
Le lecteur a l’occasion de partir à la recherche d’un homme qui, dans des circonstances difficiles, avait assumé une mission nationale, entraîné les siens dans la voie du sacrifice, porté des coups à l’ennemi français, réveillé chez ses semblables de nobles sentiments d’enthousiasme, d’ardeur au combat. L’Emir Abdelkader fut un jeune homme inconnu, surgi des confins de l’Ouest. Son ascension au pouvoir suprême n’était pas le fait de la naissance ni de la violence. Il répondait à l’attente d’un peuple douloureusement stupéfié par l’écroulement subit de la puissance turque. Et les poètes de l’époque, exprimant l’espoir général, souhaitaient l’avènement d’un Chérif capable de mobiliser toutes les énergies pour une lutte victorieuse contre les envahisseurs. Les candidats ne manquaient pas, mais seul le jeune Abdelkader méritait le titre de chef national.
Pour son entourage comme pour le reste des Algériens, il n’était pas le sultan, ni l’émir, titres parfois ternis par le souvenir des despotes. Pour tous, il était le « Hadj » titre commun accordé aux musulmans ayant fait le pèlerinage de la Mecque, mais qui, appliqué à un tel chef, était doublement saint et traduisait l’affection et la vénération d’un peuple. Comble de paradoxe. Il aura fallu attendre Mohammed-Chérif Sahli pour que la pleine lumière soit projetée sur l'Emir, en langue française, par l'un de ses compatriotes les plus qual fiés.
Son livre "Abdelkader, Chevalier de la foi", paru à Alger en 1946, a connu immédiatement un succès mérité. Réédité deux fois, il est maintenant épuisé. Inutile de souligner qu’il est grand temps de le remettre à la disposition du public.
Philosophe et historien, Mohammed-Chérif Sahli s'est très largement documenté. Il n'a pas voulu insister sur les compagnes militaires de l'Emir pour présenter plutôt l'homme de culture et de foi, comme l'indique le titre de l'ouvrage.
M. B.