
Des satisfecits, des réserves et des recommandations. Au terme de sa mission statutaire de «suivi vigilant» et des «consultations», menées virtuellement, du 13 septembre au 3 octobre, avec les autorités algériennes, le Fonds monétaire international (FMI) a rendu, lundi, ses évaluation des politiques publiques et les impacts de celles-ci sur les équilibres macroéconomiques et la croissance du pays.
De Washington, par visio-conférence, la cheffe de mission, directrice de la division Afrique du Nord/Moyen-Orient du FMI, Mme Geneviève Verdier a donné lecture de son rapport devant la presse nationale réunie à Villa Jolie, siège de la Banque d’Algérie. La dirigeante du FMI mettra d’emblée, en lumière les effets combinés de la pandémie et de la baisse de la production et des prix du pétrole qui ont eu, d’après elle, de «grave répercussion» sur l’économie, avec une «forte contraction du PIB réel», estimée à 4,9 % en 2020. Les mesures prises pour atténuer les répercussions de la crise sanitaire (réduction du taux directeur de la Banque centrale, les aides aux ménages, assouplissement des mesures prudentielles…), ont certes protégé l’économie algérienne mais elles ont surtout mis en évidence les «facteurs de vulnérabilités de cette économie», fait-elle observer. «En raison de déséquilibres macroéconomiques depuis de longue date, les décideurs disposent (aujourd’hui), d’une marge de manœuvre considérablement réduite». Et pour cause ! La politique budgétaire «expansionniste» menée depuis plusieurs années a contribué, explique-t-elle, à porter les déficits extérieurs courants à des «niveaux élevés», malgré une politique de «compression des importations», et a entraîné de «vastes besoins de financement» qui ont été, dans une «large mesure, satisfaits à travers la Banque centrale». Les déficits budgétaire et extérieur se sont encore «creusés» en 2020, constate la mission du FMI, alors que les réserves internationales, qui demeurent à un niveau «adéquat», ont baissé de 62,8 milliards de dollars en 2019 à 48,2 milliards de dollars à la fin de 2020. «Une reprise graduelle est en cours», soulignent les rapporteurs du FMI. Avec une croissance économique projetée à plus de 3 % cette année, soutenue par la reprise des prix et de la production des hydrocarbures. L’inflation s’est «accélérée» pour atteindre 4,1% en moyenne annuelle en juin 2021, en partie sous l’effet d’une «augmentation des cours internationaux des produits alimentaires et d’un épisode de sécheresse en Algérie». La croissance devrait s’essouffler à moyen terme, anticipe-t-on, du fait de «l’érosion probable de la capacité de production dans le secteur des hydrocarbures dans un contexte de réduction des projets d’investissements décidée en 2020, et des politiques actuelles qui limiteraient le crédit au secteur privé».
Le financement monétaire devrait être interdit
Malgré le «rebond» de l’activité économique et la «nette amélioration» du solde extérieur en 2021, il reste «urgent», note l’institution financière internationale, de «rétablir une stabilité macroéconomique et une marge de manœuvre», tout en «protégeant les groupes les plus vulnérables et en soutenant la reprise». L’équipe de la mission prévient que déficits budgétaires élevés persistent, cela «engendrerait des besoins de financement sans précédent» et épuiseraient les réserves de change, tout en présentant des risques pour l’inflation, la stabilité financière et le bilan de la Banque centrale. La capacité des banques à prêter au reste de l’économie serait fortement «entravée», avec des «conséquences négatives pour la croissance». Dans le registre des recommandations, le FMI veut un «ensemble complet et cohérent» de politiques budgétaire, monétaire, et du taux de change afin de réduire les vulnérabilités de l’Algérie. «Un ajustement budgétaire général, (…) devrait être entamé en 2022 et s'échelonner sur plusieurs années pour maintenir la viabilité de la dette», recommande l’institution de BrettonWoods. Lequel «ajustement» devrait être «étayé par une amélioration du recouvrement des recettes, réduction des dépenses…. «Le financement monétaire, insiste le FMI, devrait être interdit afin d’endiguer l’augmentation de l’inflation et l'épuisement rapide des réserves de change, tout en diversifiant les sources de financement budgétaire y compris à travers le recours à l’emprunt extérieur». Geneviève Verdier instruit aussi pour une «plus grande flexibilité» du taux de change contribuera à renforcer la résilience de l'économie, et un «resserrement de la politique monétaire», pour endiguer les pressions inflationnistes. FMI et autorités sont «d’avis que la transition de l’Algérie vers un nouveau modèle de croissance passe également par la mise en œuvre de réformes fondamentales visant à renforcer la transparence et la gouvernance des institutions juridiques, budgétaires et monétaires dans l’ensemble du secteur public et à réduire les obstacles à l’entrée dans l’économie formelle».
M. Az.