
- Par docteur Mohamed Meziane, ministre de la Communication
La langue arabe a constitué, dans le sujet et le verbe, un levier civilisationnel pour la Nation, un pont de rencontre, d’entente et d’interaction, et un vecteur de l’identité et de la souveraineté. De même, s’affirme aujourd’hui, face aux enjeux de la mondialisation, de l’occidentalisation linguistique et de l’hégémonie de l’information numérique multilingue, le besoin pressant de réhabiliter la langue arabe au sein des institutions médiatiques arabes, non seulement en sa qualité d’outil de communication, mais surtout en tant que support de sens, de miroir de l’âme et de réservoir de culture et de significations des choses.
Le ministère de la Communication, sous l’égide duquel est organisée la rencontre sur la langue arabe dans les médias, croit dans le rôle de la communication dans le renforcement de l’identité linguistique et la transmission du discours arabe, avec ses contenus originaux, aux générations montantes. Notre vision est qu’on ne peut défendre la langue arabe en brandissant des slogans, mais plutôt en produisant un contenu respectable et utile. Nous célébrons en Algérie, aujourd’hui, l’organisation de la première rencontre arabe sur la place de la langue arabe dans les tribunes médiatiques, sous le slogan «La langue arabe dans les médias : réalités et perspectives», sur une initiative louable lancée par l’association «El-Kalima» pour la culture et l’information, sous le parrainage du ministère de la Communication et avec la participation d’une brochette d’hommes de médias, d’académiciens et de penseurs arabes qui ont tenu à marquer de leur présence cet événement culturel et médiatique de qualité.
Dans ce contexte, il faut rappeler que, entre autres devoirs des hommes de médias, comme de coutume, figure celui de s’atteler à développer la présence de la langue arabe dans les médias sous toutes leurs formes, de manière à assurer sa pérennité et à renforcer sa pratique dans la production de contenus médiatiques au niveau de ces médias. Évoquer la place de la langue arabe dans les espaces de communication requiert également d’aborder la question très importante de la déontologie. Il est attendu que ce sujet sensible soit discuté durant cette rencontre, afin de contribuer à affronter les phénomènes qui sont apparus dans l’action médiatique, comme la publication de fausses informations et des discours qui attisent la division et la discorde, visant à frapper l’unité de la Nation. Ainsi, nous attendons que les participants exposent le thème de l’information utile qui renforce la souveraineté nationale et accompagne les aspirations des peuples. L’une des particularités dont jouit la langue arabe et que reconnaissent même ceux qui ne la parlent pas est sa richesse sémantique et sa simplicité grammaticale. Il semble, néanmoins, que cela ne l’a pas servi chez certains de ses utilisateurs dans les médias, puisque la langue utilisée est devenue vulgaire dans son style, en sus de la non-maîtrise de ses règles. Tout comme il ne peut y avoir de bon article dans un journal médiocre, pour paraphraser un penseur arabe, il ne peut forcément y avoir de bon article chargé de fautes linguistiques. Donc, il est nécessaire de traiter cette question, afin de trouver les mécanismes susceptibles de préserver l’intégrité et la qualité de cette langue qui se distingue des autres par son éloquence. Dans ce cadre, la priorité de la formation continue des hommes de médias est devenue plus qu’une nécessité, parallèlement à la mise à jour des outils de travail, de manière à se mettre à l’heure de l’intelligence artificielle et des techniques modernes de l’information numérique.
Il faut noter, ici, que les langues vivantes ne se mesurent plus aujourd’hui par le nombre de leurs locuteurs, mais plutôt par leurs taux d’utilisation dans l’espace bleu et dans les réseaux sociaux. À ce niveau, la langue arabe n’est pas partie de rien, puisqu’elle existe dans ces espaces. Il suffit juste d’affirmer et d’ancrer sa présence par la production de contenus de qualité et de bonne facture, de manière à permettre aux médias arabes de faire face avec force à l’attaque dont ils font l’objet et qui fait partie de la guerre des connaissances. Cette rencontre survient à un moment où il y a un besoin croissant de construire un front médiatique arabe uni, capable de faire face aux campagnes de désinformation et de déformation visant les sociétés arabes. Il est attendu que la rencontre contribue à élaborer une vision pratique pour des efforts médiatiques publics et privés complémentaires dans ce sens.
De ce fait, il est attendu que l’accent soit mis sur l’évaluation de la pratique médiatique arabe et la proposition de mécanismes, pour la faire évoluer et améliorer son efficacité. Ainsi, cette rencontre constitue une plateforme, pour encourager la coordination entre les radios et télévisions arabes, à travers les échanges de programmes et d’expériences, et l’élaboration de projets médiatiques communs soutenant les valeurs du dialogue, de la complémentarité et du développement. Il est attendu qu’elle ouvre de nouvelles perspectives pour la coopération médiatique arabe à l’ère de la numérisation.
Cette rencontre revêt un caractère stratégique, puisqu’elle aspire à réhabiliter la langue arabe dans l’espace médiatique et à cristalliser des visions unifiées qui renforcent l’information professionnelle engagée autour de l’identité et des valeurs. Il s’agit d’une opportunité, pour lancer un projet médiatique arabe commun digne de notre langue et conforme aux enjeux du présent et de l’avenir.
M. M.