La France devenue un sanctuaire des hors-la-loi et de non-droit : ces oligarques que Paris dorlote

Ils sont logés dans les quartiers les plus huppés de Paris, où ils découvrent une sécurité et une tranquillité de vie hors pair. Des truands en col blanc trouvent gîte et protection en terre française, grâce à leur proximité élyséenne. La France offre ainsi l’hospitalité à la majorité des oligarques algériens qui y ont placé plusieurs milliards d’euros volés au Trésor algérien. En d’autres temps, en d’autres circonstances, ce genre de situations devrait scandaliser. À présent, ce n’est pas le cas, et la France est devenue le nouveau sanctuaire et paradis des bandits de grand chemin, qui ont pillé, durant vingt ans, l’argent des citoyens algériens. Cette complaisance à l’égard des «prédateurs financiers en smoking» illustre, de manière éclatante, la contradiction entre les principes de lutte contre le blanchiment d’argent, proclamés par l’État français, et la réalité du terrain.

Certains de ces oligarques ne s’arrêtent pas à la rapine, mais financent, avec cet argent volé, des opérations de subversion visant l’Algérie, ses institutions et son peuple. Sans compter les dégâts collatéraux causés par ces mêmes prédateurs sans foi ni loi. Ils ont saigné de simples citoyens, brisé des destins et ruiné des familles, laissant derrière eux décombres et malheurs. La France a toujours refusé toute coopération judiciaire, rejetant systématiquement les requêtes de la justice algérienne concernant les biens mal acquis. Pourtant, les autorités algériennes n’ont cessé de revendiquer la restitution de cet argent.
Dès son arrivée à la tête de l’État, en décembre 2019, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, s’est engagé à récupérer l’argent volé par ces oligarques et qui a été transféré dans plusieurs pays étrangers, dont la France. Quelques mois plus tard, soit en 2020, la justice algérienne s’est saisie du dossier et a demandé une aide judiciaire à la France.

Des demandes qui sont curieusement restées lettre morte. Pour quelle raison ? Mystère et boule de gomme. Dans ses rencontres avec les médias nationaux, le Président Abdelmadjid Tebboune a noté les hésitations de la part de la justice française. Cette dernière refuse de coopérer avec l’Algérie dans le cadre des procédures judiciaires lancées contre d’anciens responsables et oligarques.

Les dossiers n’étaient-ils pas bien documentés ? Faux ! «On a fourni tous les documents nécessaires, alors que d’autres pays, notamment européens, ont favorablement répondu à nos sollicitations et coopéré dans ce dossier prioritaire pour nous», réplique une source judiciaire algérienne. Il n’y a qu’à voir, d’ailleurs, le traitement réservé à l’ancien ministre de l’Industrie, Abdeslam Bouchouareb.

Il mène une vie paisible en territoire français, où il aurait acquis plusieurs biens immobiliers, et ce malgré plusieurs condamnations en Algérie dans des affaires liées à la corruption. Il a été reconnu coupable dans plusieurs dossiers, portant, notamment, sur le transfert illégal de devises, l’obtention d’avantages indus et l’abus de fonction.
Les autorités judiciaires françaises ont systématiquement refusé son extradition, en dépit des demandes répétées d’Alger. Comme réponse à ces sollicitations, la France a, dans une démarche unilatérale défiant tous les usages diplomatiques, tendu une liste «d’Algériens expulsables», tous des sans papiers, mais pas n’importe lesquels.

On sait désormais que pour s’établir en France et régulariser sa situation, il faut s’acquitter de «la dime de l’opprobre». Elle consiste à rabaisser l’Algérie, à l’assombrir et à s’attaquer systématiquement à ses gouvernants et à ses institutions. À l’inverse, ceux qui s’entêtent à défendre leur patrie, à porter haut et fièrement l’Algérie deviennent de potentiels suspects. Ils sont alors stigmatisés, épinglés et placés dans un véritable engrenage de diktat moral. Dans cette mécanique de l’indignation sélective, la loyauté envers sa patrie est une faute impardonnable.
Mais on ne parle pas de corde dans la maison d’un pendu.

En effet, durant toute la crise qu’ont connue les relations entre les deux pays, ces deux dernières années, le dossier de l’argent des oligarques et de leur expulsion n’a jamais été évoqué. En avril dernier, dans un sursaut de lucidité, et pour «réchauffer ces relations», Jean-Noël Barrot, alors ministre français des Affaires étrangères, a soutenu que la France souhaite «reconstruire un partenariat d’égal à égal, serein et apaisé avec l’Algérie», et surtout «réactiver l’ensemble des mécanismes de coopération dans tous les secteurs». Jean-Noël Barrot souligne, à ce propos : «Nous avons beaucoup d’enjeux de coopération, notamment sur les commissions rogatoires dans le dossier sensible des biens mal acquis.»

Et voilà qui est dit : le chef de la diplomatie française a mis le doigt sur un dossier d’une extrême sensibilité, mais encore une fois sans suite. Jusqu’à quand la France continuera-t-elle à offrir gîte et confort à ceux que bien des Algériens considèrent comme des fugitifs de luxe ?

B. T.

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