
L’impératif urgent de faire échec à la propagande coloniale française, la défense des objectifs suprêmes de notre lutte de Libération, à l’échelle internationale, auront été les motifs les plus significatifs et les plus saillants du recours à une action diplomatique de large envergure, intransigeante, tenace, persévérante et particulièrement active et efficace, compte tenu du contexte, des enjeux et des défis à relever.
Rehaussé par la présence de la première secrétaire de l’ambassade indonésienne et du représentant de l’ambassade de Palestine à Alger, les divers intervenants, hier lors du Forum d’El Moudjahid, organisé en collaboration avec l’association Machaâl Echahid, ont été unanimes pour souligner, avec force, l’incontestable apport de nos diplomates mobilisés sur un front de lutte vital pour la victoire de notre Révolution. L’historien Ameur R’khila a, notamment, souligné que cette diplomatie n’était pas constituée de diplomates chevronnés, issus des grandes écoles, mais par des militants animés d’un patriotisme à toute épreuve. Il fallait opposer une riposte énergique, convaincante et dûment argumentée contre le colportage de dirigeants français qui voulaient disqualifier la lutte du peuple algérien, démanteler les thèses fallacieuses d’une nation algérienne et d’un pays qui n’ont jamais existé. Ce travail fut mené avec un sens élevé du patriotisme par les défunts Hocine Aït Ahmed et M’Hamed Yazid, et d’autres diplomates à qui un hommage plein de reconnaissance leur a été rendu par l’assistance. Lors de la célèbre Conférence de Bandung en Indonésie, tenue le 17 avril 1955, la délégation algérienne a su agir avec perspicacité, faisant accréditer le FLN, comme seul et unique représentant du peuple algérien. Notre invité dit que ce large rassemblement, composé de 29 États et d’environ 600 délégués, aura constitué l’acte fondateur de la diplomatie d’une nation en armes, la voix de l’Algérie combattante a pu retentir à la face du monde, ce qui lui a valu un large soutien international à notre lutte. Ameur R’khila note que de 1955 à 1960, la question algérienne était omniprésente dans les travaux de l’Assemblée générale des Nations unies. Il souligne, aussi, que les manifestations du 11 décembre 1960 sont considérées comme un événement historique par la force de la cohésion populaire des Algériens sortis à Alger et dans d’autres villes algériennes, affirmant leur rejet catégorique des plans du général de Gaulle. Le peuple algérien a magistralement prouvé que la Révolution algérienne est le propre d'un peuple qui refuse toutes sortes de compromis. Sur le plan international, ces manifestations réprimées férocement ont réaffirmé un soutien absolu et indéfectible au Front de Libération Nationale, et l'ONU a inscrit la question algérienne dans ses différents ordres du jour. En conclusion, on ne peut que rappeler le propos de Réda Malek, ancien diplomate et directeur d’El Moudjahid de 1957 à 1962 : «Le FLN a expérimenté avec intensité, le dicton ; seule la vérité est révolutionnaire ; point n’est besoin de masquer la réalité ; elle est avec nous.»
M. B.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Une diplomatie plus connectée aux enjeux actuels
«L'activité diplomatique pendant la révolution de Libération a eu un rôle important et majeur dans la réalisation de l'internationalisation de la cause algérienne, l'élimination du mythe de "l'Algérie française" et la restauration de la souveraineté nationale.»C’est ce qu’ont déclaré a l’unanimité les invités du Forum de la mémoire, hier consacré a la diplomatie algérienne entre hier et aujourd’hui. Hier, notre Révolution a nécessité de mener, en plus de la guerre armée,,la lutte à l'extérieur du pays et la diplomatie a fait en sorte que les souffrances des Algériens et leurs aspirations soient portées devant les instances internationales, pour contrer la diplomatie du colonisateur au sein de ces mêmes instances. La conférence internationale de Bandung (1955) a constitué, à cet égard, un tournant pour la diplomatie algérienne ; elle a été couronnée par une déclaration historique qui a consacré le droit du peuple algérien et des autres peuples colonisés à disposer d'eux-mêmes. Six mois après le déclenchement de la Révolution, l’Algérie s’invite dans le concert des nations. Une poignée de diplomates du Front de libération nationale (FLN) participent, en avril 1955, à la première conférence afro-asiatique, à Bandung (Indonésie). Dès lors, la question algérienne s’internationalise et le talent des Mustapha Ferroukhi, Ahmed Francis, M’hamed Yazid ou Rédha Malek fait le reste. Depuis, la diplomatie algérienne a réussi à inscrire à l’actif et au palmarès de l’Algérie de «nombreuses réalisations» en matière, notamment, de lutte en faveur du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, du règlement des conflits par les voies pacifiques, le dialogue et la négociation, de la promotion des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de l’avènement d’un ordre économique international et de rapports de coopération plus justes et plus équitables. Aujourd’hui, alors que le monde connaît de profonds bouleversements géopolitiques, l’Algérie se redéfinit peu à peu sur la scène internationale. Si les fondements historiques de sa diplomatie demeurent souveraineté, non-ingérence et soutien aux causes justes, une nouvelle génération de diplomates algériens insuffle un souffle neuf, alliant professionnalisme, pragmatisme et ouverture. Une nouvelle dynamique est à l’œuvre. Le pays opère une reconquête diplomatique à la fois fidèle à ses principes fondateurs et tournée vers l’avenir, répondant aux exigences d’un monde devenu plus complexe, plus instable, mais aussi riche en opportunités. Ce renouveau de la diplomatie algérienne ne se résume pas à un simple changement de discours. Il s’agit d’une réinvention stratégique, qui vise à rendre l’Algérie plus influente, plus agile et mieux ancrée dans les équilibres régionaux et globaux, et cela ne va pas sans défis. Les jeunes diplomates doivent négocier avec aussi la complexité des jeux d’influence géopolitiques. Pourtant, leur engagement, leur mobilité et leur adaptabilité laissent entrevoir une nouvelle diplomatie algérienne plus proactive, plus visible et plus stratège.
F. L.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Ils ont dit :
Sjifa Amori, Première secrétaire de l’ambassade d’Indonésie : «L’Indonésie et l’Algérie : Une relation solide depuis Bandung»
Sjifa Amori, première secrétaire de l’ambassade d'Indonésie, a souligné que la conférence de Bandung marque le début des relations entre l'Indonésie et l'Algérie. Elle a jeté les bases d’une relation excellente qui perdure encore aujourd'hui. Elle a mentionné une invitation faite par l'Indonésie de convier les représentants du Front de libération nationale à y participer. «L'Indonésie a subi de fortes pressions de plusieurs pays, pour annuler cette invitation, mais son engagement à soutenir l'Algérie a permis de résister à ces pressions», a-t-elle déclaré. L'Indonésie, aux côtés d'autres nations, a réussi à organiser cette conférence qui a été déterminante pour l'indépendance des pays d'Asie et d'Afrique. Elle a également souligné que cette conférence a joué un rôle essentiel dans la résolution de nombreuses questions internationales. En effet, à l'époque, le règlement des problèmes mondiaux n'était pas seulement l'apanage des pays occidentaux, mais a aussi permis de renforcer la lutte pour l'indépendance des nations colonisées, qui représentaient alors les trois quarts de la population mondiale. «Grâce à cette conférence, le visage du monde a changé, avec une contribution significative des pays du Sud dans la résolution des questions de souveraineté et d'indépendance. L'Algérie, en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, a joué un rôle de premier plan dans la défense des causes des pays du Sud, notamment la question palestinienne. L'Indonésie, pour sa part, a également porté cette cause dans les forums de l'ONU», a-t-elle ajouté. Concernant les relations bilatérales entre l'Indonésie et l'Algérie, elle a précisé qu’elles ont été renforcées et approfondies, à travers les échanges bilatéraux, la coopération régionale, ainsi que dans le cadre du Mouvement des non-alignés. Afin de consolider ces relations, le ministre indonésien des Affaires étrangères s'est rendu en Algérie en décembre 2023, dans le but de promouvoir et d’intensifier la coopération dans les forums internationaux, tout en poursuivant leur lutte commune contre le colonialisme à travers le monde.
Aïssa Kasmi, historien : «la vérité à triomphé sur la propagande»
Aïssa Kasmi, historien, a souligné que «la diplomatie algérienne de l'époque, incarnée par les délégués du FLN, s'est ainsi distinguée par sa sincérité et sa clarté. Contrairement aux Français qui soutenaient que "l'Algérie était française", en recourant à des mensonges, l'Algérie a défendu la vérité. Cette diplomatie révolutionnaire a été menée d’une main de maître par de jeunes Algériens, pour la plupart âgés de moins de 30 ans, dans les conférences, les colloques et à l'ONU. Parmi eux, des noms d’autres diplomates restent gravés dans la mémoire de la diplomatie algérienne».
Propos recueillis par : Radja Benhameurlaine
Zoulikha Ferroukhi, la fille du martyr Mustapha Ferroukhi : «Mon père a tout donné »
Zoulikha Ferroukhi, fille du martyr Mustapha Ferroukhi, a souligné l'importance de la diplomatie algérienne durant la guerre de Libération, rappelant que la diplomatie a joué un rôle crucial dans le parcours pour l'indépendance. «Je considère les diplomates comme des chouhada de la plume», dit-elle, mettant en lumière les qualités de son père qui a brillé sur la scène internationale. Car il a mis tout son savoir-faire pour que l'Algérie soit indépendante. Mustapha Ferroukhi était l'un des premiers ambassadeurs du GPRA, dont le premier pays qui a reconnu l'Algérie indépendante est la Chine, où il n'a pas eu le privilège de terminer sa noble mission, parce qu'il était mort dans un accident d'avion avec sa petite famille. Mustapha Ferroukhi était également un député de l'Assemblée algérienne en 1948-1954 ; ils étaient 120 Français, dont 13 Algériens à l'époque. «En 1953, mon père était présent, lors de la cérémonie de la mort de Staline, où il a présenté ses condoléances. Et il était l'accompagnateur de l'équipe nationale du FLN quand ils étaient en tournée en Asie», a-t-elle ajouté.
Propos recueillis par : Zine Eddine Gharbi