Bouhania Goui, politologue : «L’Algérie a réagi avec fermeté face à une provocation délibérée»

Politologue et expert en relations internationales, le Professeur Bouhania Goui, a affirmé que la décision de l’Algérie de déclarer douze fonctionnaires de l’ambassade et des consulats français «persona non grata» résulte d’un processus mûrement réfléchi et fondé sur des éléments concrets. Ce n’est, selon lui, en aucun cas une mesure improvisée, mais une réponse mesurée à une accumulation de provocations et de violations du droit diplomatique. Il a précisé que cette décision survient, notamment, après l’arrestation publique et humiliante, d’un agent consulaire algérien à Paris, le 8 avril dernier, par des services du ministère français de l’Intérieur. Une action qu’il a qualifié de «théâtrale» et de «diffamatoire», et qui, selon lui, constitue une violation manifeste de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques. «C’est un déni clair du principe d’immunité diplomatique. Ce type d’acte, digne d’un scénario hollywoodien, constitue une provocation grave. L’Algérie, en tant qu’État souverain, ne pouvait rester passive», a soutenu le politologue. Le communiqué de notre ministère des Affaires étrangères, a-t-il noté, indique que les fonctionnaires français expulsés sont soupçonnés d’agissements incompatibles avec leur statut. Certains, a-t-il précisé, exerçaient des fonctions à double casquette, mêlant sécurité et diplomatie, sous la tutelle directe du ministère français de l’Intérieur. Pour le Pr Goui, cette décision reflète clairement la volonté de l’Algérie de défendre sa souveraineté nationale. «Ce n’est pas une réaction à chaud, mais une décision souveraine, ciblée et fondée sur des faits avérés. La diplomatie algérienne a fait preuve de discernement et de fermeté face à une violation flagrante des normes internationales», a-t-il insisté. Il a observé également une volonté manifeste de Paris de remettre en cause le statut des représentants diplomatiques algériens, en les traitant comme de simples délinquants. «On assiste à une instrumentalisation préoccupante des relations diplomatiques par certains cercles du pouvoir français, notamment par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, dont l’attitude s’apparente à une diplomatie parallèle», a analysé le spécialiste qui pointe du doigt l’ingérence assumée de Retailleau dans les affaires diplomatiques. Et d’ajouter : «Ce dernier agit comme s’il dirigeait une France parallèle, usurpant les prérogatives du ministère des Affaires étrangères. Une question essentielle se pose : qui gouverne réellement en France ? Où est Emmanuel Macron ? Pourquoi laisse-t-il son ministre de l’Intérieur franchir ainsi les lignes rouges sans intervenir ?». Il a évoqué aussi la demande française d’intervention du Président Tebboune dans le dossier judiciaire de l’écrivain Sansal. Une requête qu’il juge incohérente et révélatrice d’un double discours. «La France demande à l’Algérie d’interférer dans sa justice pour répondre à une exigence politique, alors qu’elle-même refuse tout geste diplomatique pour libérer un diplomate algérien détenu arbitrairement», a-t-il dénoncé. Pour le spécialiste, les relations algéro-françaises sont aujourd’hui prises en otage par une extrême droite en pleine ascension, qui instrumentalise l’Algérie à des fins électorales. «L’Algérie affirme clairement son indépendance diplomatique et rejette toute logique néocoloniale», a soutenu le Pr Goui. Il a conclu en réaffirmant que l’Algérie moderne est pleinement souveraine dans ses choix.

S. E.

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