
Le procès de l’affaire GB Pharma s’est poursuivi, mardi, pour le 2e jour consécutif, avec l’audition de douze témoins et en l’absence de l’ancien ministre de la Santé, Mokhtar Hezbellaoui, et de l’ancienne ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, Houda Feraoun, ainsi que de l’ancien wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, qui a comparu mardi devant la chambre pénale près le tribunal de Tipasa.
Omar Benhamadi, en détention provisoire dans une autre affaire, a été entendu comme témoin durant plus de 4 heures. Il a nié toute intervention de son défunt frère Moussa Benhamadi, dans le projet de GB Pharma. « Le dossier a été déposé au niveau de l’ANDI par le gérant Abderrahmane Daoudi. Je suis le cogérant. Le coût du projet dépassait 50 millions de DA et tout s’est déroulé dans le respect de la loi», insiste-t-il.
Moussa Benhamadi n’intervenait pas pour les projets du groupe
Le témoin a indiqué que «le groupe Benhamadi n’existe pas juridiquement. Il s’agit d’entreprises autonomes et de Sarl où les frères Benhamadi sont des actionnaires et GB Pharma n’est pas une filiale du groupe Benhamadi».
Interrogé sur les crédits bancaires accordés à la société et qui dépassaient le coût du projet de fabrication de médicaments, estimé à 599 milliards de centimes, Omar Benhamadi a précisé que ce sont les estimations de l’ANDI et le crédit bancaire est généralement basé sur les garanties.
«Le crédit n’a pas dépassé le coût estimé par l’ANDI. Je tiens également à préciser que GB Pharma n’a bénéficié d’aucun avantage du CNI durant la période allant de 2012 à 2016», déclare-t-il.
Le représentant du ministère public a relevé que les frères Benhamadi sont actionnaires dans 64 entreprises en activité sur un total de 78 sociétés dont 13 ont été dissoutes ou en arrêt d’activité.
Evoquant l’expertise judiciaire, Omar Benhamadi a souligné que «les experts de l’IGF ne m’ont pas contacté, et encore moins mes frères, et nous n’avons présenté aucun document pour répondre à certaines anomalies. Nous détenons des rapports signés par le ministère de la Santé qui justifient l’arrêt des travaux de certains projets».
Au sujet du financement de la campagne électorale de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika par Moussa Benhamadi avec un montant de 58 millions de DA, le témoin a répondu qu’il n’est pas au courant de cette affaire. Omar Benhamadi a précisé qu’il n’a bénéficié d’aucun avantage en raison du poste de son frère au ministère de la Poste.
Hattab : «J’ai signé l’acte de concession conformément à la loi»
De son côté, l’ancien ministre des Sports et de la Jeunesse, Mohamed Hattab, s’est présenté à la barre comme témoin, dans une seule affaire liée à GB Pharma en sa qualité de SG de la wilaya d’Alger lors des faits. Hattab avait signé l’acte de concession d’une assiette foncière de 18.700 m2 pour la construction d’une usine de fabrication des implants oculaires et de lentilles de contact au profit de GB Pharma. Il a expliqué qu’il a signé l’acte en sa qualité de président du Comité d’assistance à la localisation et à la promotion des investissements et de la régulation du foncier en tant que représentant du wali d’Alger, Mohamed El Kebir Addou. «J’ai agi conformément au décret exécutif 90-230 qui définit les postes supérieurs de l’Etat. L’article 6 stipule que le SG peut signer les contrats et les décisions. Je n’ai pas besoin de procuration du wali», répond-il au juge qui l’interroge sur l’expertise judiciaire qui a relevé des infractions dans l’attribution de l’acte sans cahier des charges.
Le témoin a rappelé qu’il était SG de la wilaya d’Alger, durant la période allant du 30 septembre 2010 au 4 mars 2013. «Les services de la wilaya d’Alger ont reçu 50 dossiers d’investissements de la part de l’organe de gestion de la nouvelle ville de Sidi Abdellah à travers le ministère de l’Environnement. Les dossiers ont été gelés suite aux directives du conseil ministériel conjoint qui a émis des réserves sur la réalisation des projets dans cette nouvelle ville, tout en mentionnant que cela est soumis à une autorisation du gouvernement», explique-t-il.
Le juge : «Parmi les 50 dossiers, figurait le dossier de GB Pharma. Il a été déposé au nom de qui ?» Hattab répond : «Au nom du groupe Benhamadi. Nous avons reçu une liste des projets avec des documents, mais sans dossiers de fond.»
Il a ajouté que le 2 février 2012, les services de la wilaya d’Alger ont reçu une correspondance signée par le chef de cabinet du ministre de l’Environnement, Chérif Rahmani, pour la programmation des projets d’investissement. «Le 6 mars 2012, les services de la wilaya d’Alger ont reçu une correspondance signée par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, suite à une requête du ministre de l’Environnement sur la non-programmation des projets d’investissement. Le wali a ordonné par écrit au SG de programmer les dossiers dans la réunion de la commission de wilaya d’investissement. Pratiquement, on a accordé un avis favorable aux 50 projets, à l’exception de certains projets de construction de logements», précise Mohamed Hattab.
L’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahia a insisté pour prendre la parole ; le président de l’audience lui a demandé de patienter.
Ouyahia : «La correspondance de Chérif Rahmani confirme mes déclarations»
En réponse aux questions du représentant du ministère public, Mohamed Hattab a précisé que la gestion de la nouvelle ville de Sidi Abdellah ne relève pas du wali, tout en niant toute intervention du Premier ministère dans l’affaire de GB Pharma. Ahmed Ouyahia a pris la parole pour revenir sur la correspondance du ministre de l’Environnement, Chérif Rahmani, le 2 février 2012, pour la levée du gel sur les projets dans les nouvelles villes. «Ce document est une preuve que le Premier ministre n’est pas responsable du suivi des projets», insiste-t-il.
C’est au tour de Chaâbane B., directeur de Travocovia, une filiale du groupe Benhamadi, de se présenter à la barre comme témoin. Il est auditionné sur le projet de réalisation de l’hôpital régional des grands brûlés à Skikda. «Après les appels d’offres, la réalisation a été confiée à Travocovia qui a acquis le marché dans la transparence et dans le respect strict des lois, grâce à sa qualification et également la caution», dit-il.
En réponse au parquet sur le retard de la réalisation de ce projet, il a cité les multiples difficultés liées aux procédures d’études et de lancement des travaux de réalisation et la nature du terrain.
Les auditions des témoins se sont poursuivies jusqu’à une heure tardive de la soirée, sur le dossier de Condor Electronics également.
Neila Benrahal