Flambée du prix de l’oignon : Un sérieux problème de régulation

Dès le début du mois de Ramadhan, les prix des fruits et légumes ont connu une hausse inhabituelle. Un légume sort du lot, il s’agit de l’oignon dont le prix dépasse l’entendement, puisque le kilogramme frôle les 300 DA. Comment expliquer cette hausse ? S’agit-il d’une faiblesse de l’offre ? D'habitude, on en produit de très grandes quantités annuellement.

Y a-t-il un problème de stockage, de dysfonctionnement du circuit de distribution ou de régulation, en général ? Face à la situation qui caractérise l’offre de l’oignon sur les marchés à travers le territoire national, ainsi que les prix qui y sont affichés, il y a lieu de donner quelques éléments d’appréciation à même de se fixer sur cette distorsion rarement observée. Tout d’abord, en l’absence de statistiques spécifiques précises, "il y a eu probablement une chute de la production d’oignons durant la campagne agricole 2021/2022", ce qui justifie en apparence, au moins le degré relatif de rareté de ce légume sur les marchés, ont estimé, certains économistes spécialisés en agriculture. En second lieu, la spécificité de la production des fruits et légumes en Algérie, fait qu’"il y a concentration dans quelques wilayas réputées pour leur niveau élevé de production, alors que la consommation touche l’ensemble du territoire national", ont-ils commenté. Par ailleurs, il faut savoir que l’oignon sec est susceptible d’être stocké dans des conditions adéquates, contrairement à d’autres légumes très périssables.
Cette capacité de stockage, confère à l’oignon sec une sorte d’avantage au vu de sa disponibilité régulière pour la consommation. Cependant, la possibilité de stockage peut impliquer une action indirecte sur le niveau des stocks, afin de créer une relative rareté en période de forte demande, et ainsi influer sur le niveau des prix à la consommation.
Heureusement, qu’il y a la disponibilité sur les marchés de l’oignon vert (production de cette année) dont les prix sont largement moins élevés que ceux de l’oignon sec, soit 100 DA le kilogramme. D’ailleurs c’est sur l’oignon vert que des ménages ont substitué à l'oignon sec. En définitive, certains économistes, estiment, qu’il y a quelque part, "un problème de régulation" du commerce des fruits et légumes, en cette période de forte consommation.
D'autres experts ont, pour leur part, relevé les facteurs économiques. Ils estiment que la demande joue un rôle important par rapport au prix de l'oignon. La demande, à son tour, est influencée par différents facteurs, tels que les habitudes de consommation, pour le cas spécifique de l'oignon durant le mois de ramadan, la raison de la "particularité culinaire" chez les ménages, "a une part prépondérante dans l’augmentation de la demande", et par conséquent sur le prix.
Un autre facteur qui a contribué au prix disproportionné de l'oignon, c’est "la faible offre sur le marché qui peut être influencée par divers facteurs, tels que la production agricole, les conditions climatiques, les pratiques agricoles, ainsi que les coûts de production", expliquent les spécialistes en agriculture. De l'avis d'un bon nombre d'économistes, le fond du problème réside dans l'organisation de cette filière. En fait, lorsque les prix baissent, les agriculteurs s'éloignent de cette culture, ce qui entraîne une baisse de l'offre et par conséquent une augmentation des prix. En revanche, lorsque les prix augmentent, tous les agriculteurs se précipitent sur cette culture.
Ce qui entraîne une abondance sur le marché et une chute des prix. Cette boucle éternelle ne s'arrêtera pas tant que le secteur n’a pas de données à travers les réponses à ces questions sur la gestion de la production agricole : qui produit quoi, quand et en quelle quantité ? Pour sa part, l'expert dans le domaine agricole, Akli Moussouni, relève un sérieux problème de régulation.
Il rappelle que le prix d'un produit relève de la loi de l'offre et de la demande. Il soutient que l'ascension des prix à des niveaux inattendus comme le prix de l'oignon frôlant les 300 DA le kilogramme, ou de celui de la pomme de terre très prochainement, est lié essentiellement au caractère anarchique de notre agriculture, secteur où les producteurs ne sont pas organisés autour de plateformes de distribution à l'échelle macro-économique. Il convient de savoir que quand une saison est perdue pour un agriculteur qui a investi dans un produit, la saison d'après il ne renouvelle pas la culture de ce produit, ce qui concours à créer une pénurie et une hausse des prix. C'est le cas pour l'oignon, dont la récolte a été une perte sèche, note en conclusion, l'expert Akli Moussouni, précisant que les agriculteurs n'arrivaient pas à écouler leurs produits à 10 DA l'année passée !
Du coup ils n'ont pas renouvelé la culture de l'oignon, pour cette année.

Samia Boulahlib

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