
On les pensait dissouts dans les poubelles de l’histoire, les voilà de retour pour rejouer une triste partition. Faut-il crier au secours ? Certainement pas. D’abord, leur retour n’est pas une menace, c’est un aveu de faillite. Ensuite, ce serait déjà leur accorder une importance qu’ils ne méritent pas.
Depuis plusieurs jours, le refrain d’une haine recuite meuble les réseaux sociaux, certains journaux et les télévisions de Bolloré. Dans cette frénésie accusatrice, tout ce qui porte le nom ou les couleurs de l’Algérie devient leur cible. Sans mesure ni discernement, ils s’attaquent aux institutions, aux dirigeants du pays, à ses symboles et même à sa mémoire. Plus que des opinions critiques, c’est une croisade médiatique où l’Algérie est le pays à abattre. Appelés en renfort par une France désemparée face à une Algérie digne et debout, les «bouchekara» et toute la faune des «khabardjia» reprennent du service. On les pensait dissous dans les poubelles de l’histoire, les voilà de retour pour rejouer une triste partition. Faut-il crier au secours ? Certainement pas. D’abord, leur retour n’est pas une menace, c’est un aveu de faillite. Ensuite, ce serait leur accorder une importance qu’ils ne méritent pas, et leurs vaines gesticulations n’ébranlent personne — sauf peut-être leur propre vanité. Le peuple algérien, lui, n’est ni dupe ni amnésique : il a parfaitement identifié le profil de ces nouveaux harkis chauffés à blanc pour se mettre au service d’une France qui a désormais glissé vers le sionisme. Les traîtres ont toujours rôdé en marge de l’histoire. L’imaginaire collectif algérien conserve toujours les images de ces silhouettes cagoulées, figures honteuses qui livraient leurs frères aux griffes de l’armée coloniale. Ce ne sont pas des souvenirs effacés, mais des plaies ouvertes. Et voilà que le même spectacle se rejoue, aujourd’hui, avec d’autres costumes, sous d’autres discours, dans le même instinct servile. À défaut d’avoir changé, la trahison a seulement troqué la cagoule contre le masque médiatique. À ses habituels supplétifs, ces relais dociles qui s’agitent à l’extérieur comme à l’intérieur pour essaimer sa parole, la France ajoute désormais une arme plus sournoise : le chantage. Tantôt diplomatique ou politique, tantôt économique, parfois sécuritaire et même mémoriel, dans l’espoir de faire plier l’Algérie. Dernière séquence en date : une information fuitée dans l’hebdomadaire L’Express, au sujet de la menace «officieuse» de gel des comptes de «dignitaires algériens» par la France. Chiche ! a répliqué, sans coup férir, l’agence officielle APS. Le défi bouscule tous les vade-mecum de veille de départ. Car, en vérité, cet énième coup de bluff n’est qu’une preuve supplémentaire de l’absence totale, chez les Français, de leviers pouvant leur permettre de prendre des mesures de rétorsion contre l’Algérie. Ces sommations, ultimatums et menaces n’arrachent à l’Algérie qu’une indifférence glaçante. À entendre les discours des politiques de l’extrême droite française — notamment l’agité du bocal Bruno Retailleau — on pourrait croire qu’il suffirait d’appuyer sur un simple bouton, pour soumettre l’Algérie entière à leurs désirs. Leurs fantasmes d’une Algérie réduite à une simple extension de leurs volontés coloniales ne sont qu’une illusion. Puisqu’on y est, il se pourrait même que, dans leurs rêves, l’indépendance de l’Algérie n’ait jamais eu lieu, et que la mémoire des martyrs ne soit qu’un détail gênant à effacer. Ils se réfugient alors dans une fiction grotesque, bâtie sur des clichés éculés, articulée autour de mots creux tels que «régime», «pouvoir», «nomenklatura» ou encore «dignitaires», comme si la réduction langagière suffisait à saisir la complexité d’une nation. La réponse de l’APS a le mérite de démontrer que les «dignitaires algériens» n’ont rien à cacher de ce côté-là. L’Algérie de la «Issaba» n’existe plus, et la vache à lait algérienne a bel et bien tari. Ceux qui ont amassé des fortunes illicites et leur ont trouvé une planque sûre en France, soit croupissent aujourd’hui dans les prisons algériennes, soit sont réclamés par la justice algérienne au régime français, qui refuse de les livrer, leur assurant ainsi une bienveillante protection. Longtemps en position dominante dans les échanges bilatéraux, la France découvre, désarmée, les limites de son influence face à une Algérie qui choisit désormais ses leviers avec précision. Telle est la vérité. Tout le reste n’est que de l’agitation.
B. T.