
Les réformes financières ont pour objectif l’implémentation d’un nouveau mode de gouvernance au sein des banques publiques. Il s’agit d’aller vers un management bancaire qui cadre avec les orientations économiques du pays, et ses objectifs de développement.
En conséquence, il sera question de «mettre en place un dispositif permettant le financement pérenne et efficace de l’économie nationale en sortant du carcan du financement de l’import-import pour aller vers le financement des projets productifs pour accompagner les Pme et les start-up», a affirmé dans ce sens le Premier argentier du pays. Cette logique qui consiste à «aller du budget au marché», pour reprendre les propos d’un ancien ministre des Finances, suggère l’ouverture de capital de banques publiques, une option qui s’avère être le moyen tout indiqué, dans le contexte actuel, pour drainer des ressources complémentaires qui permettent de consolider les fonds des banques publiques, et leur capacité de financement de l’économie. Il faut rappeler que cette orientation a déjà été évoquée dans un rapport datant de juin 2004 intitulé «Secteur financier : situation actuelle et axes de réforme». Ce document qui expliquait la vision de l’époque, du département des finances sur la réforme financière et bancaire, avait proposé une démarche consistant à «maintenir certaines banques dans la sphère publique et d'ouvrir le capital d'autres». Le maintien de certains établissements financiers sous l’autorité de l'Etat était justifié alors par le fait qu’il permettrait à l'Etat de «disposer d'instruments d'appui à sa politique économique en direction de secteurs économiques» tels que l'habitat, l'agriculture et l'énergie, mais aussi de «support à sa politique de régulation sectorielle». Aujourd’hui, les données sont différentes car le pays fait face à une crise économique et financière inédite, et il est évident que les banques, qui ne peuvent plus déroger au principe de rentabilité et d’efficience ont besoin de consolider leurs fonds. En fait, le système bancaire dont la réforme constitue la clé de voûte des réformes économiques, n’est plus en mesure d’assumer seul le financement de la croissance. Et c’est pour soutenir ce rôle que le gouvernement a décidé l’ouverture de capital de banques publiques, à travers la Bourse pour justement attirer les capitaux privés vers les banques, mais aussi, pour améliorer la qualité de l’intermédiation financière. Le redéploiement du secteur bancaire est en effet dicté par les impératifs de la transition économique qui exigent l’adaptation du système financier au projet national de développement. Dans cette logique de marché, et dans un contexte de déficit budgétaire,
et de contraction des ressources de l’Etat, l’option d’ouverture de capital de certaines banques publiques s’avère incontournable dans ce sens qu’elle permettra aux banques de consolider leur portefeuille, et à l’Etat de se consacrer à ses engagements. Les experts qui soutiennent cette démarche s’accordent sur le fait que cette décision du gouvernement s’avère impérative, et constitue surtout une alternative au financement par le budget, et une réponse à une situation exceptionnelle (amenuisement des ressources de l’Etat, une dette publique pesante, et des déséquilibres macroéconomiques qu’il faudra contrôler).
D. Akila
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Abderrahmane Benkhalfa, analyste financier
«La restructuration prime»
L’ouverture du capital des banques publiques, annoncée par le ministre des Finances, charrie avec elle une série de questions. S’agit-il d’une démarche inévitable dans la conjoncture actuelle ? Est-elle exempte de risques ? Réussira-t-elle à booster un marché boursier atone ? Sollicité par nos soins, l’analyste financier, Abderrahmane Benkhalfa relève, tout de go, que c’est une «opération salutaire inscrite au chapitre des réformes structurelles engagées». L’opération qui consiste à vendre une partie du capital existant, ou l’élargir, fourmille d’avantages dont la participation à la modernisation de la gouvernance, au développement de la banque, ainsi que l’apport de capitaux nouveaux. Cependant, son aboutissement «exige une viabilisation du portefeuille des banques pour que la valeur de cessions soit profitable, économique et non de dimension de service public». Aux yeux de l’expert, la double mission des banques «doit être atténuée», précisant que les pays qui sont passées par cette phase ont, d’abord, procédé à une «restructuration bancaire avant d’ouvrir le capital». Cette réorganisation, explique-t-il, est une «ingénierie importante consistant à sortir des portefeuilles des banques les engagements à connotation sociale ou de service public, pour les mettre dans une institution spécialisée qui aura à poursuivre les engagements actuels». Ainsi, ne seront laissés dans les établissements bancaires que les engagements à caractère commercial. Enchaînant, l’analyste financier affirme mordicus que ladite ouverture «n’est pas une opération financière pure», mais «devra se faire avec la Bourse et des partenaires, appelés actionnaires de référence, qui apportent, au-delà des capitaux, une technologie d’exploitation, un management nouveau et, par dessus tout, apporter un souffle nouveau à la banque». A coup d’arguments percutants, M. Benkhalfa recommande également dans son analyse une «radioscopie dans les portefeuilles des banques existantes afin de leur permettre de se positionner comme acteur incontournable du marché avec une mission bien précise».
Fusion des banques publiques : un risque managérial et financier
Interrogé sur l’éventuel impact de la crise de liquidité, l’analyste indique que l’ouverture annoncée est un «signal fort de l’ouverture de l’économie et non une opération banale de collecte de sources de liquidités». Notons par ailleurs que certains experts se disent favorables à une fusion de banques publiques pour en arriver à deux ou trois et à plus d’efficacité. Mais M. Benkhalfa oppose un regard différent. Cette fusion court, selon lui, un «risque managérial et financier important». Et l’analyste préfère une «restructuration que d’aller augmenter la taille des banques qui suppose un mode de gouvernance et des instruments de gestions plus importants».
En d’autres termes, il est question de moderniser les banques, d’ouvrir leur horizon, améliorer leur actionnariat, et les mettre au diapason des standards universels.
Par ailleurs, M. Benkhalfa voit d’un bon œil l’apport de cette ouverture sur la dynamisation de la Bourse, précisant que cette dernière, actuellement sous-dimensionnée, nécessite un nombreconsidérable d’émetteurs plus importants. Pour l’analyste financier, il est plus que jamais temps d’«introduire en Bourse de grandes entreprises activant dans l’énergie, l’industrie ou les services, et des banques privées et publiques afin de donner crédibilité à la Bourse et attirer les capitaux». La Bourse, explique M. Benkhalfa doit également développer sa relation, jusque-là binaire, avec les banques tout en incluant les courtiers en Bourse, les sociétés à capital variable, les intermédiaires en opération boursière… et les conseillers privés.
Fouad Irnatene
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Omar Berkouk, expert financier
«Tenir compte des difficultés de réalisation»
L’annonce faite par le ministre des Finances de l’ouverture de capital de deux banques publiques, à travers la Bourse, sans les désigner, au courant de 2021 continue de susciter le débat sur une question qui n’a pas encore livré tous ses dessous. Sollicité pour davantage d’éclairages à ce propos, l’expert financier, Omar Berkouk a tenu à préciser que «La décision des pouvoirs publics d’ouvrir le capital des banques publiques répond au moins à deux impératifs de l’économie nationale». Il s’agit, a-t-il souligné, de «Ceux des besoins de financement public», qui incluent les «déficits budgétaires», et les «soutiens à la trésorerie et aux projets d’équipement des PME», et en second lieu, «Ceux de l’économie privée» notamment, les entreprises et les ménages». Dans le même ordre d’idées, il a rappelé que «la situation globale des banques publiques a été fragilisée par la crise économique qui a débuté en juillet 2014, et par l’accumulation des crédits non performants», et que «la crise sanitaire mondiale de 2020 a accentué leurs difficultés».
En conséquence, «elles sont aujourd’hui dans l’impossibilité de remplir correctement leurs missions et si la crise persistait, certaines d’entre-elles poseraient la question de solvabilité». Revenant sur les principales mesures prises par la Banque centrale, pour permettre aux banques publiques de consolider leurs fonds, l’expert a indiqué que «la Banque centrale a utilisé ses «outils» de politique monétaire pour les aider à retrouver de la liquidité (taux de réserves obligatoires 3%, taux directeur 3%, actions sur l’Open Market). Mais, leurs fonds propres ne sont plus en adéquation avec leurs engagements».
En définitive, « Il faut donc ouvrir leur capital par augmentation du capital social qui ne sera pas suivie par l’Etat, qui ne peut plus jouer les pompiers du secteur public (EPE et financier), selon l’expert. Cependant, l’expert tient à souligner que «cette volonté d’ouverture du capital va se heurter aux difficultés de réalisation : Que valent ces banques, à qui les vendre et comment ?».
Autant d’interrogations qui restent à élucider.
D. Akila
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Souhil MEDDAH, expert financier
«Le secteur bancaire doit reprendre son rôle de base»
- El Moudjahid : Le ministre des Finances a fait part récemment de l’ouverture du capital de deux banques publiques au courant de 2021. Sur quelle base seront sélectionnées ces banques ?
L’ouverture du capital d’une entité publique, quel que soit sa taille ou son domaine de compétence, dépend de deux critères fondamentaux. Le premier critère s’oriente et avance en fonction de la tendance économique adoptée et mise en œuvre. Dans le cas où l’Etat décide de s’engager ou non sur une voie purement libérale, ou même semi-libérale. Une telle mutation pousse naturellement les pouvoirs publics de se désengager sur certains segments qui exclusivement sont considérés comme des outils nécessaires à l’économie. Le secteur bancaire est un instrument pertinent et impératif qui doit reprendre son rôle de base, celui du financement du secteur économique, mais aussi et dans le cas présent, de s’adapter aux futurs besoins en politiques utiles pour accompagner et compenser les demandes de tous les agents économique, qu’ils soient operateurs ou consommateurs. D’autre part, le deuxième critère qui en même temps est complémentaire au premier, se mesure dans les agrégats de financement, de gestion et de rendement d’un investissement pour les investisseurs potentiels (offreurs de financement, actionnaires, acheteurs de titres, etc.).
Il s’agit aussi du critère le plus important pour le lancement et l’aboutissement de l’opération, qui doit s’appuyer sur un potentiel de financement en épargne institutionnelle et/ou privée disponible, sachant que la décision d’investir ou d’achat de titres est influée par d’autres critères, qui sont le prix de l’action, l’état de l’équilibre financier de l’entité, avec ses droits et ses engagements, le stock des valeurs réalisables et la solvabilité vis-à-vis des dettes diverses.
Ensuite la rémunération sur dividende et le rendement sur valeur titre sont aussi des indicateurs très importants que les spécialistes du marché ou n’importe quel actionnaire lambda doivent prendre en considération dans leur décision d’achat. L’éligibilité des banques pour leur admission sur le marché financier d’une part et sur le portefeuille des actionnaires potentiels, est conditionnée par l’état des compartiment des créances et des dépôts à l’actif des bilans de ces banques et, leur influence surtout future sur l’état de leur passif, vis-à-vis des fonds propres, des dépôts palpables et engagements, de la base des réserves fractionnaires, qui représente l’outil de création des crédits par les banques au profit de leurs clients. Il est également très important de situer le rôle de ces banques sur la scène économique nationale et internationale afin de pouvoir valoriser leur admission en bourse par rapport aux valeurs futures qu’elles proposent. - Cette décision a fait l’objet de réserves. Pourquoi à votre avis ?
Pour une banque qui est constituée d’un capital qui dépasse les 20 milliards de dinars en valeur nominal, il est clair qu’un tel cumul de deux institutions suscite des réserves. Car il faut savoir que pour chaque introduction en bourse, l’entité concernée propose généralement une action à un prix qui dépasse de trois, quatre ou cinq fois sa valeur nominale. A ce titre, tous les indicateurs macro-économiques doivent faire l’objet d’une étude préalable, afin de mesurer le potentiel et les limites de l’épargne existante d’une part et, aussi des autres segments de marché financier qui doivent de leur part passer sur l’espace de la capitalisation-titrisation, comme pour les PME, qui de leur côté ne demande pas une capacité de financement aussi importante. Il est également utile, d’étudier la faisabilité de cette décision d’ouverture de capital, par rapport aux besoins financiers imminents. - La conjoncture actuelle est-elle propice au recours au marché des capitaux pour mobiliser des ressources ?
En règle générale, en temps de crise ou pendant la rareté des ressources, le marché financier ne peut être facilement sollicité. Car les ressources de ce marché sont, soit affectées vers d’autres centres de dépenses, soit elles deviennent rares sur le marché des échanges, ou sont tout simplement épargnées par mesure de sécurité ou par effet de panique. A mon avis, il serait beaucoup plus utile et très réaliste d’aller vers la politique d’ouverture de capital pour les branches d’activités, qui sont des spécialités cadrées pour des domaines précis. Exemple, l’activité leasing, ou une activité spéciale mudharaba, etc. - A quels agents s’adresse cette ouverture partielle de banques publiques, l’argent informel n’est-il pas en définitive ciblé à travers cette décision des pouvoirs publics ?
Les opérations de capitalisation par une levée en APE, ou sur cession des titres en OPV, s’adressent beaucoup plus aux personnes physiques privées ou morales institutionnelles qui ont l’habitude d’activer dans ce domaine. Ce type d’opérations reste fondamentalement une action business qui s’inscrit dans un cadre micro-économique qui implique institution, entreprise, operateur et investisseurs. Par contre, la lutte contre l’informel qui touche principalement le circuit fiscal, nécessite une politique d’inclusion qui associe le contrôle de la sphère marchande du détail réel, avec notamment l’incorporation du consommateur comme acteur d’orientation et d’influence au profit de cette politique d’inclusion, en utilisant plusieurs instruments, tels que le e-paiement et le m-paiement.
Propos recueillis par D. Akila
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Mohammed Boukhari, professeur en économie
« Il y a déconnexion entre le contexte économique et l’activité boursière »
- El Moudjahid : Le ministre des Finances a fait part récemment de l’ouverture du capital de deux banques publiques au courant de 2021. Quels seraient les critères et conditionnalités qui devraient prévaloir dans le choix de ces banques ?
Mohamed Boukhari : Pour des raisons de contextualisation, je souhaite rappeler qu’il s’agit d’une ouverture de capital minoritaire et non d’une privatisation. Cela suppose aussi d’exclure les capitaux étrangers pour des questions de souveraineté évidentes. Nous éviterons ainsi un scénario à l’égyptienne, années 1990-2000, où l’ouverture aux capitaux étrangers n’a eu qu’un effet très limité sur la performance du secteur bancaire et le financement de l’investissement productif dans ce pays. Il faut rappeler que l’objectif premier des capitaux étrangers reste et restera la rentabilité. Selon l’intervention du ministre des Finances, cette ouverture du capital vise essentiellement à dynamiser le marché financier (la Bourse), tout en contribuant à l’amélioration de la gouvernance des banques publiques par l’apport d’expertise, d’expérience et de réseau de l’administrateur représentant les nouveaux actionnaires. Si le second objectif paraît d’emblée acquis dès l’ouverture effective du capital, intérêt mercantile smithien oblige, le premier ne l’est pas forcément. Une façon de faire serait de jouer sur l’attractivité des actifs pour inciter à l’investissement boursier. Cette approche simple peut être utilisée pour sélectionner les banques candidates à l’ouverture du capital. L’attractivité pour les actions d’une banque, hors conditions de marché, se détermine généralement par les critères de performance et de pilotage. Le pilotage est synonyme de gouvernance (conseil d’administration, transparence). La performance reflète principalement les aspects : financier, client et innovation. Je recommande au gouvernement d’établir une grille d’évaluation à partir de ces critères pour sélectionner les deux lauréates. - Des experts ont exprimé des réserves par rapport à cette démarche. Pourquoi ?
La démarche reflète la volonté des pouvoirs publics de faire bouger les choses et d’aller vers un changement bénéfique pour l’économie nationale. J’estime que pareille attitude est louable et mérite d’être soutenue. Reste que vouloir dynamiser le marché financier par l’ouverture du capital de deux banques publiques n’est pas suffisant. L’ouverture devrait concerner d’autres établissements financiers et particulièrement les entreprises publiques qui sont en grande partie défaillantes. L’apport en capital et l’amélioration de la gouvernance sont des impératifs pour ces dernières. - Le contexte actuel favorise-t-il le recours au marché des capitaux pour mobiliser des ressources. En fait, l’argent informel n’est-il pas en définitive ciblé à travers cette décision des pouvoirs publics ?
Il faut savoir qu’aujourd’hui, il y a une certaine déconnexion entre le contexte économique et l’activité boursière. C’est l’épargne et l’anticipation des épargnants qui conditionneront le succès. Aussi, force est de constater que les marchés financiers se portent plutôt bien malgré les aléas du COVID-19. Je ne vois pas de mal à cibler l’argent de l’informel. L’inclusion financière est une très bonne chose pour l’économie nationale, surtout que l’informel en représente quasiment la moitié. En revanche, il est impératif de discerner l’argent «sale». Les efforts devraient être redoublés pour barrer la route à toutes velléités de blanchiment d’argent sous couverture d’investissement en bourse. - L’ouverture du capital de banques publiques obéit à des préalables. Quels devraient être les priorités à ce niveau ?
La dynamisation du marché financier et l’amélioration de la gouvernance des banques font partie du plan de réformes financières. D’autres mesures suivront, j’en suis convaincu. Concernant l’expertise, il est évident que c’est un impératif avant toute introduction en Bourse. En particulier, il s’agit d’élaborer des règles d’évaluation du prix de vente et d’instituer une commission indépendante d’évaluation. A cela, il faut absolument ajouter des règles visant la conservation des intérêts nationaux et le développement de l’actionnariat salarié et populaire. Sur ce point, je tiens particulièrement à souligner l’importance d’éviter tout actionnariat étranger (entité étrangère installée en Algérie) afin d’éviter le scénario égyptien des années 1990-2000. Dans une seconde phase, quand le marché financier national sera suffisamment développé, les capitaux étrangers seront les bienvenus. La restructuration est une option que j’ai toujours défendue. Nous avons besoin de consolider le système bancaire public pour créer des entités capables de faire face à la concurrence étrangère et de se projeter à l’international. Cela étant, les choses peuvent se faire en parallèle. L’ouverture du capital n’empêche en rien la consolidation si elle est dans l’intérêt des actionnaires, surtout qu’elle est minoritaire.
Propos recueillis par D. Akila
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ECLAIRAGE
Alternative
Le système bancaire algérien a montré ses limites et son essoufflement face à la situation économique difficile du pays et au déséquilibre des fondamentaux macroéconomiques. La crise sanitaire de la Covid-19 et la chute des prix de pétrole, ont compliqué davantage une situation déjà difficile. Comment tirer parti de la réforme du système bancaire et en obtenir du profit ? Telle est l'interrogation principale des professionnels du secteur des Finances, des experts financiers et des économistes. Selon les indicateurs, le système actuel a enregistré des retards importants pour se moderniser, avec notamment un impact négatif sur le financement de l'économie. De plus, le système bancaire algérien souffre de la faible taille de ses institutions avec des problèmes qui entravent l’amélioration de l’efficience de l’activité de financement de l’économie réelle, ceci en plus du retard enregistré sur le développement de l’activité bancaire notamment à l’international. Réussir le saut technologique est un autre défi à relever. Les dispositifs de gouvernance financière aussi doivent être améliorés. C'est un énorme chantier qui doit impliquer tous les acteurs concernés de près ou de loin. La régulation de la vie financière, son organisation globale ne doit plus relever que des seuls professionnels, mais aussi des investisseurs, des entreprises et des particuliers qui jouent un rôle important. Le défi du financement de l'économie, surtout avec le lancement à venir du Plan de relance qui vise la diversification, change la donne de manière fondamentale pour tout le secteur bancaire, appelé aujourd'hui plus que jamais à tenir compte de la réalité économique du pays. De nombreux experts économiques et financiers estiment qu’une restructuration du système bancaire est nécessaire pour renforcer sa solvabilité, améliorer sa profitabilité en vue de consolider sa capacité de résilience face à des chocs, et ce, à travers une série de mesures. Ils évoquent entre autres la révision de la loi bancaire et le changement du cadre réglementaire et juridique. Un alignement aux normes internationales et une orientation axée sur l’ouverture à l’international. Se soumettre aux règles de transparence et de diversification des ressources financières, en ciblant l’émission de titres sur le marché obligataire. Ce qui contribuera à développer le marché obligataire domestique et approfondira le marché financier dans sa globalité. Il y a aussi le volet de la concurrence bancaire, qui devrait jouer en faveur du renforcement de la solidité du secteur. Concernant la crise de liquidité, elle montre combien les banques algériennes sont plus fragiles et vulnérables, quand les ressources collectées sont insuffisantes pour financer les particuliers et les besoins d’investissement et d’exploitation. Dans ce contexte, les ressources collectées auprès des particuliers sous formes d’épargne et autres, des entreprises et même des ressources d’ordre budgétaire, sont insuffisantes pour assurer un financement normal des besoins d’investissement. Néanmoins, le financement a atteint un niveau assez élevé ces dernières années, tiré par la croissance économique, qui a malheureusement flanché, depuis l'été 2014, sans pouvoir générer les liquidités suffisantes permettant de soutenir financièrement les banques. De même, le marché parallèle et les importations absorbent une grande partie de la liquidité et de l’économie. À ceux-ci s’ajoute la situation des entreprises qui plaçaient de l’argent chez les banques, et qui traversent aujourd’hui une situation difficile. Ils recommandent dans ce contexte de déficit budgétaire, et de contraction des ressources de l’Etat, l’option d’ouverture de capital de certaines banques publiques comme une alternative au financement par le budget, et une réponse à une situation exceptionnelle.
Farid Bouyahia