C'est la Journée mondiale de l’Environnement, où États, acteurs économiques et citoyens doivent prendre part à des activités et actions devant hisser la conscience environnementale. Parmi les actions et solutions qu'offrent les procédés technologiques, il y a le «projet de méthanisation des sous-produits de transformation de volailles», comme solution devant atténuer les effets sur l'environnement.
M. Mechaheb Hamou, directeur associé à ECOWORKS, une société spécialisée dans la conception et l'ingénierie d'installations pour le recyclage et le tri des déchets, déclare que «l'élevage avicole en Algérie a pris un tel essor qu’aujourd’hui la filière a atteint un stade de développement qui lui confère désormais une place de choix dans l’économie nationale en général avec 1,1% du PIB national, et dans l’économie agricole 12% du Produit agricole brut, en particulier. «Cette rapide croissance a accéléré l’industrialisation de l’aviculture avec son corollaire de pollution, en amont dans l’élevage, avec le déversement des déchets de fiente dans le milieu naturel, et en aval dans la chaîne de transformation avec les sous-produits d’abattage souvent assimilé illicitement aux déchets ménagers et mis en décharge ou déversés dans la nature» explique-t-il, et d'ajouter «c’est une filière grande génératrice de pollution». Il indiquera que «la solution qui présente le meilleur compromis technico-économique pour juguler cette pollution est la méthanisation». Il s'agit d'un procédé biologique consistant à décomposer des matières organiques pour produire à la fois de l’énergie renouvelable, le biogaz, et le retour au sol d’une partie de ces matières puisque le degistat (déchets digérés) issu du process est valorisé comme fertilisant ou amendant». Le directeur associé fait savoir que «la méthanisation est aujourd’hui la filière la plus mature dans le monde dans la production de gaz renouvelable». En outre l'étude de la production de biogaz par co-digestion des déchets organiques tels les déchets d’abattoirs et déchets de volailles a montré que le rendement en biogaz est plus important pour un substrat constitué de 75% de déchet de volaille et 25% de déchet d’abattoir. Cette solution trouve tout son intérêt «quand on sait que l’aviculture enregistre une forte consommation énergétique dans le chauffage des bâtiments d’élevage» précise-t-il, soulignant que «les éleveurs concèdent un investissement énergétique important pour maintenir l’équilibre thermique à l’intérieur des poulaillers». Les consommations d’énergie dans les bâtiments fermés de production de volailles de chair représentent une part importante de l’énergie consommée par l’aviculture en général, dont l'estimation annuelle totale des consommations d’énergies pour l’ensemble des élevages avicoles est de 1,81 TWh dont 1,41 TWh pour les volailles de chair soit 78%
Le potentiel biométhane des déchets de la filière volaille étant établi, reste à définir le modèle économique de base soutenable pour asseoir cette technologie dans la prise en charge des déchets de la filière en Algérie.
Les solutions bio comme alternative
En Algérie, la possibilité d’exploiter l’électricité et le gaz dans une injection dans le réseau «est très peu probable», affirme M. Mechaheb «d’abord à cause du coût de ces énergies et le prix de vente à l’opérateur public, ensuite à cause de l’absence du cadre juridique et réglementaire qui régirait cette vente» a-t-il ajouté.
M. Mechaheb fait savoir que pour une méthanisation adaptée à la réalité agricole algérienne et son contexte, «deux possibilités s’offrent aux agriculteurs, créer des unités de méthanisation de moyennes tailles dans des structures mutualisées regroupant plusieurs agriculteurs et fermiers et impliquant les communes» pour qu’elles puissent agréger d’autres matières et bio-déchets issues des industries agroalimentaire, de restauration et autres générateurs produisant un flux de déchets captifs pour générer un impact positif sur le territoire». Pour lui «cette solution reste tributaire des financements conséquents à consentir si ce n’est des montages financiers publics-privés réfléchis et articulés autour de l’impératif du développement local». Le biogaz est valorisé directement pour des usages thermiques sur le site de production en combustion directe dans une chaudière pour chauffer les bâtiments d’élevage et gagner en autonomie. Pour les fermes exclusivement tournées vers l’élevage, elles pourront revendre le degistat produit en composte pour d’autres fermes orientées à la culture de la terre.
Importance des dispositifs d’aide à l’investissement
Pour que ces projets soient techniquement et économiquement viables, M. Mechaheb estime «qu'il faudra mettre en place des dispositifs d’aide à l’investissement pour les projets de réduction de rejet et dans le cadre d’encouragement des plans de performances énergétique». La prise en charge des problèmes environnementaux ne peut se faire sans l’accompagnement des autorités publiques à travers la création d’éco-organismes, animé par les soucis et l’urgence de changer de modèle énergétique et renforcer et soutenir l’orientation des pratiques agricoles vers une transition agro écologique à travers ce levier qui est la méthanisation».
Tahar Kaidi