
L’Algérie connaît, ces dernières semaines, une activité diplomatique particulièrement soutenue. Alger a successivement accueilli les ministres des Affaires étrangères d’Égypte, d’Iran, de Turquie, le ministre de la Défense de Mauritanie, et, précédemment, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Pour Bouhania Goui, professeur de sciences politiques et spécialiste en relations internationales, ces visites ne relèvent nullement du seul protocole. Elles traduisent, selon lui, la revalorisation stratégique du rôle de l’Algérie sur la scène régionale et internationale. Contacté par El Moudjahid, le politologue affirme qu’à partir de 2019, l’Algérie a engagé une nouvelle dynamique diplomatique. Il précise que le pays ne se contente plus de réagir passivement, mais prend désormais l’initiative, porte des projets et adopte des positions claires. Ce renouveau diplomatique est, selon l’expert, marqué par une volonté assumée d’être un acteur central, en particulier sur les questions de sécurité régionale, de médiation politique et de coopération économique. Ce retour, souligne-t-il, s’est accéléré, grâce à une diplomatie équilibrée, fondée sur le respect du droit international et des principes constants, tels que la non-ingérence, le soutien aux causes justes, notamment la Palestine et le Sahara occidental, et la recherche de solutions politiques aux crises. Cette constance confère à l’Algérie une crédibilité que peu de pays de la région peuvent revendiquer, estime-t-il. Le politologue affirme que l’Algérie bénéficie d’une position géostratégique de premier ordre : au carrefour de l’Afrique, de la Méditerranée et du monde arabe. Il estime que le pays a su exploiter cet atout, pour peser dans plusieurs enceintes. Présente au Conseil de sécurité de l’ONU, active au sein de l’Union africaine et de la Ligue arabe, l’Algérie participe à de nombreux forums internationaux, défend le multilatéralisme et œuvre activement pour la sécurité régionale, notamment dans le Sahel. Ce rôle, rappelle-t-il, n’est pas uniquement politique, mais aussi sécuritaire. Tout en menant une diplomatie de paix, l’Algérie reste, selon l’universitaire, très attachée à la préservation de sa souveraineté. Il souligne que le pays refuse l’installation de bases militaires étrangères sur son sol, tout en coopérant avec divers partenaires dans la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et les réseaux de migration clandestine. L’universitaire met également en lumière une menace moins visible, mais tout aussi préoccupante : la guerre cognitive. «Lors d’un atelier organisé à Alger par le Comité des services de renseignement et de sécurité africains (CISSA), il a été expliqué comment certaines puissances exploitent l’information pour affaiblir les États africains. Par le biais de la désinformation, des fake news, des rumeurs ou de la manipulation émotionnelle, ces acteurs cherchent à fragiliser les sociétés de l’intérieur», rappelle-t-il.
S. E.