Ivan Nalitch, Chef de la mission économique de la Russie en Algérie, à El Moudjahid : «En Algérie, il y a des opportunités d’investissement dans tous les secteurs»

La coopération économique entre l’Algérie et la Russie est multiforme. De plus en plus d’hommes d’affaires et d’entreprises russes viennent en Algérie, qui pour participer à des événements économiques, qui pour prospecter des marchés, qui pour enclencher des projets d’investissement. M. Ivan Nalitch, chef de la mission économique de la fédération de Russie en Algérie, évoque, pour les lecteurs d’El Moudjahid, les perspectives de développement de la coopération bilatérale dans le domaine économique.

El Moudjahid : Une délégation russe a pris part au Salon médical international SIMEM à Oran. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre participation à cet événement ?

Ivan Nalitch : Il s’agit de la première participation russe d’une telle ampleur au Salon médical en Algérie. Une dizaine de fabricants russes d'équipements de diagnostic, de prothèses, de cosmétiques et de solutions informatiques pour l'industrie médicale ont présenté leurs produits. Nous avons organisé une table ronde, avec la participation des représentants du ministère de l’Industrie pharmaceutique, du ministère de la Santé, de l’Agence nationale des produits pharmaceutiques et d’entreprises algériennes, pendant laquelle différents sujets relatifs au secteur de la Santé ont été discutés.

Y a-t-il d’autres visites d’affaires prévues prochainement ?

Oui, bien sûr. Cette année sera riche en visites. De nombreux événements nous attendent pendant les semaines à venir : des entreprises russes du secteur des TIC prendront part au Salon ICT AfricaSummit ; une délégation de l'industrie pharmaceutique visitera l’Algérie, en marge du Salon Maghreb Pharma ; un forum d'affaires à grande échelle sera organisé le 22 avril par le Conseil d'affaires algéro-russe et la Chambre algérienne de commerce et d'industrie (CACI). Une trentaine d’entreprises russes de secteurs différents y participeront, comme la pharmacie, la chimie, le bois et ses dérivés, le carton, l’équipement énergétique, les TIC, etc. La Représentation commerciale de Russie en Algérie est largement impliquée dans la préparation de l’événement. Nous comptons sur la participation active des hommes d’affaires algériens à cet événement, qui permettra de discuter de différentes options de coopération et de partenariat. En outre, plusieurs événements internationaux se tiendront en Russie, cette année, où nous espérons accueillir des délégations algériennes. Parmi ces événements, le Forum économique international «Russie – monde islamique : Kazan Forum», dans le cadre duquel est prévue l’exposition Halal Expo ; deux forums dédiés à l'utilisation des TIC dans l’industrie, à savoir Digitalization of IndustrialRussia (CIPR) et Global Digital Forum, prévus début juin, pourraient intéresser des organismes et entreprises algériens. Le Forum économique international de Saint-Pétersbourg est le plus grand événement de Russie. Début juillet, aura lieu le Salon industriel international INNOPROM, où les entreprises industrielles publiques et privées algériennes pourront rencontrer des fournisseurs ou des partenaires, pour la mise en œuvre de projets d'investissement.

À votre avis, d’où vient l’intérêt croissant des entreprises russes pour l’Algérie ?

Nos pays entretiennent des relations de partenariat stratégique de longue date et nous ressentons l’attitude chaleureuse des Algériens envers notre pays. De nombreuses entreprises russes considèrent l’Algérie comme l’une de leurs cibles prioritaires, en tant que marché en croissance, ce qui s’inscrit dans la volonté générale de la Russie d’intensifier ses relations avec le continent africain. Comme vous le savez, en 2019 et 2023, deux éditions du Sommet et du Forum économique et humanitaire «Russie – Afrique» se sont déroulés avec grand succès, ce qui a donné une grande impulsion au développement des relations de la Russie avec de nombreux pays, en particulier avec l'Algérie.

Quels secteurs d’activité intéressent en priorité les entreprises russes en Algérie ?

Il y en a beaucoup. Il existe des industries stratégiques, telles que le pétrole, le gaz et l’énergie, en général, ainsi que l’industrie minière, y compris l’exploration géologique, la fourniture de services et d’équipements ou de pièces détachées. L’approvisionnement en céréales est important, pour assurer la sécurité alimentaire d’Algérie – la Russie représente actuellement environ 30% des importations algériennes. Nous allons travailler pour l’augmentation de la livraison de différents produits russes pour l’Algérie, à savoir le blé et l’orge, ainsi que le lait en poudre, des engrais, des produits agrochimiques, etc. Un secteur en pleine croissance est celui des produits pharmaceutiques, principalement les médicaments oncologiques et l’insuline, ainsi que les équipements et instruments médicaux. D’autres domaines de coopération prometteurs comprennent la fourniture de produits chimiques, de certains types de machines et d’équipements et de produits métalliques. En outre, le secteur des TIC, assez développé en Russie, pourrait devenir un des secteurs importants de la coopération bilatérale – pas mal d’entreprises russes s’intéressent au marché algérien et veulent l’aborder.

En fin janvier, a eu lieu la 12e session de la Commission intergouvernementale mixte algéro-russe de la coopération économique, commerciale, scientifique et technique. Comment évaluez-vous le rôle de cet instrument dans le développement des relations algéro-russes ?

Certes, la Commission mixte est un instrument important pour le développement des relations bilatérales. Il s'agit d'un événement au cours duquel des représentants des institutions des deux pays discutent de divers aspects de la coopération dans les domaines de l'industrie, de l'agriculture, de l'énergie, de l'éducation, des transports et d'autres secteurs. Traditionnellement, l’événement est programmé pour coïncider avec la signature de documents bilatéraux. Cette année, plus de 10 documents ont été signés dans divers domaines, dont le protocole d’accord entre l'Agence fédérale pour la réglementation technique et de métrologie (Rosstandart) et l’Institut algérien de normalisation (IANOR).

Comment évaluez-vous le marché algérien ?

Le marché algérien constitue un axe intéressant pour les exportateurs russes, notamment dans le contexte du virage croissant de la Russie vers les marchés des pays africains et du Moyen-Orient. L’Algérie est l’un des marchés les plus vastes et les plus stables d’Afrique du Nord, avec une riche base de ressources (principalement du pétrole et du gaz), ainsi qu’une forte demande de biens et de technologies importés. Nous voyons des opportunités de coopération dans presque tous les secteurs de l’économie algérienne, notamment l’agriculture, les biens de consommation, les énergies traditionnelles et renouvelables, la santé, les mines, les produits pharmaceutiques, les TIC, les transports et les infrastructures.

Récemment, la question de la numérisation est devenue pertinente en Algérie. Quel rôle, selon vous, la Russie peut-elle jouer dans ce contexte ? Existe-t-il une coopération bilatérale dans ce domaine ?

Le domaine des TIC en Russie affiche une croissance stable même dans les conditions actuelles, tandis que les technologies russes sont bien connues dans le monde. La Russie est réputée non seulement pour ses solutions en matière de la cyber-sécurité, mais également pour ses technologies financières et télécommunications, et sa numérisation de tous les secteurs de l’économie, y compris de l’agriculture et de l’industrie. Ces technologies peuvent contribuer aux objectifs stratégiques de l’Algérie : transformation numérique de l’économie, augmentation de la production locale et optimisation des dépenses du pays. En marge de la 12e session de la Commission intergouvernementale mixte, en janvier 2025, des accords ont été conclus sur le développement du potentiel de coopération algéro-russe dans le domaine des TIC. De notre part, nous constatons un intérêt actif des entreprises russes pour le marché algérien. Un nouveau poste a été créé récemment au niveau de notre Représentation, celui d’une personne chargée de la coopération dans le domaine des TIC. Dans le cadre de ses activités, divers événements sont organisés, tels que des ateliers, des webinaires, des missions d'affaires d'entreprises russes en Algérie, ainsi que des transferts de compétences et des négociations à différents niveaux.

Selon vous, qu’est-ce qui est nécessaire pour développer davantage les relations bilatérales ?

Pour le développement dynamique et durable des relations économiques entre la Russie et l’Algérie, il est nécessaire de se concentrer sur l’élimination des barrières structurelles, augmenter le niveau de confiance mutuelle entre les opérateurs économiques et approfondir la coopération institutionnelle. Il est important non seulement d’augmenter le chiffre d’affaires commercial, mais également de construire une base solide pour les investissements à long terme et la coopération industrielle. Les points qui pourraient contribuer au renforcement des liens économiques bilatéraux sont la mise en place des mécanismes de financement et d’assurance des opérations d’investissement-exportation ; le soutien à la localisation et aux coproductions ; le développement des voies logistiques et de transport, ainsi que l’accompagnement des échanges commerciaux et du dialogue B2B, et la coopération humanitaire et éducative élargie.

F. A.

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