Diego Mellado Pascua , ambassadeur de l’Union Européenne en Algérie : «Nos liens commerciaux sont solides»

En exigeant la révision de l’Accord d’association «dans un esprit amical sans entrer en conflit», le président Abdelmadjid Tebboune tenait, en fait, à faire comprendre au partenaire européen, une réalité : l’Algérie de 2025 n’est pas celle de 2005.

L’Union européenne multiplie les signes de rapprochement avec Alger. Son ambassadeur en Algérie, Diego Mellado Pascua, a saisi l’opportunité d’une rencontre organisée jeudi dernier, par l’Organisation algérienne du commerce et de l’investissement social (OACIS), pour appeler à exploiter pleinement les ressources et les potentialités offertes tant par l’Algérie que par l’Union européenne, en vue de renforcer les relations commerciales bilatérales. L’événement, qui a réuni des hommes d’affaires algériens et espagnols ainsi que des représentants de l’Autorité portuaire de Barcelone, a été qualifié par le diplomate européen comme «un témoignage de la solidité des liens commerciaux entre l’Algérie et l’Europe». Il a également souligné l’importance du cadre juridique qui structure ces relations, en particulier l’Accord d’association, tout en évoquant les efforts en cours pour établir une charte méditerranéenne. Pour lui, «la conjoncture actuelle offre des conditions favorables pour approfondir ces relations». Ce n’est pas la première fois que Diego Mellado s’exprime en ce sens. En février dernier, il avait déjà souligné que l'année 2025 serait «une occasion fondamentale et très importante» pour consolider, approfondir et revisiter les relations entre l’Algérie et l’UE. Tout en soutenant que l'Algérie «est un partenaire stratégique» de l'Europe, avec laquelle elle entretient une «relation forte, basée sur un partenariat solide, qui sera renforcée davantage au cours de l'année 2025», l’ambassadeur avait fait part de la nécessité de revisiter les relations bilatérales dans leur «globalité», dans le cadre «d'une nouvelle coopération fondée sur le principe gagnant-gagnant, en adéquation avec les défis actuels et les priorités stratégiques des deux parties». À travers ces déclarations, l’Union européenne s’était alignée sur la position exprimée par l’Algérie concernant la nécessité de revoir l’Accord d’association. Cette révision avait été évoquée pour la première fois par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors du Conseil des ministres du 31 octobre 2021, où il avait demandé une révision «clause par clause» de l’accord, selon une approche «souveraine» fondée sur le principe du gagnant-gagnant, afin de corriger les déséquilibres structurels hérités de sa mise en œuvre. Le chef de l’État a d’ailleurs réitéré cette volonté lors d’une entrevue avec la presse diffusée le 5 octobre 2024, annonçant officiellement que la révision de l’accord débuterait en 2025. Il avait alors précisé que ce processus, désormais «nécessaire», sera mené «avec souplesse et dans un esprit amical sans entrer en conflit». Fidèle à ses engagements, le Président Abdelmadjid Tebboune a présidé, le 14 janvier dernier, une réunion consacrée au suivi de l’avancement des préparatifs en vue de cette révision de l’Accord d’association avec l’Union européenne. A la fin du mois de janvier, une délégation de l’Union européenne, conduite par Florian Ermacora, chef d’unité pour l’Afrique du Nord au sein du département de la Commission européenne, chargé des relations avec le voisinage de l’UE, a effectué une visite de travail en Algérie. L’occasion de poser les bases d’une approche concertée en vue de la révision de l’Accord et de mener des consultations pour définir les priorités de la coopération pour la période 2025-2027. M. Ermacora avait affirmé d’ailleurs l’engagement de l’UE à renforcer le partenariat entre les deux parties dans le cadre du développement d’un «nouveau pacte pour la Méditerranée». Il s’agit du nouveau cadre de coopération que l’UE va proposer dans les prochains mois à l’Algérie pour remplacer l’Accord d’association. Un cadre qui corrigera le déséquilibre flagrant en défaveur de l’Algérie causé par l’Accord d’association pendant une vingtaine d’années : les exportations algériennes vers l’UE, principalement constituées de pétrole et de gaz, n’ont pas pu compenser les importations massives en provenance d’Europe. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : entre 2005 et 2015, les exportations algériennes hors hydrocarbures n’ont pas dépassé les 14 milliards de dollars, tandis que les importations en provenance de l’UE ont atteint 220 milliards de dollars. Ce déséquilibre a aussi eu un impact sur les recettes fiscales de l’Algérie, qui a perdu plus de 700 milliards de dinars en droits de douane durant la même période. En exigeant la révision de l’Accord d’association «dans un esprit amical sans entrer en conflit», le Président Tebboune tenait, en fait, à faire comprendre au partenaire européen, une réalité : l’Algérie de 2025 n’est pas celle de 2005. L’Union européenne l’a bien compris d’ailleurs. Dans une déclaration faite à El Moudjahid, M. Mellado Pascua avait laissé échapper un aveu : «Les choses ont évolué dans le monde et nous devons tous nous y adapter.» Ainsi, l’Algérie a fait entendre sa voix auprès de l’Union européenne et a obtenu gain de cause.

H. Y.

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