
Le magazine d’Amnesty International «La Chronique» a consacré le reportage de son dernier numéro de mai 2021 aux essais nucléaires français en Algérie, en publiant les témoignages poignants de victimes, non sans épingler au passage l’historien français, Benjamin Stora, dont le rapport sur «la réconciliation des mémoires ne consacre qu’une page et demie» à ces essais nucléaires. Sous le titre «France-Algérie : Essais nucléaires, un secret bien enfoui», le magazine a consacré toute sa Une (page de garde) à ce dossier qui est toujours d’actualité, en écrivant en gros caractère : «Depuis 60 ans, la France refuse d’assumer les conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires au Sahara». Le reportage de ce mensuel, illustré par des photos qui reflètent tout le drame causés par ces essais nucléaires, est également soutenu par des extraits du rapport «Sous le sable la radioactivité» réalisé en 2020 par Jean-Marie Collin, expert en désarmement nucléaire et porte-parole del’ICAN (International Campaign to AbolishNuclearWeapons) et Patrice Bouveret, directeur de l’Observatoire des armements. Le rapport relève en substance que «dès le début des expérimentations nucléaires, la France a pratiqué une politique d’enfouissement de tous les déchets dans les sables et n’a jamais dévoilé où étaient enfouis ces déchets ni leur quantité». Dans un des témoignages des habitants des régions touchées par ces essais nucléaires, le magazine rapporte celui de Salah Mohamed (Tamanrasset) qui raconte en ces termes : «J’avais 6 ans à l’époque. J’étais berger et je gardais des brebis. J’étais sur le plateau, et les militaires étaient venus nous récupérer en hélicoptère en abandonnant les bêtes. Arrivés au village, on nous a mis dans des camions pour nous évacuer. Le même jour, j’ai perdu mon père, ma mère et un frère. J’ai été récupéré avec ma sœur par mon oncle». Le magazine a aussi interviewé le seul scientifique indépendant à s’être rendu sur place pour prélever des échantillons et les analyser, en l’occurrence Roland Desbordes qui est porte-parole de la CLIIRAD (Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité, apportant un démenti catégorique à l’armée française laquelle a prétendu que «les essais nucléaires au Sahara ont eu un impact très limité sur l’environnement». Dans un autre article, le magazine qui est revenu sur le rapport de l’historien français, Benjamin Stora, a relevé qu’une page et demie sur un rapport qui en compte 160, a été consacrée à ces essais nucléaires. «Remis au président Macron le 20 janvier dernier, le rapport sur la réconciliation des mémoires entre la France et l’Algérie ne consacre que très peu de place aux conséquences environnementales et sanitaires qui entourent les 17 essais nucléaires orchestrés par la France dans le Sahara algérien», est-il écrit, relevant que le magazine (La Chronique) «avait interrogé Stora sur cet aspect, lequel n’avait pas donné suite». Pour rappel, le 13 février 1960, la France faisait exploser sa première bombe atomique, opération baptisée «Gerboise bleue», dans le ciel de Reggane, au Sahara, causant un désastre écologique et humain qui continue de générer des maladies dont des cancers radio-induits. Le premier essai effectué à Reggane, avec une puissance variant entre 60.000 et 70.000 tonnes de TNT explosif, équivaut à une bombe cinq fois plus puissante que celle lancée sur Hiroshima, selon des experts. Non seulement les sites où les essais ont été effectués n’ont pas été totalement décontaminés, mais les effets des radiations demeurent toujours dévastateurs et tragiques.