
Par Rachid Lourdjane
Sans vouloir disculper les nombreux fous du volant, il faut bien admettre que l’hésitation à faire appliquer la loi est à l’origine de trop de drames et de douleur. La lente dérive au code de la route rappelle l’histoire de la grenouille dans l’eau chaude. Tant que la température du bassin monte lentement à partir du niveau biologiquement supportable, la sympathique bestiole ne voit pas venir la mort. Et quand elle s’en aperçoit, c’est trop tard. Ce cap létal qui ne fait pas réagir la bête est, pour nous, une sentence qui se chiffre à 4.500 morts et 35.000 blessés dans le calendrier annuel. Aussi, nous attendons les réactions appropriées. Le paradoxe de la grenouille, qui n’est pas qu’une blague, régit l’effritement d’un code qui va dans le sens d’un laxisme graduel avec un prix en vies humaines. Subissant les affres de l’oubli ou de la négligence, de très nombreuses infractions sont effacées par la coutume sous le regard compatissant de l’autorité publique acharnée sur le registre des retraits de permis de conduire pour excès de vitesse en autoroute, généralement. Ce n’est qu’à titre d’exemple qu’on oserait énumérer quelques-unes au hasard. Commençons par l’usage de l’indicateur lumineux du changement de direction. C’est quoi ça ? C’est juste le clignotant si simple d’utilisation. Le conducteur sait quelle est l’utilité de ce dispositif qui équipe tous les véhicules. Mais très peu lui donnent un sens. Et il devient un truc en plus. Imaginons que cette infraction soit réprimée au regard du JO. Le Trésor public encaisserait quotidiennement l’équivalent d’un gisement pétrolier pour le nombre de véhicules en circulation. Et je ne connais aucun automobiliste verbalisé un jour sur les routes algériennes pour non-usage du clignotant. En revanche, je connais deux conducteurs qui ont perdu leur bras, à cause de cette habitude de laisser traîner dehors ce membre jugé encombrant. C’est une infraction au code de la route. Mais…
La loi inscrit la prévention et la sécurité routières dans les établissements scolaires. Un luxe dont on peut se passer, au regard de la nullité des effets à l’école et de l’aggravation de charge du programme déjà très lourd. La loi prévoit aussi le port obligatoire de casque pour conducteur et passager. Encore une infraction oubliée aux lourdes conséquences sur les traumatismes crâniens avec des séquelles à vie. Récemment, un homme qui changeait la roue de son véhicule au bord d’une rocade vers Aïn Naâdja a été mortellement percuté par un automobiliste. Cette affaire a fait couler beaucoup d’encre dans les réseaux sociaux et la presse. C’est en vain que j’ai tenté de trouver une remarque sur l’absence du triangle obligatoire et le gilet fluorescent que tout automobiliste devrait avoir dans ses équipements en cas de panne pour être visible.
À quoi sert la bande d’arrêt d’urgence ? C’est encore un grave problème de la route en attente d’une attention plus ferme puisqu’il s’agit d’une contravention de quatrième degré. La BAU est souvent occupée comme un espace de commerce à la sauvette au risque de graves conséquences. La durée de vie d’un piéton sur cet espace est réduite à 30 minutes.
L’usage du téléphone au volant resurgit, on double à droite sans problème et on roule à cheval sur deux couloirs
La sécurité routière est indissociable de l’application de la loi. Plus on pardonne volontairement ou non les infractions, plus la marge des risques est mortelle. Théoriquement, il n’est pas possible de parvenir au niveau zéro accident sérieux à moins d’affecter un gendarme par véhicule. Aussi, toute la stratégie pour la réduction des stress routiers et des accidents devrait reposer sur une politique répressive rationnelle et dissuasive. À commencer par la numérisation des cartes grises, pour rendre effectif le paiement des amendes en conformité avec une administration moderne et l’implication des assurances dont le tarif égalitaire encourage les chauffards.
R. L.