Entrave de l’accès des agents accrédités de l’Ambassade d’Algérie en France, Bruno Retailleau : Le ministre des affaires étranges !

«L’Algérie se réserve le droit de recourir à toutes les voies légales appropriées, y compris la saisine des Nations unies, afin de faire valoir ses droits et d’assurer la protection de sa mission diplomatique en France», note le communiqué du ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l'étranger et des Affaires africaines.

Quand on voit la qualité des relations entre l’Algérie et l’Italie, on se dit que la politique est finalement quelque chose de simple : ces deux pays sont gouvernés par deux doctrines idéologiques différentes, mais cela ne les empêche pas de développer une coopération économico-commerciale dense et fructueuse. En fait, il suffit juste d’adopter un principe basique : chacun des deux pays est souverain dans sa politique intérieure tout en étant pragmatique dans sa politique extérieure. On ne mélange pas les torchons et les serviettes. En France, l’extrême-droite mélange les torchons, les serviettes et le papier-toilette. Comment peut-il en être autrement lorsqu’on constate que le ministre de l’Intérieur se mêle de questions relevant du domaine régalien du président de la République ou, par délégation, du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ? Bruno Retailleau, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est plus loquace s’agissant des affaires étrangères que des affaires intérieures dont il est censé avoir la charge. A dire vrai, il est plus particulièrement loquace en ce qui concerne l’Algérie.
Plus même : il a dépassé le stade de la parlotte pour passer à l’acte en décidant d’«entraver l’accès des agents accrédités de l’Ambassade d’Algérie en France aux zones réservées des aéroports parisiens aux fins de prise en charge des valises diplomatiques», selon un communiqué du ministère algérien des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, qui précise que «les démarches entreprises, tant à Alger qu’à Paris, ont permis d’établir que ladite mesure a été prise par le ministère français de l’Intérieur, à l’insu du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, dans l’opacité totale et sans la moindre notification officielle comme le veulent les règles élémentaires de la pratique diplomatique». En plus clair, le ministre français de l’Intérieur a été pris en flagrant délit d’ingérence dans les affaires étrangères, jusqu’à en faire des affaires étranges. Il s’immisce plus particulièrement dans les affaires algériennes. C’est que l’Algérie est devenue pour Bruno Retailleau une véritable obsession érigée en «cause nationale».
Après en avoir fait, avec succès, la thématique-phare de sa campagne électorale pour accéder à la présidence du parti Les Républicains, et en vertu du dicton très à droite «on ne change pas une thématique qui gagne», il a visiblement décidé de la reconduire dans sa campagne électorale officieuse pour l’élection présidentielle de 2027. Il s’est indûment accaparé des prérogatives d’un autre ministère, il ne va donc pas se gêner pour récupérer à son compte les thèmes idéologiques de l’extrême-droite.
Cela dit, il est curieux de constater que M. Retailleau est sélectif dans ses immixtions étrangères. Il évoque, rappelle et ressasse la thématique de l’Algérie, mais il ne pipe mot sur le génocide pratiqué sur la population de Ghaza.
Bien au contraire, il a lancé une procédure de dissolution du collectif Urgence Palestine. Le «ministre intérieur des Affaires étrangères» ne dépasse donc pas l’espace algérien dans ses outrances extraterritoriales.
Peut-être croit-il encore, dans un coin ou recoin de sa tête, que l’Algérie est encore un département français… Même en sa qualité de président du parti les Républicains, il n’a jamais dénoncé la famine imposée aux Ghazaouis par l’entité sioniste. Pis, il n’a même pas salué la décision de la France de reconnaître l’Etat palestinien en septembre prochain, annoncée par le président Emmanuel Macron. On sait déjà à quoi joue Bruno Retailleau. Reste à savoir avec quoi il joue. Avec le feu ? Peut-être. Avec les sentiments des Français ? Probablement. Avec les nerfs des Algériens ? Certainement. Là, gare à l’enjeu.

F. A.

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Communiqué intégral du Ministère des AE

Le ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l'étranger et des Affaires africaines a pris connaissance, avec étonnement, de la mesure prise pour entraver l'accès des agents accrédités de l’Ambassade d'Algérie en France aux zones réservées des aéroports parisiens, aux fins de prise en charge des valises diplomatiques. À la suite de cette mesure, le chargé d’affaires de l’Ambassade de France en Algérie a été reçu, ce jour, au siège du ministère des Affaires étrangères, afin de lui demander des clarifications à ce sujet. De même, le chargé d’affaires de l’Ambassade d'Algérie en France a pris attache avec les services compétents du ministère français de l'Europe et des Affaires étrangères. Les démarches entreprises, tant à Alger qu'à Paris, ont permis d'établir que ladite mesure a été prise par le ministère français de l'Intérieur, à l'insu du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, dans l’opacité totale et sans la moindre notification officielle comme le veulent les règles élémentaires de la pratique diplomatique. Cette mesure constitue une atteinte grave au bon fonctionnement de la mission diplomatique algérienne en France, ainsi qu'une violation manifeste des dispositions de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, en particulier son article 27, alinéa 7. Cette disposition consacre explicitement le droit reconnu à toute mission diplomatique «d'envoyer un de ses membres accrédités pour prendre livraison, directement et librement, de la valise diplomatique auprès du commandant de l'aéronef». Face à cette situation, l'Algérie a décidé d'appliquer, avec rigueur et sans délai, le principe de la réciprocité. Elle se réserve, également, le droit de recourir à toutes les voies légales appropriées, y compris la saisine des Nations unies, afin de faire valoir ses droits et d’assurer la protection de sa mission diplomatique en France.

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