
Il y a huit ans, le 16 janvier 2013, un groupe terroriste menait une attaque contre le complexe gazier de Tiguentourine, à In Amenas, aux frontières sud-est du pays. L’anniversaire de cet acte criminel intervient dans un contexte sécuritaire régional particulier où les menaces sur l’Algérie persistent.
L’attaque de Tinguentourine est perçue par des experts des questions sécuritaires comme une tentative des déstabiliser l’Algérie par certaines parties. Néanmoins, elle constitue l’un des grands succès de l’ANP en matière de lutte antiterroriste. Lors de cette attaque, l’Algérie a mené la riposte seule, sans aucune assistance étrangère, en rejetant également toute négociation avec les ravisseurs. L’intervention efficace a permis d’éviter un carnage, d’autant que les assaillants visaient l’explosion de la base qu’ils avaient minée.
En outre, cette opération antiterroriste a confirmé la politique de l’Algérie en la matière axée sur le refus de tout marchandage avec les terroristes. L’Algérie avait rejeté, à l’époque, toute négociation avec les ravisseurs malgré les pressions internationales. Ce n’était pas une première. En 2003, lors la prise d’otages de 23 touristes européens par le chef terroriste de l’ex-GSPC, Abderrazek El Para, l’Algérie avait déjà exprimé sa position de principe. La même posture a été adoptée en 2004 lors de la remise de ce chef terroriste par le Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDJT).
Cette position immuable de l’Algérie et son refus de céder au chantage terroriste, font qu’elle fait toujours face aux menaces. L’éditorialiste de la revue El Djeich, relève, dans cet ordre d’idées, que «Certaines parties ennemies visent indirectement la sécurité nationale». L’auteur note que «la détérioration de la situation régionale le long de notre bande frontalière et la menace que font peser certaines parties ennemies sur la sécurité de la région ces derniers temps, ces menaces, même indirectes, nous concernent et nous devons nous tenir prêts à y faire face». Il ajoute que «l’Algérie est contrainte d’assumer ses obligations régionales imposées par son rôle pivot, outre ses positions de principe immuables de soutien aux causes justes». Se retrouvant de nouveau en première ligne face aux menaces terroristes, l’Algérie a dénoncé la libération de plus de 270 terroristes au Mali, outre une rançon consistante, en contrepartie de la libération d’otages. Un acte qui fait augmenter la menace sécuritaire au Sahel, alertent des experts. Parmi les terroristes libérés, des Algériens spécialistes dans les explosifs, notamment le nommé Tahar Abou Saâd. Trois des terroristes libérés au Mali ont, d’ailleurs, été arrêtés en Algérie, suite à une filature et un travail de renseignement efficient et une tranche de ladite rançon a été récupérée à Jijel dans un abri du noyau du groupe terroriste toujours en activité. L’argent de la rançon était destiné à l’achat des armes mais également au recrutement notamment de kamikazes. Les opérations menées récemment par les différents détachements de l’ANP, renseignent sur les menaces dont l’Algérie est confrontée. L’arsenal de guerre, saisi dans des casemates à Tizi-Ouzou, est un indicateur probant.
Des plans d’attentats kamikazes planifiés par le groupe terroriste en quête d’impact médiatique ont été mis en échec. Il faut noter que le recours des terroristes aux attentats à l’explosif est privilégié essentiellement en raison du nombre limité des terroristes en activités dans le pays, suite au démantèlement des réseaux de recrutement. Les dernières opérations militaires constituent des coups durs portés à l’organisation terroriste «AQMI» qui tente depuis la nomination, en novembre dernier, à sa tête de Yazid Mebarek, alias Abou Obeida Youssouf al-Annabi, après la neutralisation d’Abdelmalek Droukdel, de concentrer son activité criminelle sur l’Algérie. Face à cette situation, l’ANP se retrouve encore une fois sur le devant de la scène sécuritaire, notamment après les derniers développements de la situation au Sahara occidental suite à la violation par l’armée marocaine du cessez-le-feu et la normalisation des relations entre le Makhzen et l’entité sioniste. Consciente des défis, des enjeux et des menaces, elle est plus que jamais déterminée et engagée dans la sécurisation optimale des frontières et la lutte antiterroriste, affirme le chef d’état-major, à chaque occasion. Dans son message de vœux à l’occasion du nouvel an 2021, qui constitue une feuille de route, le chef d’état-major de l’ANP insiste sur «l’intensification de la lutte contre les résidus du terrorisme» à travers l’innovation, l’esprit d’initiative, la perspicacité et la vigilance, de sorte à «nous permettre, ensemble, d’extirper définitivement ce fléau».
Le Haut commandement de l’ANP opte pour l’optimisation des capacités de combat et la préparation face aux éventuelles menaces. «Les efforts que vous fournissez le long des frontières nationales, dans les montagnes, les bois, récifs et les rivières, à travers l’ensemble du territoire national, pour qu’ils soient effectifs et fructueux sur le terrain, nécessitent un soin particulier et une attention requise afin de poursuivre l’effort de préparation du corps de bataille, afin qu’il soit constamment en état, prêt pour faire face à toute urgence et adapté aux différentes situations et évolutions», insiste le général du corps d’armée Saïd Chanegriha.
Narcotrafic, terrorisme, une double menace majeure pour la région
Les exercices menés par les éléments de l’Anp s’inscrivent dans cette optique. L’Algérie veut mettre tout en œuvre pour éviter un «Tiguentourine bis». Un exercice démonstratif avec munitions réelles, «Borkane 2020» a été exécuté par les unités organiques de la 41e Brigade blindée, appuyées par des unités aériennes et des drones, a été effectué aux frontières sud-est à In Amenas. «Borkane 2020» a, également, vu la participation de drones «qui ont découvert, lors d'une opération de reconnaissance, un groupe ennemi qui tentait de s'infiltrer dans une infrastructure énergétique», selon le MDN.
En outre, le narcotrafic est aussi l’une des menaces majeures pour la région du Sahel et particulièrement l’Algérie. L’ANP a saisi, ces derniers mois des quantités record de drogue en provenance du Maroc et de nombreux narcotrafiquants ont été arrêtés. Il ne se passe pas un jour sans qu’une saisie de kif traité ne soit opérée au niveau des frontières, sud-ouest notamment.
Dans une allocution d'orientation prononcée devant les cadres lors d’une visite d’inspection à Béchar, le chef d’état-major de l’ANP «a mis l'accent sur l'importance vitale que revêt cette région militaire». Les investigations ont démontré des connexions entre groupes terroristes et réseaux de contrebande et de trafics illicites au Sahel. Selon une étude analytique «les groupes terroristes d’AQMI, par exemple, ne procèdent pas directement aux achats d’armes, de munitions et d’autres matériels connexes tels que les véhicules 4x4, les appareils de communication (téléphones satellitaires, GPS...) qu’ils utilisent pour leur combat. Les terroristes en effet se les procurent par l’entremise des trafiquants de drogue. Des relations clients-fournisseurs s’établissent entre les terroristes et les trafiquants de drogue». Il est à signaler que des narcotrafiquants algériens ont été libérés au Mali en échange de quatre otages et d’une rançon, d’où l’importance de leur rôle dans la tentative de restructuration du groupe terroriste.
8 ans après l’attaque de Tiguentourine, l’ANP est, donc, plus forte encore et déterminée à faire face à toute menace. Les multiples opérations qui ont donné des résultats qualitatifs «reflètent le haut professionnalisme, la vigilance et la disponibilité permanentes de nos Forces armées à travers tout le territoire national», assure le MDN.
Il est utile de rappeler qu’en février 2020, la vigilance d’un soldat de l’ANP a mis en échec une tentative d’attentat à la voiture piégée, conduite par un kamikaze, dans la zone frontalière de Timiaouine, à Bordj Badji Mokhtar au niveau des frontières avec le Mali. C’était là la première tentative d’attentat dans le sud de l’Algérie depuis 2013. Plusieurs plans terroristes ont été mis en échec.
Des caches d'armes de guerre ont été découvertes notamment aux frontières avec la Libye, le Niger et le Mali. Le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a insisté lors de la réunion du Haut conseil sécuritaire sur «le maintien de la vigilance à tous les niveaux afin de permettre à l'Algérie d'enclencher les étapes importantes à venir en adéquation avec les défis de l'année 2021, à la lumière des développements inédits survenus récemment dans la région, et particulièrement dans l'espace régional voisin».
Un message en adéquation avec la grande mobilisation et la vigilance de l’ANP.
Neila Benrahal