Taghit : La perle de la Saoura retrouve son charme

D.R.
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De notre envoyée spéciale Neila Benrahal

Taghit demeure l’une des régions les plus attrayantes du Sud. Située à 85 km au sud de Béchar, elle retrouve doucement ses touristes et la fameuse dune s’anime de nouveau. Les chameaux et les quads sont de retour après plus d’une année d’immobilisation, les boutiques d’artisanat ont rouvert et exposent les chèches et les bijoux très prisés des touristes.

Il esit 19h 50mn lorsque nous arrivons à Taghit venant de Béchar, à travers une multitude d’oasis. La route a été réhabilitée, notamment les fissures dues au passage des poids lourds venant de Ghardaïa, Hassi Messaoud, Tindouf et Adrar. A l’entrée de la localité un grand panneau vous souhaite la bienvenue, le moment d’une halte pour faire une photo et apprécier le beau paysage surtout les dunes du grand Erg dont l’une dépasse les 300 mètres. Le visiteur est attiré par un paysage unique et merveilleux : le vert des palmiers sur le fond marron de sable et l’orange des ksour.
Nous rencontrons des touristes étrangers escortés par des éléments de la Gendarmerie nationale ainsi que des familles, des couples et des jeunes venus du nord, de l’est et de l’ouest du pays, de Blida, Ain Defla, Oran, Tlemcen, Saida, certains en voiture et d’autres par bus.
La dune de Taghit est animée en cette période, des jeunes effectuent des randonnées sur le sable à bord de quads et d’autres à dos de dromadaires bien décorés pour les randonnées.
Les propriétaires des quads et des dromadaires expriment leur satisfaction. «Certes les touristes ne sont pas nombreux mais c’est un bon signe du retour de l’activité touristique dans la région après plus d’une année de pandémie», confie Mouloud, propriétaire de dromadaires.
Les randonnées à bord des quads sont à 4000 DA. «Nous avons élargi le circuit touristique de la dune vers les ksour. Le tourisme a été très affecté par la crise sanitaire», déplore Saïd propriétaire de ces engins venu du nord pour travailler à Taghit.
Les randonnées à dos de chameau sont très prisées en raison des prix proposés, la tournée pour une personne est à 500 DA. «Nous travaillons d’habitude juste trois mois durant l’année, du réveillon au début du mois de mars, durant la saison touristique saharienne mais avec le confinement et la pandémie sanitaire, nous étions mis en chômage forcé», déplore Mustapha qui se dit optimiste pour le retour à une vie normale.
En effet, des touristes nationaux retrouvent Taghit. Sid Ahmed est venu d’Annaba avec ses amis à bord d’un véhicule. «Je passe mes vacances en Tunisie depuis plusieurs années mais nous avons décidé de faire un tour à Taghit et je regrette vraiment de ne pas l’avoir fait plus tôt. Nous avons un beau pays riche sur le plan touristique mais la gestion fait défaut.»
Il est hébergé chez une famille dans le cadre du touriste chez habitant. «L’auberge et le camping sont fermés et une chambre d’hôtel coûte entre 9.000 et 12.000 DA la nuitée. Imaginez qu’il n’y a pas de toilettes publiques dans toute la ville». L’hôtel Bordj Taghit affiche pourtant complet jusqu’au 15 avril.
Des jeunes de la région ont opté individuellement pour la promotion du tourisme à l’instar de Mohamed qui a ouvert un restaurant de plats traditionnels dans la région et confectionne «merdouma» (une galette traditionnelle farcie cuite sous le sable) très prisée des visiteurs, de même pour le thé corsé du désert.
Le tourisme c’est aussi l’artisanat, la placette est déserte. «Le marché Noël» n’a pas repris son activité. En face, des œuvres traditionnelles, des jarres, des bols, des assiettes aux décorations diverses sont exposés par terre à des prix élevés. Les chèches de toutes les couleurs sont cédés à 400 DA. Ramzi, lui est un artisan venu de Reghaïa pour s’installer en famille dans cette région. «Les jeunes veulent travailler et promouvoir l’artisanat local. On a fabriqué des sandales avec des pneus mais nous voulons un soutien de la part des pouvoirs publics.»

Les ksour de Taghit,  patrimoine en péril

Tout le long des 18 km de palmeraie de Taghit, la route traversant l’oasis est bordée de dunes à l'est et d'une multitude de ruines en toub à l'ouest. Il s’agit de ksour dont certains datent de plusieurs siècles qui ont atteint un degré avancé de dégradation, d'autres sont en ruine, a-t-on constaté lors d’une visite au ksar de Hai Bouselidj faute d’un programme de restauration mais aussi à cause des intempéries ayant causé l’effondrement de plusieurs parties, indique un guide. Un décor désolant.
L’état de délabrement du site ne permet plus de visites touristiques à l'intérieur. Ce ksar est situé à proximité d’une source d’eau qui attire les touristes et les habitants. En face, un ksar situé au cœur d’une palmeraie qui bordait la route est devenu un véritable dépotoir.
Les ksour de Brika, Berrabi, Bakhti et ceux du Djebel Baroune ont tous été abandonnés par leurs occupants, certains ont disparu. Selon Ramzi, jeune artisan de la région, la réhabilitation des ksour permettra un réel essor de l'artisanat local ainsi que leur exploitation comme lieux d’hébergement.

Des gravures rupestres détériorées

On ne peut pas visiter Taghit sans se rendre aux stations de gravures rupestres, un vrai musée en plein air avec près de 7.000 ans d’histoire de l’art.
Cette ville est composée de sept stations abandonnées et non sécurisées. Nous parcourons près de 28 km pour arriver à zaouia Tahtania dernier hameau de l’oasis de Taghit qui remonte à plus de 40.000 ans avant Jésus-Christ. Ces gravures représentent la vie quotidienne de l’époque : vaches, chèvres, gazelles, antilopes, girafes sont gravés sur les grosses pierres avec des signes en Tifinagh (langue berbère).
Malheureusement les gravures sont saccagées par des inscriptions à la peinture rouge, blanche ou même noire et à la craie les noms et villes des visiteurs alors que d’autres sont gravés. Le jeune vendeur d’objets souvenirs à Taghit Tahtania dira que l’endroit n’est pas sécurisé et ne dispose pas de guide. La ministre de la Culture, Malika Bendouda, a annoncé en ce sens, la création d’un parc naturel national qui va appuyer le schéma de protection des stations de gravures rupestres de Taghit.
Lors de sa récente visite de travail la ministre s'est engagée à le mettre en œuvre pour protéger et valoriser ce précieux patrimoine culturel.
N. B.

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Promotion du tourisme local : une palette d’opportunités

Plusieurs projets sont inscrits dans le cadre des différents  programmes de développement  socioéconomique local de la daïra de Taghit, notamment dans l’agriculture et le tourisme, a indiqué le chef de daïra de Taghit, Abdelkader Bennouar à El Moudjahid. Ainsi, la daïra sera dotée d’un nouveau village touristique réalisé par l’Office national algérien du tourisme (ONAT) qui sera opérationnel très bientôt ainsi que la construction d’un complexe touristique par un investisseur privé d’Oran.
«L’objectif est de parer ainsi à l'absence d'infrastructures d'accueil dans ce pôle touristique.» Taghit compte plusieurs sites à visiter comme son Ksar, son patrimoine rupestre, sa forêt fossilisée, son Bordj et sa palmeraie millénaire, et renoue avec le tourisme depuis le mois d’octobre dernier dans le respect du protocole sanitaire.
Des mesures sont prises pour une promotion réelle du tourisme local par la facilitation des procédures d’investissement notamment.
Le responsable affirme que l'agriculture enregistre une dynamique nouvelle dans la daïra avec l’inscription de plusieurs activités agricoles et d'élevage ayant bénéficié d’opérations de soutien des pouvoirs publics. «Nous avons assuré l’autosuffisance alimentaire», affirme le chef de daïra.
S’agissant de l’état des ksour, il dira que l’ancien ksar de Taghit a été restauré partiellement, les autres sont des habitations privées. «Le ministère de la Culture veille à accompagner leurs propriétaires pour leur restauration», assure M. Bennouar.
Neila B.

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