
La création du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) est qualifiée, à juste titre d’ailleurs, par nombre d’historiens, de marqueur de l’histoire de la glorieuse Révolution nationale et d’acte fondateur de la naissance de la République algérienne. Auteur de plus d'une dizaine d'ouvrages, Amar Belkhodja, passionné de la recherche historique, revient, dans cet entretien, sur le contexte de création du GPRA et sur quelques faits marquants de l'époque précédant l'indépendance nationale.
Propos recueillis par Soraya Guemmouri
El Moudjahid : Pourriez-vous rappeler le contexte de création du GPRA ?
Amar Belkhodja : Il est en effet utile de rappeler dans quelles circonstances a été proclamée la création du GPRA et pour cela, revenir sur un certain nombre de dates à retenir. En avril 1958, la communauté européenne d’Algérie se réunit au forum d’Alger, une rencontre ayant regroupé 30.000 participants. Cette communauté que l’on appelait les «pieds noirs» avait affirmé que l’Algérie ne pouvait être que française et incité l’armée, sous le commandement du général Massu, à créer des comités de salut publics. Mais au mois de mai, cette même armée - après la mise en place d’un comité de salut public - ramène le général Charles De Gaulle au pouvoir, après l’échec de plusieurs gouvernements. Le général De Gaulle opte pour la solution militaire pour mater ce que l’on appelait alors ‘‘la rébellion’’, c'est-à-dire l’ALN. En août 1958, la direction du FLN décide de lancer des opérations de sabotage au sein même du territoire français. Après cela, et plus précisément le 19 septembre 1958, la proclamation du GPRA fut diffusée à partir du Caire.
Dès lors, le comité de Coordination et d’exécution issu du Congrès de la Soummam du 20 août 1956 est remplacé par le GPRA.
Qu’en est-il de la reconnaissance internationale du Gouvernement provisoire de la République algérienne ?
Le GPRA est reconnu par plusieurs pays arabes, asiatiques et européens adhérant au principe de l’autodétermination et à l’exigence d’un peuple qui mène un combat pour le recouvrement de sa souveraineté nationale. Il a été reconnu, notamment et pas seulement, par des pays comme la Chine, la Yougoslavie, l’Irak, l’Egypte, la Syrie, la Libye, la Tunisie, le Maroc… Il y avait aussi les Etats afro-asiatiques qui avaient entrepris, chaque année, depuis 1955, de faire inscrire la question algérienne à l’ordre du jour de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Quel aura été l’apport du GPRA pour la réalisation du recouvrement de l’indépendance ?
Le GPRA ouvre un front diplomatique qui va mettre en échec tous les subterfuges et les ruses de la France coloniale, résolue à affaiblir le front armé pour imposer ses conditions quand il y a lieu de soumettre les Algériens aux pourparlers avec les représentants du GPRA.
En 1960, les manifestations de décembre 1960 feront dire à un officier français que ‘‘le colonialisme se trouve opposé à un Diên Biên Phu diplomatique’’; grâce au talent et à la détermination des cadres dirigeants de la révolution issue du combat politique du GPRA qui suit pas à pas la lutte armée.
Ainsi, le gouvernement français, ne pouvant remporter une victoire armée, est contraint d’entamer des pourparlers avec les représentants d’un peuple en armes.
Qu’importe la durée de ce combat et le sacrifice que cela va exiger pour ouvrir l’étape finale des négociations qui aboutira aux Accords d’Evian et au cessez-le-feu à partir du 19 mars 1962.
S. G.