
Annoncée par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de son allocution à la clôture des Journées de l'entrepreneuriat à Alger, le 16 novembre 2023, organisées par le CREA, au Centre international des conférences (CIC), la loi n° 23-17, fixant les conditions et les modalités d’octroi du foncier économique relevant du domaine privé de l’État, destiné à la réalisation de projets d’investissement, vient d’être publiée au Journal officiel n° 73.
La promulgation de cette loi vient comme suite logique de celle n°22-18 relative à l’investissement. Il s’agit d’une réponse apportée à la préoccupation des opérateurs économiques, à propos de la question du foncier industriel, qui représente une véritable contrainte, voire un frein à l’investissement privé, particulièrement dans le nord du pays. Durant les années antérieures, des insuffisances dans la gestion du foncier industriel ont empêché un grand nombre de projets d’investissements inscrits de se concrétiser dans les délais ou carrément d’être annulés. Aussi, la nouvelle loi n° 23-17 considère comme foncier économique, «tout bien immobilier relevant du domaine privé de l’État et/ou tout autre bien privé acquis par l’Agence algérienne de promotion de l’investissement au profit de l’État susceptible de recevoir un projet d’investissement au sens de la loi relative à l’investissement». La gestion du foncier économique sera du ressort exclusif de l’Agence algérienne de promotion de l’investissement (AAPI), via son guichet unique. L’intervention de l’administration des Domaines de l’État devra désormais se limiter aux simples procédures d’élaboration de contrats de concession et de cession suivant les décisions de l’agence. L’AAPI a l’obligation de mettre à la disposition des investisseurs, toutes les informations relatives aux disponibilités immobilières, à travers la plate-forme numérique de l’investisseur. Le foncier économique est octroyé par l’Agence, par délégation de l’État, via le guichet unique, au profit des investisseurs, par voie de concession de gré à gré convertible en cession. Au demeurant, un nouveau cahier des charges relatif à l’accès au foncier pour les investisseurs sera élaboré. En cas de non-respect des clauses par ces derniers, l’agence AAPI peut procéder «unilatéralement» à la résiliation du contrat. Ainsi, est-il devenu urgent de mettre à la disposition des investisseurs le foncier industriel indispensable, pour ne pas compromettre la dynamique dans laquelle les porteurs de projets espèrent voir s’installer en matière d’investissements, conformément à la loi n°22-18. L’aménagement de zones industrielles et de zones d’activités représente un moyen pour un regroupement de plusieurs porteurs de projets. C’est l’une des garanties pour la réussite de la politique d’investissement, en plus des incitations fiscales offertes par la loi. L'expert en économie et gouvernance, Kamel Kheffache, a donné plus de précisions sur «la loi 23-17, fixant les conditions et les modalités d’attribution du foncier économique».
À ce titre, il a indiqué que la loi sur le foncier économique, qui s’«applique au foncier relevant du domaine privé de l’État, est constitué de tous les terrains aménagés relevant des zones industrielles et des zones d’activités, de ceux aménagés situés à l’intérieur du périmètre des villes nouvelles, de ceux aménagés relevant des zones d’expansion et sites touristiques, de ceux aménagés relevant des parcs technologiques, de ceux relevant des actifs résiduels immobiliers». Aussi, des entreprises publiques dissoutes et des actifs excédentaires immobiliers, des entreprises publiques économiques, de ceux destinés à la promotion immobilière à caractère commercial, ainsi que d’autres terrains aménagés relevant du domaine privé de l’État, a-t-il analysé. Il souligne que dans le cadre de cette nouvelle loi, à travers son guichet unique, par délégation de l’État de statuer, en concertation avec les secteurs concernés et sur l’orientation des disponibilités foncières, en vue de leur aménagement, «l’Agence algérienne de promotion de l’investissement (AAPI) est chargée de gérer et de promouvoir le portefeuille foncier économique de l’État aux fins de sa mise en concession», a-t-il informé. Mais, aussi, de tenir et de «mettre à jour le fichier du foncier économique susceptible de constituer l’offre immobilière destinée à tout investisseur, que ce soit une personne physique ou morale, nationale ou étrangère, résidente ou non résidente, dans les meilleures conditions de service et de transparence», a-t-il commenté.
Enregistrement des demandes via la plateforme numérique
Pour ce faire, une plate-forme numérique renfermant toutes les informations relatives aux disponibilités immobilières est mise à disposition aux investisseurs, a-t-il ajouté. Il faut signaler également que l'AAPI, en plus des missions énumérées précédemment, est chargée de la réalisation d'autres opérations pour le compte de l’État. Selon l'expert, il s'agit, notamment, «de procéder à la prospection et à l'acquisition de tout foncier de statut privé, susceptible de servir comme assiette destinée à l'implantation d'un projet d’investissement, d'octroyer le foncier économique, relevant du domaine privé de l’État au profit des investisseurs, par voie de concession de gré à gré convertible en cession». Et aussi de «suivre et accompagner les investisseurs jusqu’à la réalisation de leurs projets d’investissement». Aussi de «participer à l’élaboration des instruments d’urbanisme, en vue d’exprimer les besoins en matière d’investissement», a-t-il analysé. Pour bénéficier d'une assiette de terrain, relevant du foncier économique du domaine privé de l’Etat, nécessaire à la concrétisation de son projet d'investissement, l'«investisseur est tenu de procéder à l’enregistrement de sa demande via la plate-forme numérique», a-t-il noté.
Dans le cadre de cette loi, l'analyste a estimé qu'il faut comprendre que l'«octroi d'assiettes de terrain aux investisseurs potentiels, via les guichets uniques de l'AAPI, se fera par voie de concession, de gré à gré convertible en cession, conformément à un cahier des charges type qui sera fixé par voie réglementaire et qui renferme des clauses administratives générales et des clauses spécifiques, en tenant compte des orientations stratégiques et de leur impact sur le développement économique et social», a-t-il précisé. Concernant les conditions d'octroi du foncier, il a expliqué que la «concession convertible en cession est consentie pour une durée de 33 ans renouvelable pour les projets d’investissement, à l’exception des terrains destinés à la promotion immobilière à caractère commercial, dont les conditions et les modalités de concession seront fixées par la législation en vigueur», a-t-il détaillé. En contrepartie, l'investisseur est tenu de «respecter les clauses prévues par le cahier des charges, notamment le non-changement de destination ou de l’utilisation de tout ou partie du terrain à d’autres fins que celles prévues par le cahier des charges, ainsi que le paiement des redevances locatives annuelles dues et les charges de gestion y afférentes», a-t-il souligné. Que sera l’apport de la loi sur l'investissement productif ? En réponse, l'économiste a estimé que cette loi permettra de «booster les investissements productifs, grâce aux facilitations accordées en matière d'accès au foncier économique et à la levée des contraintes bureaucratiques empêchant la réalisation des projets dans les délais requis», a-t-il commenté. En effet, a-t-il poursuivi, «l’introduction de l'outil numérique, en se servant de la plateforme dédiée à l'investisseur, permettra l'instauration d’un climat de transparence et équitable», a-t-il analysé. Enfin, il ajoute qu'à moyen terme, ce nouveau dispositif contribuera au «développement du tissu des PME et des filières économiques, à la diversification économique, et, par voie de conséquence, à favoriser la création d’emplois durables et de richesses hors hydrocarbures», a-t-il conclu.
Samia Boulahlib