Le Pr Mohamed Bounaâma, docteur en Archivistique et historien : «Le Rapport de Stora comporte des dérives»

Le rapport établi par l’historien français Benjamin Stora sur la question de la mémoire entre l’Algérie et la France « est un document à connotation purement franco-française» affirme le Pr Mohamed Bounaâma, docteur en sciences des archives et historien à l’université d’Alger. Dans son analyse, tout affirmant que l’honnêteté intellectuelle de Stora n’est pas remise en cause, il relève que le travail, tel qu’il a été remis mercredi dernier au président Macron, comporte certaines dérives.
«La plus grande concerne les archives», précise-t-il, expliquant que l’historien a fait un inventaire de tous les desiderata des institutions françaises concernées par les archives, ainsi que les ministères français de la Défense et de la Culture. Il relève, à cet effet, «un manque flagrant de crédibilité par rapport aux sources citées et même une grave erreur en matière de traitement des données».
«Stora s’est référé à l'accord du 6 mars 1990 entre les directions des archives algériennes et françaises pour prétendre que c'est en application de ces décisions qu'il a été procédé à l'installation de la commission mixte, qui devait statuer sur le contentieux des archives entre les deux pays.
Or, cette commission n’est pas la résultante de l’accord évoqué, qui portait uniquement sur l’échange, la formation et la collaboration dans le domaine des archives», dit-il.
Le Pr Bounaâma considère par ailleurs que la commission de réconciliation évoquée dans le rapport relève «d’une approche à la sud-africaine qui n’est pas du tout adaptée au dossier algéro-français. L’Algérie et la France sont deux parties qui ont déjà créé un groupe de travail pour négocier la question de la réconciliation mémorielle. Les négociations ont été stoppées en 1981 par la partie française sur injonction de l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing. Le mieux serait donc de relancer le travail fait par ce groupe».
Le Pr Bounaâma fera observer en outre que «la terminologie utilisée par Stora est purement française, plus particulièrement au chapitre traitant des archives où il parle d’archives de gestion et de souveraineté. L’intervenant souligne à cet égard l’intérêt de l’Algérie de réaliser son rapport traitant de l’héritage mémoriel.
Karim Aoudia

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