Le Président de l’Association de protection et d’orientation du consommateur Mustapha Zebdi, à El Moudjahid : «Le non-contrôle risque de causer un préjudice sanitaire au consommateur»

El Moudjahid
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«Le non-contrôle risque de causer un préjudice sanitaire au consommateur»
 
El Moudjahid : La friperie est devenue, ces dernières années, la plaque tournante des Algériens, pas seulement des familles de la couche  moyenne. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
Mustapha Zebdi :
 «Certes, la friperie est devenue un des produits les plus demandés, pas seulement par la couche défavorisée mais aussi par la couche moyenne. Ce phénomène s'explique par deux raisons essentielles : la première est la qualité de ses produits qui est meilleure à ce qu'on trouve sur notre marché, et la seconde chose c’est la baisse du pouvoir d'achat avec ses lourdes conséquences sur les comportements et les traditions commerciales des familles qui optent pour des articles moins coûteux.

El Moudjahid : Les magasins des vêtements usagés ont vu leur nombre augmenter en Algérie. Ne pensez-vous pas que ce genre de commerce est à même de porter atteinte à la production nationale, pour un pays comme l'Algérie qui continue d’importer plus de 90% de vêtements de l’étranger avec un montant dépassant les 400 millions de dollars, selon certaines sources ?

Mustapha Zebdi : «Il faut souligner d'abord que l'importation de ce type de vêtements est interdite,  en Algérie, depuis plusieurs années, plus exactement depuis 2009.
La nomenclature des biens interdits par la loi de finances complémentaire de la même année, a intégré ce produit parmi la liste des articles concernés. Ceci, a ouvert la voie aux contrebandiers spécialisés dans l'importation et la vente de vêtements deuxième main.
Cette mesure visait, à l'époque, la promotion de la production nationale et ça n'a jamais été un problème de santé publique. Si le stockage et la désinfection des vêtements usagés se faisaient de manière convenable, les vêtements en question ne représenteraient certainement pas de danger. Malheureusement, depuis l'interdiction d'importation de la fripe, nous n'avons pas vu l'industrie du textile avancer, encore mieux, constituer l'alternative, d'autant plus que l'interdiction d'importation des vêtements usagés était une occasion en or pour la relance du secteur. Il faut savoir aussi que la production nationale ne couvre actuellement que 10% des besoins de la population et tout ce qu'on trouve sur le marché national comme vêtements d'occasion ont pour source la contrebande. Il faut souligner qu'il y a une offre, mais également, une demande importante. Cette demande ne peut être satisfaite qu'à travers la multiplication des magasins de friperie.

El Moudjahid : L'érosion du pouvoir d'achat explique  aujourd'hui, l'engouement suscité par ces magasins, pourtant ces vêtements, dont on ignore la provenance jusqu'à atterrir dans les magasins en question, peuvent nuire à la santé du consommateur. Quelles sont les mesures à prendre pour éviter des problèmes de santé ?
Mustapha Zebdi :
 «Le non-contrôle de ces vêtements usagés risque effectivement de porter un préjudice sanitaire au consommateur. Le risque existe d'autant plus que cette marchandise est écoulée par des  contrebandiers dont on ignore tout, partant de l'identité de ces derniers jusqu’aux circuits utilisés. Pour remédier à cela, nous avons demandé, depuis plusieurs années, de lever l'interdiction pour deux  raisons essentielles.
Premièrement : la relance du textile au même titre que l'industrie de la chaussure n'a pas eu lieu comme on l'espérait. La production nationale en la matière n'a pas changé. Bien au contraire, de nombreux ateliers de chaussures, ont fermé. Une chose est sûre, puisque nous assistons toujours à une invasion de cette friperie sur le marché, mieux vaut la contrôler et effectuer les tests sanitaires pour protéger la population. En d'autre termes : Nous demandons  que l'importation de la friperie soit réglementée pour la contrôler.

El Moudjahid : Avez-vous une estimation du marché de la friperie (nombre d'importateurs et valeur du marché)?

Mustapha Zebdi :
 «Nous n'avons pas de données.  C'est une activité non autorisée et non réglementée donc, il est difficile de fournir une estimation, mais nous pensons qu'ils sont des milliers.»
 S. D.
 
 
 

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