
Entretien réalisé par : Kamélia Hadjib
Le président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (FOREM) a mis en avant un changement crucial dans la reconnaissance et le renforcement du rôle de la société civile, suite à sa constitutionnalisation en 2020, soulignant que le tournant majeur s’est opéré avec ce processus.
El Moudjahid : Comment qualifieriez-vous l’évolution du rôle de la société civile en Algérie ?
Pr Khiati : Il faut savoir que ces dernières années ont marqué une évolution significative pour le renforcement du rôle de la société civile en Algérie, une sphère encore relativement jeune dans le pays, prenant racine seulement à partir des années 1990. Toutefois, certaines avancées ont été observées, notamment grâce à la loi de 2012, qui a impulsé un certain dynamisme au sein de la société civile. Cependant, le tournant majeur s’est opéré avec la constitutionnalisation de cette société civile en 2020, lui conférant une reconnaissance officielle en tant que partenaire des pouvoirs publics et des institutions étatiques. Cette reconnaissance a été suivie d’une augmentation remarquable du nombre d’associations, passant de quelques centaines à plus de 130.000, grâce aux facilitations accordées, soulignant ainsi la volonté de l’État de faire de la société civile un acteur clé du développement à l’échelle locale et nationale. Cette reconnaissance officielle s’est accompagnée d’une volonté de favoriser une démocratie participative, encourageant la société civile à s’impliquer dans le processus décisionnel, leur accordant une voix qui est désormais écoutée.
Quelles sont, à votre avis, les mesures mises en place en vue de renforcer le rôle de la société civile ?
Outre la constitutionnalisation du rôle de la société civile et les facilitations accordées à la création d’associations, il y a eu la création d’un observatoire dédié à la société civile, ayant pour mission d’optimiser l’implication de cette dernière dans les questions liées au développement du pays. Un travail remarquable a été mené par l’observatoire, notamment à travers une évaluation minutieuse des actions et activités de cette sphère est désormais possible. Cet organisme vise à optimiser l’intégration de la société civile dans les enjeux de développement du pays. Les Assises de la société civile, prévues prochainement, représentent une première étape essentielle dans l’évaluation de ces actions, en prenant en compte les préoccupations des associations à l’échelle locale, régionale et nationale. L’Observatoire national de la société civile est actuellement à l’écoute des diverses associations issues des différentes régions du pays. Cette approche a permis de recueillir et d’appréhender les multiples préoccupations de la société civile à différents niveaux territoriaux. Les résultats de cette collecte sont aujourd’hui soigneusement codifiés, reflétant un travail remarquable de cet organe. Plus intéressant encore, une plate-forme a été mise en place, pour renforcer la place de la société civile et son rôle, et de continuer à enregistrer d’autres réalisations. Cette initiative vise à valoriser les idées novatrices issues de la société civile, les transformant ainsi en moteurs du développement économique et social du pays.
Comment la société civile est-elle intégrée dans les processus décisionnels et la gouvernance démocratique ?
Dans les décennies passées, la démocratie participative et l’engagement de la société civile étaient souvent des discours plutôt que des réalités concrètes. Cependant, la constitutionnalisation de la société et la création de l’Observatoire ont ouvert la voie à une réelle participation démocratique de la société civile, prenant en compte ses recommandations de manière continue et effective. Au cours des décennies précédentes, on a beaucoup parlé de la démocratie participative et de l’implication de la société civile. Ce n’était qu’un discours, plutôt quelque chose de réel. Aujourd’hui, il existe une volonté affirmée de faire de cette société civile un acteur et un partenaire du développement, avec des mesures et des procédures mises en œuvre, notamment par l’élaboration d’un cadre juridique, pour assurer son organisation et faciliter son implication. Le président de la République a clairement exprimé son intérêt pour la société civile, non seulement à travers ses discours, mais également par le biais de décisions d’importance capitale qui ont été concrétisées. Toutefois, il est essentiel que les collectivités locales intensifient leurs efforts, pour être davantage à l’écoute, favorisant ainsi l’expression de la société civile et, surtout, son implication dans les initiatives locales. Cela permettrait de tirer profit de sa contribution précieuse et de l’intégrer activement au développement social du pays.
Quels sont les défis auxquels la société civile est confrontée, malgré les progrès réalisés ?
Je pense que la priorité de la société civile en Algérie, c’est de s’inscrire dans le développement économique et social du pays, et de profiter des avantages offerts par l’État, pour répondre aux préoccupations de la société et de la population. Sa mission principale est de lutter contre certaines pratiques qui ont entravé son efficacité sur le terrain. À mon avis, les évolutions récentes semblent indiquer un appel croissant à la société civile pour jouer un rôle de plus en plus significatif dans l’avenir de l’Algérie, en contribuant activement au développement socio-économique du pays.
K. H.