
Quand Sansal avait faim, c’est en Algérie qu’il a été nourri. Quand il était ignorant, c’est grâce à l’école algérienne qu’il a acquis son savoir.
«Plus le mensonge est gros, mieux il passe», disait le ministre nazi de la propagande, Joseph Goebbels. A force de marteler que l’écrivain Boualem Sansal est français, beaucoup de citoyens de ce pays ont cru qu’il s’agissait d’un compatriote. Or il est algérien. Il n’a d’ailleurs acquis la nationalité française que depuis… quelques mois. Il est né en Algérie et y a fait ses études supérieures. Ses premiers revenus, il les a eus en Algérie, qui lui a même fait confiance en le nommant cadre supérieur dans un ministère de souveraineté. Autant dire que la France n’a pas dépensé un sou pour son éducation ou sa formation. Passons sur sa façon de remercier son pays d’origine, de formation et de travail qui pourrait choquer les Français. Retenons seulement qu’en tant qu’algérien, il a des droits et des devoirs. S’il a fauté, c’est la justice qui devra le déterminer et c’est à cette dernière de le juger. Cela s’applique dans tous les États du monde et l’Algérie ne fait pas exception. Remarquons qu’aucun responsable algérien n’a commenté ce processus. Pourtant, ce qui est reproché à Boualem Sansal est grave. Il a remis en cause l’intégrité territoriale du pays et fait des déclarations totalement erronées sur l’histoire de l’Algérie. La classe politique française ou plutôt une partie d’entre-elle, accepterait-elle qu’un Français naturalisé algérien depuis peu de temps déclare que l’Alsace et la Lorraine ont toujours été allemandes et que la France les a spoliées, allant jusqu’à mettre à mal la cohésion de la nation française ? Elle aurait sûrement sauté sur l’occasion pour appeler à sa traduction devant la justice en le traitant de tous les noms dont ceux de traitre et de vendu à l’Algérie. S’il passe devant un juge et s’il est condamné, les responsables politiques, tout comme les décideurs, à commencer par le chef de l’Etat de ce pays, auraient crié à l’indépendance de la justice qui ne peut être entravée. C’est le cas chez nous et surtout ils doivent d’abord balayer devant leur porte. Quand Sansal avait faim, c’est en Algérie qu’il a été nourri. Quand il était ignorant, c’est grâce à l’école algérienne qu’il a acquis son savoir. La logique impose qu’on doit d’abord attendre qu’il soit jugé pour parler de son sort. Ses avocats n’ont pas manqué de rassurer l’opinion publique sur son état de santé. A propos d’opinion publique, combien de Sansal ou plutôt de Français sont jugés pour leurs idées en France - que ce soit pour leurs positions indépendantistes ou leur liberté de pensée- sous la fallacieuse accusation de trouble à l’ordre public pour les premiers et d’antisémitisme et de terrorisme pour les seconds ? Ils sont traqués et interdits d’antenne quand ils ne croupissent pas en prison. Ils n’ont pas la chance qu’a Boualem Sansal. La classe politique française et ses relais médiatiques si prompts à réagir quand il s’agit de notre pays, sont muets à leur égard. Ni le Parlement européen ni les associations des droits de l’homme, ni les commissions de l’ONU n’ont été saisis ne serait-ce que pour des raisons humanitaires. Pourtant ils sont Français bien avant Sansal qui était étranger il y a moins d’une année. Le nouveau compatriote qu’ils défendent maintenant n’en était pas vraiment un. A ne pas oublier.
F. D.