Céréaliculture : Les épis du développement agricole

Le Président Tebboune a réitéré, à maintes reprises, l'objectif stratégique de la sécurité alimentaire du pays. Dans ce cadre, le ministère de l'Agriculture mise sur une nouvelle démarche à même de concrétiser les objectifs de l'autosuffisance alimentaire.

La céréaliculture demeure une filière stratégique qui retient le plus l'attention des pouvoirs publics, tant les contraintes sont nombreuses à son développement. Les objectifs de la stratégie nationale concernant la filière céréales ont été présentés lors d'une rencontre qui s'est déroulée à l'École nationale supérieure d'agronomie (ENSA), en présence du ministre de l'Agriculture, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, ainsi que du ministre de l'Industrie et de la Production pharmaceutique. C'est une commission multisectorielle composée de spécialistes et chercheurs qui s'est penchée sur l'élaboration d'un diagnostic de la filière céréales, suivi d'un plan d'action, à même de redonner un nouveau souffle à la production céréalière pour la saison 2023/2024. L'objectif recherché est d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. Parmi les mesures préconisées figurent l'amélioration de la qualité des semences ; l'accroissement des rendements à l'hectare ; l'extension des superficies consacrées à la culture du blé et de l'orge ; l'augmentation des superficies en irriguées et le recours à la recherche scientifique. A ce titre, de grandes surfaces seront mises en œuvre au Sud, pour atteindre les rendements d'échelle et ce, grâce à une forte mécanisation et l'irrigation rationnelle. De grands groupes publics contribueront à ce redéploiement de la céréaliculture dans le grand Sud avec la mobilisation d'importants moyens. Interrogé sur la question, l'expert Laala Boukhalfa, a indiqué, à ce propos que le dossier lié au développement de la céréaliculture, s'inscrit dans le cadre du programme visant la sécurité alimentaire, dès lors que l’Algérie continue toujours à compter sur les importations des céréales, pour satisfaire les besoins nationaux. Dans ce cadre, avec les orientations du Président Tebboune, la problématique de la sécurité alimentaire est devenue une priorité, devant contribuer ainsi à la réduction sensible des importations de céréales, coûtant au Trésor public un montant annuel avoisinant trois milliards de dollars.

Développer l’agriculture saharienne

Lors des divers conseils des ministres, le Président Tebboune a donné une "importance capitale au développement de cette filière, tout en s'orientant, notamment vers l'agriculture saharienne, où toutes les conditions sont réunies, notamment les terres fertiles, l'eau et l'énergie. Étant donné qu'au niveau du Sahara, le rendement attendu peut aller jusqu'à 80 quintaux à l'hectare, alors qu'au nord, le rendement moyen n'excède pas les 17 quintaux à l'hectare, a-t-il analysé. Pour la réalisation de ce programme, cet économiste, a estimé qu'il fallait la "contribution de plusieurs ministères", notamment le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique pour le "transfert du savoir-faire au secteur agricole, dans l'esprit de passer de l'agriculture traditionnelle à l'agriculture technologique", a-t-il noté. Et ce, a-t-il ajouté par l'application "des nouvelles techniques innovantes, notamment l'irrigation intelligente, le choix de semences suivant la nature du sol et du climat, le choix des engrais, le temps de leurs utilisations, et enfin le respect général des itinéraires techniques de l'agriculture et ce, en s'appuyant, sur diverses thèses et thèmes réalisés par les universitaires, au lieu de les conserver dans les tiroirs des universités", a-t-il préconisé. Outre le rôle du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, la mission du ministère de l'Industrie est aussi importante pour booster cette filière stratégique. Ce département doit mettre à la "disposition des agriculteurs, le matériel agricole nécessaire pour le développement de l'agriculture, notamment les engins, les tracteurs, le matériel destiné pour l'irrigation intelligente, tels que les pivots", a-t-il expliqué. Concernant le ministère des Ressources hydriques, ce dernier doit, à son tour, "faciliter l'accès à toute ressource hydrique au profit des agriculteurs, par l'exploration de forages, la réalisation de stations des eaux usées, l'entretien des barrages et l'accélération des opérations de dessalement des eaux de mer", a-t-il commenté. En conclusion, l'expert a souligné que "la conjugaison des efforts de ces divers ministères contribuera effectivement au développement de la céréaliculture dont le gouvernement vise à atteindre l'autosuffisance dans un laps de temps relativement court et, pourquoi pas, être excédentaire pour s'inscrire dans le cadre des exportations", a-t-il analysé.

Promouvoir l’industrie agroalimentaire

Pour sa part, Mohamed Hadj Henni, conseiller en Organisation et systèmes agricoles et vice-président du GRFI Filaha, a indiqué : "Si je dois résumer à travers un examen, a priori, sur l’appréciation des produits céréaliers dans la vie quotidienne de la population, le poids de ce secteur dans les dépenses engagées des importations est très important. Une analyse en termes d’évolution de la production, des rendements et du taux d’autosuffisance, est ensuite entamée dans ce nouveau plan du ministère de l’Agriculture, a-t-il commenté. Il en résulte en définitive que la "production céréalière a connu une faible croissance comparativement à la consommation qui a fortement augmenté sous l’effet de la croissance démographique et du soutien par l’État des prix à la consommation. Conséquence : déconnexion de l’industrie céréalière de la sphère de production locale", a-t-il analysé. Il a estimé que les saisons céréalières revêtent le "caractère de dépendance en majeure partie du niveau de la pluviométrie enregistrée chaque année, puisque la plupart des espaces céréaliers au nord et sur les hauts plateaux sont cultivés en sec". Soulignant, à ce propos qu'a l’exception de l’OAIC, partie prenante des cultures et de l’industrie céréalière, quelques industriels dans la transformation interviennent également par des cultures de blés dur et tendre dans le sud du pays. Plus précis, l'expert a ajouté que "la production des céréales, jachère comprise, occupe environ 80% de la superficie agricole utile (SAU) du pays, la superficie emblavée annuellement en céréales se situe entre 3 et 3,5 millions d’hectares. Les superficies annuellement récoltées représentent 63% des emblavures. Elle apparaît donc comme une spéculation dominante". Comment organiser l’industrie agro-alimentaire autour des pôles des cultures céréalières que compte adopter le ministère de l’Agriculture et comment inciter l’investissement local et étranger dans l’élargissement projeté à une superficie d’un million d’hectares au sud du pays ? Le programme du ministère s’avère assez "vaste dans le développement de cette filière, nonobstant le soutien et les subventions qu’il met à la disposition des agriculteurs. L’investissement étranger, comptant sur la Turquie, les USA, la Chine et, à une moindre considération, d’autres pays intéressés, est appréciable en certains endroits. Les entreprises publiques telles que la SAPSEC, GIVAPRO SONATRACH Agro, Cosider Agro, etc. sont parties prenantes. Invitées par le ministère de l’Agriculture, elles vont connaître les mêmes avantages que les agriculteurs traditionnels. Si nous insérons ce plan dans celui de la relance globale de l’économie algérienne, nous allons voir comment l’Algérie a adopté un train de mesures qualitatif qui va placer l’agriculture au même diapason que celui du développement de son industrie pétrolière et gazière, pour l’engager dans la voie de la modernisation de ses ressources, sécurité alimentaire oblige.

Samia Boulahlib

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