
Le mandat chaotique du 45e président des Etats-Unis laissera inéluctablement des traces dans les relations internationales et l’équilibre du monde en général. Après Washington en novembre dernier, Moscou a annoncé vendredi son retrait du traité Ciel Ouvert.
Depuis 2002, il permettait aux 35 pays signataires d’opérer des vols d’observation non armés au-dessus des pays membres afin de promouvoir la confiance et la prévisibilité des activités militaires. C’est le retour à la guerre froide et au système des blocs d’autant que les alliés de l’Otan tentent vaille que vaille de s’installer dans l’espace vital russe. Une «ambition» qui nourrit les craintes des responsables du Kremlin. En effet, Moscou leur reproche d’avoir refusé ses propositions faites pour sauver ce traité, notamment celle de s’engager à ne pas transmettre à Washington les informations qu’ils recueillent en survolant le territoire de la Russie lors des vols d’observation autorisés par le traité.
Dans ces conditions, Moscou estime que l’équilibre entre les signataires est gravement perturbé, raison pour laquelle la Russie a décidé de renoncer. Le ministère des Affaires étrangères estime en effet que son rôle d’instrument de renforcement de la confiance et de la sécurité n’est plus garanti. Depuis novembre, les avions russes ne sont plus autorisés à survoler le territoire américain. Par ailleurs, la décision de la Russie intervient à quelques jours seulement de l’investiture du nouveau Président démocrate américain. Le timing n’est sûrement pas fortuit du fait que dans les prochaines semaines, les responsables russes s’apprêtent à renégocier avec la nouvelle administration américaine le traité START sur les armes nucléaires conventionnelles. Pour rappel, Donald Trump avait, au cours d'un meeting dans le Nevada en vue des élections de mi-mandat, annoncé le retrait de son pays du traité INF (Intermediate-range Nuclear Forces). Signé en 1987 par les Etats-Unis et l'Union soviétique, celui-ci avait mis un terme à une crise vieille de dix ans, en interdisant les missiles nucléaires ou conventionnels de moyenne portée (500 à 5.500 km). Donald Trump, qui a fait l’annonce officielle de ce retrait en février 2019, et son ex-conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, devenu après son pire détracteur, n’ont jamais caché leur volonté de se débarrasser de ce traité. Ils le considéraient comme un handicap face à la Chine qui, elle, n’est pas signataire et peut donc développer son arsenal sans entrave.
Si dans l’esprit des signataires, le traité INF marquait la volonté d’ouvrir une période de sécurité militaire et de coopération internationale dans le domaine des armes nucléaires, cet esprit risque d’être enterré si la future phase diplomatique avec le nouveau locataire du Bureau ovale échoue.
M. T.