Explosions nucléaires françaises à Reggane : Un crime contre l’humanité

Ph. : Billal
Ph. : Billal

Tamanrasset : L’horreur  de la tragédie impose la reconnaissance du crime

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Un riche débat s’est instauré samedi entre universitaires et représentants de la société civile et des droits de l’homme, à l'Institut national d'études de stratégie globale (INESG), autour des explosions nucléaires de la France coloniale en Algérie.
Le premier essai nucléaire a eu lieu le 13 février 1960 à 7h04, au sud de Reggane, sur une vaste zone dénommée Centre saharien d’expérimentations militaires, la France inaugurant alors une série d’explosions et d’expérimentations nucléaires. Activée en plein air, cette première bombe, baptisée «Gerboise bleue», d’une puissance quatre fois supérieure à celle larguée sur Hiroshima, a fait rentrer la France dans le club très fermé des puissances nucléaires.
Depuis cette date fatidique, la liste des victimes des explosions atmosphériques ou en galerie n’a cessé de s’allonger, surchargeant démesurément nos systèmes de santé et de solidarité, alors qu’un pan entier du territoire national est resté inexploité, en raison du danger nucléaire persistant qui rend rédhibitoire toute initiative de développement dans ces zones, avec des retombées jusqu’à aujourd’hui sur la faune et la flore.
Dans son intervention, le directeur général de l’Institut, Abdelaziz Medjahed, a précisé qu’il fallait accorder toute l’importance nécessaire à ces explosions, notamment s’agissant du cadre juridique, car les retombées radioactives sont toujours présentes.
L’universitaire et chercheur en histoire, Mohamed Lahcene Zeghidi, a, quant à lui, responsabilisé les scientifiques, les académiciens et les défenseurs des droits de l’homme sur le piétinement par la France coloniale des droits de l’homme sur le sol algérien. Après avoir mis en exergue la nuance terminologique adoptée dans le discours colonial français et celui de l’Algérie, il a souligné que la France a tout fait pour tromper l’opinion publique internationale. Il a rappelé que la France s’était attelée, après l’explosion des deux bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki, à mettre au point des bombes plus puissantes dans l’espoir d’avoir une place au sein du club atomique.
Le Dr Hocine Fouzari, maître de conférences à l’université de Tipasa, a fait, dans son intervention, une lecture du point de vue du droit international, affirmant que cet acte illégitime est un véritable génocide qui représente un réel danger pour les générations futures.
Il a souligné que plus de 40.000 victimes ont été enregistrées, et plus de 40 essais et 17 expérimentations ont été effectués dont les répercussions se font toujours ressentir dans la région.
L’objectif initial était de plonger l’Algérie, qui sera indépendante deux ans et demi plus tard, dans une inextricable spirale de peur, de souffrance et de nuisance, du fait de la situation radiologique générée in situ.
Les participants étaient unanimes pour affirmer que toutes les lois prouvent que la France a commis en Algérie un crime imprescriptible contre l’humanité.
Après avoir mis l’accent sur le rôle de la société civile et des médias en complémentarité avec les autorités publiques pour que la France reconnaisse ses crimes commis durant plus de 132 ans, les participants se sont dits déterminés à aller jusqu’au bout pour demander aux autorités françaises des réponses à ces questions.
Hichem Hamza

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Tamanrasset
L’horreur  de la tragédie impose la reconnaissance du crime

L'horreur des explosions nucléaires effectuées dans l'Ahaggar impose à la France la reconnaissance de ce crime, estime l'association Taourirt des victimes des essais nucléaires dans la région de l'Ahaggar.
«Les effets de ce crime contre l'humanité, commis par la France coloniale, sont encore visibles à ce jour parmi la population, et les faits et les preuves attestent de l'horreur de la tragédie et de l'ampleur de l'enfer nucléaire engendré», a déclaré à l'APS, le secrétaire général de l'association, Boubaker Ibbeh.
Pour Ibbeh, «il ne s'agit pas de simples explosions nucléaires, mais de massacres relevant du crime contre l'humanité, comme en témoignent les impacts sur environnement et les conséquences sanitaires désastreuses, d'où l'impératif d'une enquête internationale».
Les effets radioactifs, confirmés par les scientifiques et les experts, dans les régions de Reggane (Adrar) et In-Ecker (Tamanrasset), «n'ont pas épargnés le mont Taourirt», en plus de la population, de la flore et de la faune, a fait observer Ibbeh.
Outre les conséquences des explosions nucléaires sur la population de l'Ahaggar, le représentant de l’association fait état d'une pollution radioactive et chimique de l'environnement, dont l'assainissement exige le traitement de tonnes de déchets nucléaires et militaires, «en surface ou en sous-sol, dans des sites que seuls les Français connaissent».
Des habitants ont ramassé, innocemment, des piliers et des tôles contaminés pour les utiliser en toitures de leurs maisons, aussi bien dans la région de Tamanrasset que dans les villages voisins, souligne Ibbeh. Dans la région de l'Ahaggar, nombreux sont les habitants présentant différents types de cancer et des malformations congénitales résultant de la radioactivité. Aujourd'hui, ils crient leur détresse et réclament justice pour ceux «en sursis» de mort.
Dans ce sens, Dr Akhamouk Ilyes a révélé «355 cas de cancer recensés durant les quatre dernières années, avec en tête le cancer du sein, suivi du cancer de la thyroïde».
Évoquant la hausse inquiétante du cancer de la thyroïde, Dr Akhamouk a rappelé que la même situation est vécue par la population de la Polynésie, qui a connu aussi des essais nucléaires français, ce qui confirme, a-t-il dit, les résultats d'une étude scientifique sur le lien direct entre les essais nucléaires et le cancer de la thyroïde.
Avant les explosions nucléaires, les régions de l'Ahaggar, de Touat et de Tidikelt étaient des terres fertiles, selon les autochtones qui évoquent des cultures de céréales, de dattes et autres produits agricoles de qualité, en sus de l'élevage. Plusieurs animaux sauvages vivaient également dans ces territoires, à l'instar de la gazelle, du mouflon, du guépard et divers oiseaux.
Des richesses anéanties en raison de la contamination des eaux souterraines. Le responsable de l'association Taourirt des victimes des essais nucléaires dans l'Ahaggar a appelé à la pose d'une clôture autour de «Tan-Afella» et de «Tan-Atram», dans la région de Taourirt, pour éviter à la population tout contact avec la radioactivité.

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