand nombre de candidats inscrits, plus grand nombre de candidats présents dans les établissements publics, plus fort taux de réussite au niveau local (62,56%, contre 37,44% pour les garçons), un fort pourcentage de réussite parmi les filles qui se sont présentées dans les établissements publics (69,59%), ce qui veut dire que plus des deux-tiers des candidates au bac à Tizi Ouzou ont réussi à le décrocher. Plus même : alors qu’il y a eu plus de garçons que de filles parmi les candidats issus des établissements privés, il y a eu quand même plus de filles reçues que de garçons. Cerise sur le gâteau : la meilleure moyenne au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou a été décrochée par une fille, Sara Boukelal. La wilaya qui est arrivée deuxième au niveau du taux de réussite local, Relizane, n’est pas en reste, puisque la majorité des lauréats ont été des filles (65,58%). Toujours à l’Ouest, le taux de réussite des filles à Mascara est de 58%. Autre exemple, de la région Est cette fois : à Souk-Ahras, les filles constituent 61,42% des lauréats. Et le Sud, alors ? Ghardaïa vient confirmer on ne peut mieux la tendance : 63,85%, soit près des deux-tiers des lauréats, sont des filles. Ainsi, que ce soit en montagne, dans la campagne ou au milieu d’oasis, l’élève algérienne est plus appliquée dans les études que l’élève algérien. Il s’agit donc, pour les lycéennes algériennes, d’une véritable «prise de pouvoir par le savoir». Sans préjuger des conclusions auxquelles une étude sociologique sérieuse et exhaustive de ce phénomène pourraient aboutir, une réalité se dégage : la fille croit en plus aux vertus du savoir que le garçon. Quel que soit le milieu social et quelle que soit la région. Que ce soit parmi les populations présumées ouvertes d’esprit ou dans les milieux connus pour être conservateurs. Peut-être en raison d’une plus grande discipline, sans doute dans le but de se doter des moyens d’une émancipation personnelle future, plus probablement du fait de l’échec scolaire qui touche de plus en plus de garçons, plus tête-en-l’air, plus préoccupés par le gain rapide et facile ou plus facilement victimes des vices engendrés par les mauvaises fréquentations. Ce qui est sûr, c’est que la gent féminine est de plus en plus présente dans les secteurs-clés de l’économie, des sciences pointues, de la santé et de la fonction publique. Cela est loin d’être un hasard. Chiffres à l’appui.

F. A.

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