Tourisme médical  - Chakib Kouidri, DG d’Inkop : «La destination Algérie se porte bien»

Ph. : B.B
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Entretien réalisé par : Kamélia Hadjib

Le directeur général de l’Inkop, entreprise initiatrice du 1er Salon international du tourisme médical et de l’investissement dans les structures de santé (Clinvest-Expo), revient sur l’importance de cet évènement, organisé simultanément avec la 22e édition du SITEV. Spécialiste dans la diplomatie économique, Chakib Kouidri fera part de la mise en place d’un réseau africain des établissements de soins de santé dans un objectif de promouvoir de tourisme médical en Algérie.

 
El Moudjahid : Quel est l’objectif visé à travers l’organisation de ce Salon, le premier du genre en Algérie?
 
Chakib Kouidri : En fait, l'événement, organisé en collaboration avec le Conseil du Renouveau Economique Algérien (CREA), consiste à promouvoir la destination Algérie en termes de soins. C’est un Salon qui vise à vulgariser et faire connaître le tourisme médical en Algérie et encourager l'investissement dans les établissements de soins de santé. Par le passé, des événements du tourisme médical ont été organisés avec la participation de cliniques étrangères, notamment turques, tunisiennes et jordaniennes pour exposer leurs produits en Algérie et faire la promotion du savoir-faire de ces pays. Ce qui a aidé, si j’ose dire, ces cliniques «à importer» nos malades algériens vers leurs pays. Contrairement à cette logique, nous avons pensé à attirer les malades étrangers et à exporter nos services de soins et ce, en invitant des cliniques et des établissements de soins algériens à exposer leurs produits. Nous avons l'ambition de le faire avec tout l'écosystème, notamment le secteur public.
Ce Salon a été organisé sous le parrainage des ministres de la Santé et du Tourisme. Le but étant de réunir les établissements de soins algériens pour exposer tout le savoir-faire et les plateaux techniques dont ils disposent et qui peuvent prendre en charge les malades algériens, notre diaspora et aussi les étrangers notamment, nos voisins de l'Afrique. 
 
Il est clair que le tourisme médical en Algérie n’est pas suffisamment connu. Comment l’évaluez-vous actuellement ? 
 
Ce genre de tourisme est à ses débuts en Algérie, même si il y a des cliniques qui le font individuellement. Certaines commencent même à préparer la logistique autour, parce qu’il ne suffit pas de prodiguer des soins, mais il faut fournir tout les autres services, c'est à dire toute la logistique, le transport, l’hébergement et l’accueil des malades dans les meilleurs conditions. En fait, tout un écosystème qui doit suivre pour avoir justement un avenir dans le tourisme médical. Nous sommes optimistes dans le sens où nous voyons sur le terrain les efforts consentis par, notamment, Air Algérie. Car pour réussir le tourisme médical, c'est-à-dire recevoir des patients étrangers, il faut qu'il y ait   des vols directs desservis à partir de notre pays à travers la diversification des destinations. Là, on a  récemment assisté à l’ouverture de la ligne depuis l'Afrique du Sud il y a quelques jours, Addis-Abeba et le Cameroun sont programmés prochainement et il y en aura d'autres. On voit qu'il y a une politique de l'Etat et des pouvoirs publics qui va dans ce sens et l’ouverture d’horizons vers notre espace naturel, c'est-à-dire l'Afrique. Nous sommes l’un des pays initiateurs de la Zone de libre-échange avec les pays africains (ZLECAf). C’est un outil majeur, mais nous voulons avoir d'autres outils pour réaliser notre rêve d'unité africaine dans plusieurs domaines. Maintenant, nous travaillons dans le domaine de la santé pour avoir un outil permettant plus d'intégration intra-africaine dans le domaine de la santé. 
 
Avons-nous les capacités et le potentiel pour réussir le tourisme médical ? 
 
À travers votre question, vous m’amenez à parler de la genèse de cet événement. Nous avons été surpris, stupéfaits même, de voir le nombre d'Algériens qui partaient à l'étranger pour des pathologies souvent prises en charge en Algérie dans les meilleures conditions et à des coûts beaucoup plus bas. C’est pourquoi nous avons discuté et échangé avec les responsables des cliniques et des établissements de santé et on s'est rendu compte que les infrastructures sont disponibles et les compétences aussi, que ce soit dans le privé ou le public et qui sont capables de prodiguer des soins de santé les plus pointus dans toutes les spécialités pour prendre en charge nos malades, mais aussi les patients étrangers. Ce qui nous a poussé à chercher les raisons derrière cet exode de malades algériens pour se soigner à l’étranger. On a compris qu'il y a un problème de perception et de communication. Beaucoup d’Algériens ne connaissent pas les services qui sont prodigués par telle ou telle clinique par manque d’informations. Ceci est dû au fait que nous ne sommes pas agressifs en terme de communication, alors que les autres pays qui reçoivent nos malades sont très accrocheurs pour vendre leurs produits. 
D'où la naissance de cet évènement, suite à cette réflexion et à cette analyse qui ont mis en avant le manque en termes de communication. Même les cliniques ne sont pas dans le déni et c'est pour ça qu'ils ont adhéré au projet. Pour preuve, c'est une première édition et nous avons eu environ 40 établissements de santé de différentes spécialités venus de différentes régions du pays du Sud, de l'Est, de l'Ouest et du Centre. Et nous avons  aussi quelques entreprises qui forment l'écosystème, ce qu'on ne veut pas voir, juste les cliniques avant même l'écosystème autour. 
 
Disposons-nous suffisamment d’infrastructures pour promouvoir ce genre de tourisme ? 
 
Justement, c'est le but de tout ça. Chez nous, le tourisme médical se limite au traitement par l’eau thermale, ce qui est une erreur. C’est une perception que nous sommes en train de corriger à travers ce genre d’évènement, et la vulgarisation du concept du tourisme médical qui concerne tous types de soins qui va des chirurgies les plus complexes à l'esthétique. Tout ça fait partie de ce qui est communément appelé tourisme médical dans le monde. 
 
Quelles sont les spécialités qui peuvent capter davantage de touristes étrangers? 
 
Franchement, je pense que c'est vraiment horizontal. C'est très varié, ça va de l'ophtalmologie, tout type de chirurgies, et même la médecine esthétique. Maintenant nous avons des cliniques qui se sont investies dans ce domaine et ça évite le déplacement de beaucoup d'Algériens à l’étranger. 
 
L’Algérie est-elle capable de réussir le pari pour devenir une destination médicale? 
 
Oui, on peut le réussir et on a déjà commencé. Quand on voit les spécialités qui nous ont fait le plaisir d'être exposants, on est optimiste, notamment par rapport à la qualité des soins qu’elles prodiguent et le matériel et la capacité dont elle dispose. 
Le Salon c’est le premier pas pour regrouper tout ce monde.  C'est une plateforme, mais c’est après que le plus gros du travail commence. On est en train de mettre en place un réseau africain des établissements de soins de santé où les acteurs de santé de l'Algérie et des pays africains peuvent échanger en termes de formation, de technicité et faire des campagnes humanitaires dans ces pays. Cela va permettre de tisser des liens solides entre les acteurs de soin de l'Algérie et ces pays-là, et de telle manière, à faciliter les échanges notamment dans l’évacuation des malades, l'exportation du dispositif médical, l'exportation de médicaments. Tout ça pourra se faire à travers justement ce réseau qui est en train de se mettre en place. D’ailleurs, on a eu le plaisir de recevoir 22 ambassadeurs et représentants d’ambassades des pays africains qui ont témoigné de leur support et enthousiasme de réaliser cette coopération Sud-Sud. 
 
K. H.

 

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