Forum de la mémoire d’El Moudjahid : hommage à «l’ami des peuples», Fidel Castro

Ph.:T-Rouabah
Ph.:T-Rouabah

Le Forum de la mémoire d’El Moudjahid était, hier, d’une portée singulière. Dédiée à la mémoire de Fidel Castro, cette rencontre n’était pas seulement une commémoration, mais un acte politique et mémoriel, tissant les fils d’une fraternité et «une fidélité» historiques entre l’Algérie et Cuba, et réaffirmant la pertinence des idéaux de justice et de souveraineté.

Neuf ans après la disparition du commandant Fidel Castro Ruz, sa pensée et son action continuent d’imprégner les relations internationales, notamment les liens fraternels unissant Cuba et l’Algérie. Dès 1961, alors que l’Algérie se bat pour son indépendance, Fidel Castro, au pouvoir depuis peu à La Havane, reconnaît la lutte et le sacrifice du peuple algérien. Ce fut l'un des premiers pays au monde à le faire, un geste fort qui ne sera pas oublié. Mais l’acte le plus marquant reste l’aide précieuse dont il a fait preuve en 1963, pour soutenir la jeune Algérie indépendante. Ce soutien offert sans contrepartie a scellé une alliance fraternelle entre les deux nations non alignées. Pour l’Algérie, comme pour Cuba de Castro, il s’agissait d’incarner la solidarité anticolonialiste et anti-impérialiste. L’héritage de Castro, tel que présenté par les intervenants au Forum, dépasse la figure du leader révolutionnaire cubain, pour incarner un internationalisme militant. La tribune était composée d’une mosaïque de personnalités reflétant la diversité des liens unissant les deux pays.

L'ambassadeur de Cuba en Algérie, Hector Igarza Cabrera, dont la présence a souligné la continuité des relations bilatérales, a rendu un hommage appuyé à cette «figure qui a transcendé son époque», dont la vision internationaliste a «profondément influencé la politique étrangère cubaine». Dans un discours à la fois historique et engagé, le diplomate a retracé les fondements d’une alliance «exemplaire depuis 1962, fondée sur la solidarité, la loyauté et le respect mutuel». Il a souligné la posture anti-impérialiste constante de Cuba et la légitimité anticolonialiste de l’Algérie, présentées comme les deux faces d’une même médaille, dans le combat pour l’émancipation des peuples. Le diplomate cubain a rappelé que Fidel Castro considérait la Révolution algérienne comme «l’un des actes les plus héroïques du XXe siècle». Avant même l’indépendance, Cuba soutenait ouvertement le Front de Libération Nationale (FLN), convaincu que cette lutte s’inscrivait «dans le mouvement mondial de décolonisation».

Un soutien qui s’est concrétisé par un geste diplomatique fort, «Cuba fut le premier pays à reconnaître officiellement le nouvel État algérien», un acte que Fidel Castro «considérait comme une obligation morale», dictée par l’histoire cubaine de résistance. Au-delà des mots, l’alliance s’est construite dans l’épreuve. Dès 1963, alors que Cuba traversait elle-même des difficultés économiques, La Havane a dépêché sa première mission médicale en Algérie. «Dans un contexte de tensions frontalières, Cuba a également été aux côtés de l’Algérie», a rappelé l’ambassadeur, démontrant ainsi que la solidarité entre les deux nations dépassait le cadre diplomatique, pour se muer en un «lien fraternel». Cette coopération s’est perpétuée, donnant lieu à «des milliers d’étudiants algériens formés à Cuba, et des centaines de professionnels cubains, notamment des médecins, ayant exercé dans différentes régions d’Algérie».

Une relation que le diplomate a qualifié de «stable, respectueuse et dénuée de tout intérêt matériel», en faisant un modèle de «coopération entre pays du Sud». L’ambassadeur a insisté sur la centralité de l’Afrique dans la pensée de Fidel Castro, pour qui le continent était au cœur de «la lutte mondiale contre le colonialisme». Castro était «convaincu que Cuba avait une dette historique envers le continent». Citant une phrase devenue emblématique du leader cubain, «le sang cubain n’est pas plus précieux que le sang africain», l’ambassadeur a rappelé que l’internationalisme de Fidel Castro était un impératif moral. Cet esprit se retrouve, aujourd’hui, dans les positions communes de l'Algérie et de Cuba sur des questions fondamentales, telles que «l'autodétermination des peuples, le soutien inconditionnel à la cause du peuple sahraoui, la cause palestinienne, le rejet des mesures coercitives unilatérales et la lutte pour un ordre international plus équitable». «Se souvenir de Castro, aujourd'hui, n'est pas un simple acte de commémoration, mais aussi une réaffirmation de principes», a-t-il déclaré. Face à un monde marqué par la résurgence des inégalités et de nouvelles formes de domination, la pensée de Fidel Castro, articulée autour de la «justice sociale, la solidarité et la défense des intérêts des pays du Sud», reste plus que jamais d’actualité. L’amitié algéro-cubaine, «semée par Fidel et renforcée par six décennies de coopération sincère», en est le témoignage vivant.

La salle, comble, était principalement constituée de diplomates, de militants de la cause anti-impérialiste, de moudjahidine et de membres de la diaspora latino-américaine. Intervenant, à cette occasion, l’ambassadeur du Venezuela en Algérie, Imad Saab, a mis l’accent sur le leadership de Castro et son engagement indéfectible en faveur de l’indépendance des peuples et le triomphe des libertés. Il a souligné que le personnage de Fidel Castro est «très admiré» au Venezuela, où il est considéré comme un symbole de la libéré et de la justice. «La personnalité universelle de Castro demeure une source d’inspiration pour nombre de Vénézuéliens qui continuent à s’identifier à lui», a-t-il affirmé.

Le diplomate vénézuélien est revenu, aussi, sur l’amitié qui lie Castro et le défunt Président vénézuélien, Hugo Chavez, affirmant que les deux hommes partageaient les mêmes visions et convictions. À noter qu’un film documentaire retraçant la vie et le parcours de Fidel Castro a été diffusé, à cette occasion, permettant à l’assistance de vivre ou de revivre des moments forts de ses discours et positions historiques.

«Cuba fut le premier pays à reconnaître officiellement le nouvel État algérien», un acte que Fidel Castro «considérait comme une obligation morale», dictée par l’histoire cubaine de résistance.

T. K.

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Fidel Castro à Alger en 1972 : la Une qui valait toutes les déclarations

Le président-directeur général d'El Moudjahid, Brahim Takheroubte, a offert à l'ambassadeur de Cuba, Hector Igarza Cabrera, un cadre chargé de nostalgie : la une d'El Moudjahid où figure une photographie emblématique de Fidel Castro, lors de sa visite à Alger dans les années 1970. Ce moment incarne un souvenir fort d'une époque où les idéaux de la gauche révolutionnaire inspiraient la lutte pour l'émancipation, symbolisant une fraternité entre les révolutions algérienne et cubaine. La une du journal rappelle la rencontre de deux leaders emblématiques porteurs d’une même vision anti-impérialiste et de solidarité internationale, un temps où la révolution et la justice sociale étaient au cœur de l'engagement politique.

T. K.

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Ils ont dit :

Mustapha Lahbiri, ancien DG de la protection civile : «Castro était toujours fidèle à l'Algérie

Mustapha Lahbiri, colonel et ancien directeur général de la Protection civile, a affirmé : «Malgré toutes ses difficultés avec les États-Unis, Fidel Castro est resté toujours fidèle à l'Algérie. Il faut dire que Cuba a gardé toujours ses relations fortes avec l'Algérie. Cela témoigne de l'attachement des deux pays, notamment dans le soutien indéfectible pour notre guerre de Libération. Car, en 1962, Cuba a envoyé un groupe de médecins, pour donner une aide humanitaire pour le peuple algérien à l'époque.»

T. K.

Mohamed Twil, député : «Il a soutenu l'Algérie dans des moments difficiles»

«Fidel Castro n'était pas seulement une personnalité historique et politique, mais il a amené son pays à se libérer de la dictature. De plus, cet homme avait une relation solide avec les Algériens, où il a soutenu la guerre de Libération. Cuba avait été toujours parmi les premiers pays qui ont envoyé des aides humanitaires et même médicales avant et après l'indépendance. Il faut mentionner que depuis 1962 jusqu'à le début des années 1980, l'Algérie a connu la visite de plus de 2.000 médecins qui ont voulu aider le secteur sanitaire en Algérie à l'époque. Ces relations historiques sont axées sur le respect mutuel depuis des années. L'État a la ferme volonté de développer plus ces relations, à travers les échanges scientifiques et pédagogiques entre les deux pays dans divers domaines.»

Ammar Mecheri, Moudjahid : «L'Algérie n'oubliera jamais les sacrifices de l’homme»  

«Fidel Castro est le seul président au monde qui a pu résister aux menaces américaines. Cet homme avait été victime de plus de 600 tentatives de meurtre, mais la vigilance de Castro était au-dessus de tout. Cela témoigne que ce brave homme était un symbole des mouvements nationalistes du monde entier. Fidel Castro a été toujours aux côtés des nations qui se battent pour leur libération, à leur tête l'Algérie. Un peuple qui a défendu sa terre avec bravoure, chose qui a attiré Castro, où il l’a soutenu, malgré des moments très délicats pour lui et son pays. Pour cela, l'Algérie n'oubliera jamais ses amis, notamment ceux qui lui ont prêté aide et assistance.»

Propos recueillis par : Zine Eddine Gharbi

 

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