Dépossédée de ses richesses pendant 132 ans : L’Algérie pillée à grande échelle

Farid Bouyahia

Dans les zones urbaines, aussi bien que dans les zones rurales, la guerre de Libération nationale a été, sans doute, un facteur dominant de l'économie algérienne, même après l'indépendance en 1962.

Pays ravagé par sept longues années de guerre totale contre l'une des premières puissances militaires du monde, ses effets ont été profonds dans tous les domaines, et les marques qu'elle a laissées dans l'économie ne se cicatriseront que plusieurs années après. Tout le pays a été éprouvé. En effet, dans les années postérieures à 1962, avec pratiquement des moyens dérisoires, le pari de bâtir une économie moderne est lancé. Les premiers signes d'une économie potentiellement vigoureuse étaient visibles ; mais encore plus visibles étaient les indicateurs caractéristiques d'une économie sous-développée. Le colonisateur français s'est approprié la terre et toutes ses ressources minières, agricoles et autres. Il dirigea ses efforts vers la mainmise systématique sur les meilleures terres. La spoliation représentait son principal moteur. C'est qu'après avoir été dépossédée de toutes ses richesses, 132 ans durant, l'Algérie était appelée à reconstruire son économie par de grands sacrifices. Quelques années après l'indépendance, une forte impulsion fut donnée et par la suite, malgré tous les obstacles, la tendance ne cessa d’être tournée vers le développement, avec une volonté vigoureuse de renouveau. Il fallait réorganiser le pays au plus vite, afin qu’il puisse, notamment, produire assez de nourriture pour une population qui avait connu les pires affres de la famine. Reprendre les terres accaparées par les colons était une question de vie ou de mort. Avec tout le potentiel économique anéanti, on aurait pu croire que, confrontée à une entreprise de destruction d'une telle ampleur, l’Algérie se serait rapidement effondrée, mais il n'en fut rien, bien entendu. Les sacrifices consentis par une population, quoique meurtrie, ont permis de tenir jusqu'à l'indépendance. En 1962, pays sous-développé, les capacités de production agricole de l'époque ne suffisaient pas à couvrir les besoins d'une population caractérisée par un taux de pauvreté particulièrement élevé, dépourvue d'industrie et de compétences techniques qualifiées. Mais cela n'a pas empêché les gouvernements successifs d'engager des efforts de développement colossaux. Malgré tout, le pays a tenu bon et son économie s'est adaptée aux difficultés héritées de l'époque coloniale. Le peu d'infrastructures et d'équipements qui existaient à continuer à tourner tant bien que mal et le développement agricole était censé satisfaire les besoins essentiels de la population. A une époque où la puissance des Etats dépendait directement de leurs valeurs économiques, il fallait aussi penser à se débarrasser d'une certaine dépendance économique du pays vis-à-vis de l'extérieur, qui était pesante, tant elle fragilisait l'Indépendance politique, chèrement acquise. L’industrialisation visait non seulement à augmenter la part de l’industrie dans l’ensemble de notre économie nationale, mais encore à assurer, grâce à ce développement, l’indépendance économique de notre pays. Aussi, la politique économique inspirée de l'organisation socialiste de l'Etat a joué un rôle capital dans la situation de départ de l'économie de l'Algérie indépendante. A partir de 1965, l'économie commençait à être restaurée et fort avancée dans la voie de la socialisation. Essentiellement agricole au début, elle était par ailleurs en cours d'industrialisation dans le cadre d'une planification visant à réduire progressivement sa dépendance vis-à-vis de l'extérieur. Et bien qu'encore précaires et insuffisants, les résultats enregistrés à l'époque témoignaient déjà d'une forte volonté d'aller de l'avant et d'un niveau de développement honorable, le tout couronné par les premières nationalisations des hydrocarbures. Et si la priorité était accordée à l'équipement du pays, avec le souci de limiter la dépendance extérieure de l'économie, il ne demeure pas moins vrai qu'à l'instar de la plupart des pays en voie de développement, l'une des principales richesses de l'Algérie à cette époque était sa main d'œuvre et ses compétences, qu'elle s'est attachée à former à grands renforts.

F. B.

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