Le politologue Nasser Zammit, à propos de la reconnaissance de l’État de Palestine : «Un tournant historique, oui mais…»

«C'est sans doute un tournant historique, quoique à portée essentiellement symbolique, dans le conflit en Palestine qui dure depuis soixante-dix-sept ans.» C’est en ces termes que le politologue Nasser Zammit, qualifie la vague sans précédent de reconnaissances occidentales de l'État de Palestine lors de la 80e session des Nations unies.

Le politologue, dont l'expertise se concentre sur les dynamiques du conflit israélo-palestinien et les enjeux de la reconnaissance de l'État de Palestine sur la scène internationale, contacté par El Moudjahid pour apporter son éclairage concernant l'avenir des relations israélo-palestiniennes à l'aune de cet événement majeur, indique que « la reconnaissance de l’Etat palestinien par près de 160 pays, soit plus de 80 % des membres de l'ONU, incluant des membres du G7/G20 comme la France et le Royaume-Uni, est une étape importante renforçant la légitimité palestinienne, susceptible d'accélérer l'adhésion de la Palestine comme membre permanent de l'ONU». Il rappelle que, après l'entrée en jeu de ces pays, notamment après des vagues précédentes dominées par les nations du Sud, «ce sont (désormais) quatre des cinq membres permanents du Conseil de sécurité qui reconnaissent l'État palestinien». Zammit salue d'ailleurs l'action de la diplomatie algérienne au Conseil de sécurité dans «ses efforts pour faire cesser l'injustice et le génocide subis par le peuple palestinien».

Cela étant, concernant l'avenir, le politologue émet de sérieuses réserves quant à l'impact immédiat sur le terrain, affirmant que «ces reconnaissances n'auront aucune répercussion immédiate positive sur le terrain ni pour les victimes du génocide à Ghaza, ni pour les otages israéliens». Pire encore, Zammit craint que «ce mouvement international de reconnaissance de l'Etat de Palestine ne radicalise davantage encore l'extrême droite israélienne et la pousse à accélérer et à accentuer son action génocidaire contre le peuple palestinien». Aussi, pour éviter que ces reconnaissances ne soient «contre-productives pour les Palestiniens», Zammit insiste sur «la nécessité d'une réaction rapide et concrète de la communauté internationale pour stopper Netanyahou».

Et le politologue d’énumérer des mesures radicales que l'Europe devrait prendre pour rétablir sa crédibilité : «En suspendant immédiatement l’accord d'association entre l'UE et Israël, en stoppant la suspension immédiate des ventes d'armes, en interdisant les importations en provenance des colonies illégales, en appliquant des sanctions immédiates contre les ministres et les dirigeants politiques israéliens génocidaires et enfin, en excluant Israël des compétitions internationales.» «C’est à ce prix que la communauté des nations reprendra de la hauteur et de la crédibilité face au génocide en cours. Il en va de l’avenir du monde multipolaire et de la paix dans le monde», dira-t-il enfin.

Y. Y.

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