
Le ministre des Moudjahidine et des Ayants droit, Laïd Rebiga, a animé, hier au Forum d’El Moudjahid, une conférence, au cours de laquelle il a abordé diverses questions qui sont au cœur des missions et des attributions du ministère, notamment le volet de la mémoire nationale, avec tout ce que cela comporte en termes de préservation, d’enrichissement et de transfert en direction des générations actuelles et futures, la protection sociale des moudjahidine et des ayants droit sur laquelle le ministre a mis l’accent.
Cette prise en charge est perceptible, notamment à travers les soins de santé, le transport, le versement des pensions, les centres de repos, le centre national d’appareillage des invalides de la guerre de Libération de Douéra et ses annexes. «La vision du ministère pour ce qui touche à ce volet ne doit pas être appréhendée sous l’angle d’une rétribution pour service rendu, parce que nous ne pouvons pas évaluer le djihad du peuple algérien sur la base d’avantages octroyés, mais être intransigeant sur la garantie d’une existence digne.
Tous les avantages consentis et toutes les mesures y afférentes doivent parvenir aux bénéficiaires sans difficulté et dans la transparence totale.
C’est une mission qui entre dans le cadre de la politique générale du gouvernement, conformément au programme du président de la République. Nous nous impliquons pleinement dans cette politique qui s’améliore et s’élargit jour après jour», dit-il.
La mémoire nationale, un objectif cardinal
«L’histoire de l’Algérie regorge de faits emblématiques, c’est le résultat de siècles de civilisation et de pensée qui ont forgé la personnalité des Algériens», dit le ministre.
Les Algériens ont constamment brandi la devise de l’unité nationale, la lutte pour leur libération et la justesse de leur cause.
S’agissant des dossiers de la mémoire, souligne Laïd Rebiga, chaque évènement qui s’est déroulé durant la période coloniale fait partie de la mémoire.
La question des tueries massives d’Algériens est un énorme dossier. Comment peut-on oublier ou mettre sous le boisseau, ce qu’a accompli l’administration coloniale depuis la première bataille de Staouéli, jusqu’à la bataille de Laghouat qui est un véritable holocauste perpétré dans notre pays ?
Les Français répondaient systématiquement à chaque mouvement de résistance par une véritable boucherie et instauraient un terrorisme d’État. Le ministre cite, à ce sujet, un cas parmi tant d’autres de disparus d’une manière atroce.
«Nous avons recensé des puits dans douze wilayas pleins de restes de martyrs. Chaque puits contient entre dix et plusieurs centaines de restes de martyrs, des preuves qui attestent des crimes horribles du colonialisme français», a-t-il ajouté.
Chaque dossier a ses propres éléments et les structures du ministère, notamment le Centre national d’études et de recherches sur le Mouvement national et la Révolution du 1er Novembre 1954, et les moudjahidine participent à son enrichissement.
«Le dernier accord conclu avec le ministère de l’Enseignement supérieur nous a permis d’entrevoir les perspectives d’une étude attentive de notre histoire, par une coordination étroite entre nos laboratoires de recherche spécialisés dans notre histoire moderne et contemporaine.»
C’est une approche nouvelle qui permettra d’évaluer et d’exploiter tous les travaux consacrés à la préservation de la mémoire.
Les institutions en charge de l’écriture de l’histoire sont des vecteurs de sensibilisation de notre jeunesse ; elles sont aptes à lui fournir cette énergie qu’est le sentiment d’appartenance nationale.
Concernant les dossiers relatifs à la récupération des crânes et restes mortuaires des martyrs de la résistance populaire, aux essais nucléaires dans le Sahara, aux disparus de la guerre de Libération, ainsi qu'à la récupération des archives et dossiers des déportés et tous les dossiers liés aux crimes commis par le colonisateur, Laïd Rebiga a souligné que le ministère les a traités, «dans le cadre de nouvelles approches thématiques fondées sur des recherches académiques et un fondement juridique».
Il a précisé que la commission paritaire chargée d'étudier les dossiers en suspens dans le domaine de la mémoire avec la partie française a été confiée par le président de la République à des experts, historiens et chercheurs, et qu’elle œuvrera à compléter tous les dossiers liés à la mémoire nationale, et le ministère des Moudjahidine soutient ce comité et coordonne le travail. Il a indiqué que la partie française a fait preuve d'une certaine souplesse dans le dossier de la récupération des crânes et des archives.
Concernant la protection des sites historiques, il s'agit d'un programme important, où un accord a été récemment signé avec l'Agence spatiale nationale sur la base d’une démarche scientifique. «Nous avons déjà dénombré des sites historiques qui seront restaurés et préservés, tels que les centres de détention et de torture», a-t-il déclaré.
Le ministre a par ailleurs passé en vue les réalisations du secteur, à travers la publication de 1.500 livres d’histoire, notamment des ouvrages en braille.
À cela s’ajoute la réalisation d'œuvres audiovisuelles par des start-up, la plateforme numérique «Algérie Majd», les projets de films historiques sur les symboles de la Révolution, Si El-Haoues, Zighoud Youcef, Larbi Ben M'hidi, des chants patriotiques, des ouvrages documentaires destinés aux enfants…
Un forum national sur la terminologie historique
Le ministre a indiqué que le secteur a créé un studio, pour enregistrer les témoignages des moudjahidine accessibles aux spécialistes.
L’action porte aussi sur la récupération des archives algériennes détenues par des pays amis.
En ce qui concerne les textes juridiques relatifs à la définition des fêtes nationales, le ministre a indiqué qu'ils sont soumis à révision chaque fois que nécessaire. Pour ce qui est des ateliers de contrôle de la terminologie historique, le ministre a souligné que le sujet est très important, car lié à l'écriture de l'histoire. Le ministère, à travers son Centre d'études, a préparé des programmes et un guide méthodologique pour l'étudiant et le professeur.
Dans ce contexte, la terminologie a décliné de nombreux écrits coloniaux sur notre histoire, dans le but de porter préjudice à de nombreux problèmes fondamentaux et à la déformation de certains faits.
Dans le cadre de la refondation de notre histoire, deux journées d'étude se tiendront dans les prochains jours, pour relancer l'écriture de l'histoire, selon des concepts scientifiquement et académiquement approuvés.
Concernant la fondation d’une école historique algérienne, Rebiga a déclaré que c'est un projet que le ministère s'efforce de faire aboutir.
Kafia Ait Allouache et M. Bouraib
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Ils ont dit :
Abdelmadjid Zaâlani, président du conseil national des droits de l’homme : «La mémoire algérienne est particulière»
«La mémoire algérienne est particulière , elle vit en nous aujourd’hui, elle est pleine de principes et de valeurs. J’ai déjà pris attache avec les personnes désignées par le président de la République, pour travailler ensemble sur la mémoire et les droits de l’homme. La Déclaration du 1er Novembre 1954 renferme des principes fondamentaux qui vivent toujours avec nous.
La doctrine des révolutionnaires algériens durant la lutte de Libération porte sur l’unité nationale et l’intangibilité de nos frontières.»
Salah Laouir, membre du conseil de la nation : «La mémoire, c’est notre identité»
«La préservation de la mémoire est un moyen essentiel pour garder notre identité. Les films doivent être d’un niveau élevé, pour préserver cette mémoire, lui donner une place méritée. Nous ne voulons pas la médiocrité, car le peuple algérien est assez cultivé et il a le droit de demander la qualité. J’insiste également sur la compétence.»
Meziane Saïdi : «Abdelmadjid Tebboune accorde beaucoup d’importance à la préservation de la mémoire»
«La célébration du 60e anniversaire de l’indépendance nationale est exceptionnelle, du fait qu’elle se déroule toute l’année, sur décision du président de la République. Pour cela, une série d’activités ont été confiées au ministère des Moudjahidine, notamment l’édition de plus de 1.000 livres. Par ailleurs, l’installation d’une équipe de recherche au niveau du Centre national d’étude sur le mouvement national et la guerre de Libération permettra de confectionner des écrits consacrés à la résistance au XIXe siècle, à l’histoire du mouvement national et à la guerre de Libération.»
Mahrez Lamari, militant des droits de l’homme : «Notre histoire est un motif de fierté»
«Notre histoire est un motif de fierté et nul ne peut l’occulter. Nous devons la préserver et l’entretenir. La mémoire constitue un patrimoine séculaire, nous nous y inscrivons avec honneur et dignité.»