Entretien réalisé par Abdelghani Aïchoun
Votre livre Sahara occidental, un peuple brûlant de libération vient de paraître. Est-ce que, quelque part, ce n’est pas pour rétablir des vérités ?
En effet. Je suis parti d’un constat que 50 ans depuis l’occupation marocaine, le 6 novembre 1975, des territoires non autonomes sahraouis, on a remarqué que les autorités marocaines et même certaines puissances travaillent pour rendre la question sahraouie invisible. Invisible au niveau de l’ONU, invisible au niveau des médias et donc, par conséquent, invisible au niveau de l’opinion publique internationale.
C’est ce que j’ai compris à travers Ghaza, et tout ce qui s’est passé par la suite avec toute cette violence inouïe, violence d’un autre âge qu’ont subie les Palestiniens. Je me suis réveillé et je me suis dit que cette question sahraouie, justement, va dans le sens de l’invisibilisation.
C’est ce que vous appelez stratégie d’invisibilisation. C’est dans quel objectif ?
C’est une stratégie d’invisibilisation afin d’occulter la question sahraouie du champ médiatique, de la faire occulter des consciences à travers le monde, et ce pour en finir après et dire que c’est une question interne au Maroc. Comme ils ont essayé de le faire au Conseil de sécurité. Je fais remarquer que ce livre a été écrit trois mois avant le Conseil de sécurité. En quelque sorte, j’avais prédit cette issue-là. Une issue qui n’a pas, finalement, abouti. Parce qu’il y avait une tentative sérieuse de faire occulter cette question et de la faire sortir définitivement des radars, en la transformant en question interne au Maroc, donc une question d’autonomie, de forme de gouvernance interne au Maroc.
Donc, le livre, c’est en même temps un plaidoyer pour revenir à l’histoire et justifier la justesse de la question sahraouie, du combat des Sahraouis, de leur droit à la résistance et même à prendre des armes. Tout ça, c’est leur droit, c’est comme le cas des Palestiniens. Et en même temps, pour rappeler que cette invisibilisation, cette périphérisation de la question sahraouie n’est pas une fatalité, parce qu’on a vu des causes qui lui ressemblent, comme celles du Timor-Leste et de la Namibie qui ont abouti. Et les puissances, dans ces cas-là, ont joué leur rôle qui est allé dans le sens de l’histoire.
Justement, vous suivez ce dossier depuis des années. Comment voyez-vous la suite des événements ?
Il y a deux options. Dans la première, la communauté internationale tourne le dos au droit du peuple sahraoui, à la douleur des Sahraouis, tourne le dos au drame du peuple sahraoui qui est mis en minorité dans les villes occupées. Il y a une stratégie d’effacement démographique des Sahraouis dans les villes occupées. En plus de la douleur de l’exil parce que, être réfugié, finalement, c’est aussi l’exil. Donc, si la communauté internationale persiste dans cette voie, c’est le statu quo pour cette cause et on va encore perdre d’autres années, alors que les puissances vont continuer à saigner à blanc les richesses de ce peuple.
La deuxième, après que le Sahara occidental eut exprimé son refus total de négocier uniquement sur la base de l’offre d’autonomie, on ira vers la réhabilitation des fondamentaux, en l’occurrence admettre que c’est une question de décolonisation et mettre en œuvre l’organisation d’un référendum d’autodétermination.
A. A.