Mohamed Yeslem Beissat, ministre sahraoui des Affaires étrangères : «Le plan d’autonomie marocain est un écran de fumée»

Ph: Ikessoulène
Ph: Ikessoulène
  • La RASD crée un organisme judiciaire pour défendre ses richesses face à l’occupation marocaine

Incarnant une diplomatie sahraouie résolue à faire prévaloir la primauté du droit international et la souveraineté du peuple sahraoui, en misant sur la mobilisation continentale et internationale et sur l’alliance stratégique avec l’Algérie, piliers essentiels dans un contexte de tensions renouvelées et d’enjeux géopolitiques croissants, Mohamed Yeslem Beissat, ministre des Affaires étrangères de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), maintient une posture diplomatique claire et ferme concernant la solution du conflit au Sahara occidental.
Lors d’une conférence de presse qu’il a tenue hier au siège de l’ambassade sahraouie à Alger, le diplomate a rejeté «catégoriquement» le plan d’autonomie proposé par le Maroc, qu’il qualifie d’initiative «visant essentiellement à masquer une occupation illégale». M. Beissat a affirmé que les plans du Makhzen «manquent de volonté politique réelle pour instaurer une paix durable et conforme au droit international». Il appelle explicitement Rabat à retirer ces propositions pour permettre une négociation sincère. À l’aube de son cinquantième anniversaire, la République arabe sahraouie démocratique (RASD) «marque un demi-siècle d’existence et de lutte constante pour la liberté, l’indépendance et l’autodétermination de son peuple». Ce moment solennel, a souligné le ministre, illustre «la résilience remarquable et l’attachement profond des Sahraouis à leur projet national, malgré les conditions difficiles et l’occupation prolongée par le Maroc».
M. Beissat a insisté sur le fait que cette «longue lutte de cinquante ans prouve la détermination, la patience et la fermeté du peuple sahraoui, qui considère comme unique solution légitime l’organisation d’un référendum d’autodétermination, conformément aux principes reconnus par la communauté internationale et aux résolutions onusiennes». Pour M. Beissat, la résolution du conflit ne peut passer que par l’application stricte du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, tel que défini par les résolutions des Nations unies. Il insiste sur la tenue d’un référendum libre, impartial et supervisé par l’ONU, permettant aux Sahraouis de choisir entre l’indépendance et l’intégration.
Ce positionnement s’inscrit dans la continuité du plan onusien de règlement, auquel la RASD reste attachée malgré la complexification du contexte géopolitique. En dépit du contexte de guerre et d’occupation, la RASD a réussi, comme l’affirme M. Beissat, «à bâtir des institutions démocratiques solides, à instaurer un système judiciaire efficace». La RASD demeure confrontée à une occupation marocaine qui dure depuis un demi-siècle. Cette occupation est dénoncée comme «une agression permanente, marquée par des violations systématiques des droits humains, le pillage des ressources naturelles et la confiscation du territoire sahraoui» a expliqué le diplomate, en affirmant que la RASD «vient de créer un organisme judiciaire dont le rôle est de préserver les richesses du pays, et de poursuivre devant les instances juridiques, les entreprises économiques ayant conclu illégalement, des contrats d’exploitation, d’extraction ou d’investissement des richesses des terres sahraouies». M. Beissat a critiqué vivement les trente années de négociations sous l’égide de l’ONU et de l’Union africaine, qui «n’ont pas abouti en raison de la mauvaise foi marocaine» et du «refus de Rabat de respecter les accords internationaux, notamment le cessez-le-feu». Par ailleurs, la proposition de plan d’autonomie avancée par le Maroc est «rejetée comme une tentative mesquine de légitimer l’occupation et de contrer la décolonisation». Face à cette situation, le ministre appelle la communauté internationale «à accroître son engagement, à assurer le respect strict des décisions onusiennes, à soutenir la libération immédiate des prisonniers politiques et à mettre un terme aux pratiques abusives du Maroc sur son territoire».
Le diplomate se félicite que «l’Algérie joue un rôle de soutien politique, diplomatique et humanitaire essentiel à la cause sahraouie», tout en affirmant son rejet des initiatives marocaines qui contournent le droit international, et «en œuvrant pour une résolution pacifique et juste fondée sur l’autodétermination du peuple sahraoui». Se référant aux récentes interventions médiatiques du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, le ministre sahraoui a déclaré que «l’Algérie manifeste ainsi son attachement au principe fondamental du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qu’elle entend défendre dans toutes les instances internationales».

T. K.

Multimedia