Retracer l’histoire coloniale entre l’Algérie et la France, tel est l’objectif du professeur et spécialiste de l’Algérie, Gilbert Meynier qui à travers deux siècles a mis en relief la complexité de l’histoire croisée entre ces deux pays. Parallèlement, il a battu en brèche le mythe des occasions manquées d’accéder à l’indépendance bien avant 1962, selon certains spécialistes qui avançaient cette thèse.
Dans son livre, Meynier a rapporté tous les événements qui ont jalonné cette période en se basant sur une solide et prolifique bibliographie.
Avec mesure et des critiques fondées, l’auteur a su relater, sans parti pris, l’histoire avec ses zones d’ombre et ses hauts faits. Tout au long de son analyse, il a mis en parallèle les partenaires, l’Algérie et la France, en soulignant leurs divers aspects politiques économiques et culturels.
Il s’insurge contre la France coloniale qui proclame les valeurs de la Révolution française de 1789, alors qu’elle les a bafouées et utilisées comme instruments de séduction et de pouvoir pour assurer sa domination.
Ce qui a permis l’émergence « En Algérie d’une propension réactionnelle à s’arrimer aux valeurs refuges de l’islamo-arabité qui furent d’autant plus proclamées qu’elles avaient été davantage déstabilisées. Les Algériens ont regardé à la fois vers l’est islamo-arabe et vers le nord français.
Leur particularité n’est-elle donc pas qu’ils auraient été quelque part tiraillé par une double identification ou par une double conscience ? », selon les propos de cet historien.
Gilbert Meynier estime que ni les Algériens ni les Français n’ont le monopole de l’histoire de l’Algérie. Il exhorte à plus de compréhension de part et d’autres et émet le souhait d’un manuel franco-algérien réalisé par des historiens des deux rives.
A ce sujet, il fait un parallèle avec l’Allemagne « Peut-on émettre le vœu que, dans la sérénité, soit méditée la possibilité d’aboutir un jour à un équivalent franco-algérien du manuel d’histoire franco-allemand qui a tenté de donner au début du XXIe siècle une histoire à deux voies conciliées surmontant un contentieux plus que séculaire ?
« Même si les chercheurs algériens ne disent pas forcément la même chose, et, même si dans les rangs respectifs, il y a des divergences mais aussi des débats, l’histoire commune franco-algérienne est si dense que toutes les tentatives d’échanges doivent être encouragées. »
Un vœu, qui, même s’il dégage quelque sentiment de réticence, pourrait se réaliser à condition que certains problèmes soient résolus, notamment celui de la repentance.
Il est à signaler que cet ouvrage a paru deux mois avant le décès de Gilbert Meynier.
Un document intéressant qui rappelle cette longue histoire mouvementée de la colonisation française.
Kheira Attouche
