
El-Moudjahid : Quels sont les grands axes par lesquels votre organisation ambitionne de coopérer avec l'action du renouveau économique ?
Kamel Moula : La question de la souveraineté économique est au cœur des préoccupations et priorités. Les prix des matières premières flambent à l'international et nous sommes directement impactés car nous en produisons très peu. Le premier axe du progrès est de tout mettre en œuvre pour assurer notre sécurité alimentaire et le pouvoir d'achat des ménages. Pour cela, des industriels de la filière de l'agroalimentaire se sont rapprochés des agriculteurs pour trouver, ensemble, les mécanismes de partenariat réalistes, réalisables et efficaces. Notre agriculture doit se moderniser et produire mieux en qualité et en quantité. Pour se faire, la production agricole doit être adaptée en fonction des territoires, mais aussi en tenant compte des besoins de la transformation. Le second axe du progrès porte sur le développement d'une industrie autonome en se basant sur l'existence de nos richesses naturelles. L'industrie de la pétrochimie est la meilleure des options. Des milliers d'objets quotidiens proviennent de la pétrochimie: plastiques, fibres, textiles, adhésifs, détergents, cosmétiques, médicaments, emballage alimentaire, tuyaux, flacons... Les premiers investissements massifs, aussi bien de l'État que les IDE, devraient s'orienter vers le secteur de la pétrochimie, indispensable dans de nombreux domaines, entre autres de l'automobile, de la constitution, de l'électroménager ou de la santé. Aussi, au niveau mondial, la demande est exponentielle, et nous pourrons devenir un grand pays exportateur de dérivés de pétrole
Quelles sont les propositions du CREA pour enrichir le nouveau code d'investissement ?
D'abord, la stabilité législative et règlementaire. Nous sommes en parfait accord avec le président de la République, qui a annoncé une durée de vie minimale de 10 ans pour un texte de loi aussi important. C'est un acquis fondamental pour ancrer la confiance entre l'État et l'investisseur. Nous soutenons cette vision dans nos propositions. Ensuite, la mise en œuvre des conditions optimales pour asseoir une liberté d'entreprendre et d'investir sans être en permanence freiné par une administration bureaucratique, qui n'a de cesse de créer des obstacles et de démobiliser les investisseurs. L'Etat par le biais de son administration doit jouer un rôle d'accompagnateur, et de régulateur, mais pas de censeur. Il faut d'abord prioriser les investissements qui permettront la consécration des objectifs de sécurité alimentaire, sanitaire et énergétique. D'autres investissements, en dehors de ce secteur, peuvent aussi apporter une plus-value à notre économie, l'exemple du l'industrie du textile pour réduire les importations et booster les exportations, notamment vers les pays de l'Afrique. Ceci dit, dans ce processus de relance de l'investissement, l'option de la numérisation est vitale et même vivement recommandée. Sans vision précise des réalités économiques, nous ne pouvons pas faire de projections. La collection d'informations fiables pour établir une cartographie réelle sur l'existant industriel devient urgente pour ne pas se tromper dans nos futurs investissements. Nous devons réfléchir nos investissements en fonction de nos besoins réels et non pas en fonction de l'appât du gain immédiat ou de projet approximatif. La modernisation de l'administration publique est également importante pour garantir une gestion impartiale des dossiers, mais aussi pour la finance digitale, secteur où nous sommes très en retard. Une commission du CREA s'est attelée à l'examen de ce créneau, et nos propositions à ce propos seront communiquées prochainement.
Vous avez été reçu par le Premier ministre dans le cadre des audiences accordées aux organisations patronales. Peut-on en savoir davantage à ce sujet ?
Naturellement, au vue de l'actualité, nous nous sommes emparés des textes régissant le code d'investissement. Nous avons formulé plusieurs suggestions pour l'amélioration du climat d'affaires et l'accroissement des investissements nationaux et étrangers. La concertation entre les pouvoirs publics et les opérateurs économiques n'est plus un simple slogan mais une réalité qui fait son chemin. Le renouveau économique est l'affaire de tous, et la confiance rétablie avec l’État est source de mobilisation et de dynamisation des chefs d'entreprises.
La vision de l'État en matière du renouveau va de pair avec la consolidation des acquis sociaux et le président de la République a réaffirmé cette réalité par plusieurs décisions phares, à l'exemple de l'allocation chômage. Votre avis ?
Le président de la République est très au fait des réalités sociales et économiques du pays. Il déploie tous les moyens pour remédier aux difficultés rencontrées par les citoyens et les opérateurs économiques. L'allocation chômage est une bonne mesure pour permettre aux jeunes de subvenir à leurs besoins de base. Au CREA, nous réfléchissons aux moyens que nous pouvons mettre en place pour accompagner le parcours d'une insertion professionnelle des jeunes en partenariat avec l'Anem. Nous allons nous mobiliser pour être des lieux d'accueil et de validation de projets professionnels. Il est important que la première période de 6 mois soit la plus constructive pour les bénéficiaires de l'allocation chômage inscrits à l'Anem. Concernant le pouvoir d'achat, et pour accompagner l'effort de sa préservation par l'État, beaucoup de nos entreprises n'ont pas répercuté la totalité des surcoûts survenus sur le marché international sur leurs produits.
K. A.