
Le recours à une stratégie touristique est un passage obligé pour offrir l’image d’un pays ouvert sur le monde, accueillant et hospitalier. C’est cette problématique, liée aux enjeux et perspectives du tourisme national, qui a été débattue, hier, dans le cadre du Forum d’El Moudjahid.
Le président de la Fédération nationale de l’hôtellerie et du tourisme, M. Boulfkhad Abdelwahab, a, d’abord, énoncé, grosso modo, les objectifs et les missions de la FNHT, créée en 2022, qui se résument comme suit : concrétiser le programme du président de la République consacré à l’essor du tourisme, participer à son développement et promouvoir l’infrastructure hôtelière, forger des liens de coopération entre les professionnels, favoriser une convergence d’efforts entre les opérateurs des secteurs privé-public, organiser des séminaires et conférences…
Présente dans 52 wilayate, la fédération s’assigne comme tâche, la levée des entraves existantes, fournir la garantie d’un accompagnement fort de la part des pouvoirs publics. Il poursuit en signalant que l’une des préoccupations les mieux avérées, touche à la gestion des établissements hôteliers, gérés de façon traditionnelle.
La Fédération rassemble plus de 1.600 hôtels avec une capacité 148.280 lits. C’est un chiffre appréciable, mais il en faut davantage, du moins jusqu’à l’horizon 2030. Il a, conformément aux instructions du chef de l’Etat, lancé un appel aux opérateurs algériens travaillant à l’étranger d’apporter leurs compétences dans ce processus de relance du tourisme. En tant qu’hôtelier, il a incité les pouvoirs publics à prendre des mesures de toute urgence afin de pallier au problème des dettes contractées par les investisseurs auprès des banques. Les hôteliers sont disposés à payer le principal, bénéficier d’un taux réduit et la durée crédit qui doit être allongée.
Abdellatif Hemamda, délégué de la wilaya d’Alger, président de la commission du tourisme de plein air, a mis en exergue les avantages de la nouvelle loi sur l’investissement, pour poser les jalons d’un tourisme d’avenir, une œuvre tout à fait concevable compte tenu d’un potentiel naturel, géographique, culturel incontestable.
S’agissant des contraintes qui se dressent devant le décollage définitif du secteur, il a cité le manque d’infrastructures hôtelières, la nécessité de mettre en place un circuit
-un acte indispensable qu’il a réitéré avec insistance-, une tarification qui doit connaître une tendance baissière, ne pas négliger la spécificité de l’activité touristique, mais surtout parvenir à faire en sorte que le retour sur investissement soit rapidement concrétisé. C’est une préoccupation abondamment martelée par l’ensemble des conférenciers et un message crucial est lancé aux pouvoirs publics.
M. Hemamda plaide pour un rallongement de la durée de remboursement des crédits. Aucun pays n’astreint ses débiteurs à honorer leurs dettes en sept ans dans le secteur du tourisme. Des décisions imminentes doivent être prises pour lever cet obstacle. Notre expert a aussi évoqué la nécessité d’activer l’e-payement en urgence, régler la question des visas, notamment vers les destinations du Sud et la digitalisation du secteur.
Henouda Adèle, S.G. de la FNHT, a énoncé brièvement, trois axes : aider les hôteliers à parfaire leurs outils de travail avec une offre diversifiée de conseils prodigués par des spécialistes, les achats groupés et la formation, pierre angulaire de tout développement touristique.
Il a déclaré que la FNHT prend en charge la question de l’accompagnement de tous les acteurs désireux de s’investir dans ce créneau prometteur.
M. B.
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Une formation aux normes internationales
La formation est le talon d’Achille et le maillon faible de l’hôtellerie et du tourisme, en dépit des efforts fournis et de la volonté sincère de tous les intervenants dans le processus de mise en place de la stratégie du tourisme. Cette défaillance en matière de formation se répercute fatalement sur la qualité des services.
Les intervenants du tourisme sont unanimes à dire que la formation est en inadéquation avec le marché du travail, l’offre de formation est loin de répondre aux besoins du secteur, malgré le développement récent du secteur privé et les mesures des pouvoirs publics pour relever qualitativement le niveau de savoir-faire et l’adapter au marché du travail. Il existe une certaine inadéquation entre l’offre de formation et la demande. Les écoles de formation publiques peinent à suivre l’évolution du secteur touristique. Les besoins en personnel d’exécution sont énormes. Actuellement, les grands hôtels recrutent du personnel sans qualification et se trouvent contraints de leur donner les former sur le tas pour répondre aux exigences du métier. Les résultats bien évidemment ne sont pas fiables et cela se ressent sur les prestations offertes. Le changement souhaité doit introduire une réorganisation et une réadaptation du système de formation, un réaménagement des structures existantes, une intégration de structures venant de la formation professionnelle et des écoles impliquées dans la formation.
Le développement d’une économie touristique exige également d’améliorer le système de formation et de recherche qui accompagne le secteur. Ce système est la pièce maîtresse dans la réflexion de la stratégie de l’aménagement touristique du pays «Il est urgent pour nous de conjuguer tous les efforts et de rassembler toutes les énergies pour mettre en place une vraie politique de formation dans les métiers de l’hôtellerie et du tourisme», dira
Mr Terghini , chef de cabinet du ministère du Tourisme, invité du forum. «Le défi évident à relever dans ce domaine est conséquent en termes de compétitivité recherchée car les attentes sont très grandes et les responsabilités très lourdes en vue de mener l’Algérie vers un tourisme de qualité et permettre de positionner notre pays comme destination de choix dans le monde du tourisme international». Il est donc important d’améliorer et de promouvoir la formation de qualité dans le domaine touristique en établissant le rapport enseignement théorie-pratique, afin de hisser le niveau des prestations et atteindre le professionnalisme. Le tourisme étant d'abord une industrie de main- d'œuvre, c'est de la qualification des hommes et donc de la qualité du service que naît en premier lieu celle du produit touristique. La formation des ressources humaines pour le tourisme s’avère donc une nécessité.
Farida Larbi
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Investissements touristiques prolongement des délais de remboursement des crédits
Une réflexion est engagée au ministère du Tourisme et de l’Artisanat sur l’allègement du calendrier de remboursement des crédits dans le cadre des investissements touristiques après l’appel de la Fédération qui demande de porter les délais de 15 à 20 ans. C’est ce qu’a déclaré, hier, le chef de cabinet du ministère, qui admet l’existence de lacunes concernant la destination Algérie.
«Nous ne sommes pas visibles sur la scène touristique internationale pour plusieurs raisons, comme le manque d’hébergement et de personnel qualifié pour gérer et encadrer les établissements. Il y a aussi un déficit en terme de management et de gestion des destinations touristiques, car nous manquons de professionnels dans le domaine touristique», a reconnu Abdelhamid Terghini. A travers ce diagnostic, il a fait part des stratégies mises en place pour rehausser l’image de l’Algérie au niveau national et international, à travers des participations aux évènements touristiques à l’étranger, telles les foires, et pointé du doigt le problème des infrastructures qui ne répondent plus aux normes. «L’Etat a lancé des opérations de réhabilitation et de modernisation de ces structures. Le privé, de son coté, est entrain de consentir de gros efforts en réalisant chaque année entre 50 et 60 hôtels pour une capacité totale de 6.000 lits à 7.000 lits. Il y a une très forte dynamique pour attraper le manque d’infrastructures mais il faut que les secteurs adhèrent à ce modèle économique».
Interrogé sur les investissements, le conférencier a insisté sur l’importance de la disponibilité du foncier et le financement des projets, et confié que les pouvoirs publics ont constitué un portefeuille foncier d’une capacité de 245 zones touristiques, dont 70% sont situées sur le littoral du pays. «Ça représente près de 50.000 hectares ; nous avons un programme d’investissement public comme les stations de dessalement, les stations électriques, les projets d’habitation pour délocaliser ses projets vers d’autres sites car il y a un manque de coordination au niveau local». Il a ainsi rappelé les avantages du nouveau code de l’investissement. «Avec le précieux concours de la FNHT, a-t-il poursuivi, on est en train de créer un groupe de travail avec le ministre des Finances, qui est notre collaborateur, pour que les projets d’investissement touristique soient spécifiques. Ce dernier a besoin d’au moins 7 ans pour entrer en exploitation. Un financement qui est entrain de se faire grâce à une convention signée avec une banque».
Dans le cadre des investissements réalisés en 2022, plus de 70 projets touristiques ont été débloqués d’une capacité de 8.000 lits et 56 autres projets d’une capacité de 6.000 lits ont bénéficié du dégel en 2023. Et d’ajouter : «Nous ambitionnons de réaliser de 50.000 à 200.000 de lits, y compris avec les investissements étrangers. Des investisseurs qataris veulent d’ailleurs faire un partenariat avec le groupe HTT».
Par ailleurs, le chef de cabinet du ministère du Tourisme a précisé que l’Etat a instauré le visa du Sud qui offre la possibilité au touriste de se voir délivrer son visa à son arrivée à l’aéroport et confié que l’Algérie se dirige vers l’instauration du «e-visa».
Concernant les maisons d’hôtes, cette option est très prisée. «Nous avons essayé de recentrer l’activité de d’hébergement vers l’hôtellerie uniquement. Nous allons réintégrer la maison d’hôte avec de nouveaux concepts. Par rapport au prix, c’est l’offre et la demande qui le fixent. Et là, je lance un appel pour revoir les prix qui ne doivent pas être abusifs.»
Pour le tourisme saharien, Terghini a révélé que 50.000 touristes ont visité le Sud du pays en 2022 alors que 2.500 demandes de visa ont été enregistrées, chaque mois, depuis juillet dernier. A cette occasion il a insisté sur la nécessité d’embellir l’image touristique de l’Algérie au niveau international et de mettre en place un plan qualité-tourisme, au niveau des hôtels et des restaurants. «Nous avons la mission de former nos jeunes pour travailler dans ce secteur qui est très demandeur. Le secteur du tourisme a besoin de tout le monde et dans tous les domaines. Nous possédons tous les ingrédients qui contribuent à faire de l’Algérie une destination touristique par excellence».
Radja B.