Le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, appelle à revoir et à réorienter les priorités du partenariat Afrique - Europe, afin de répondre efficacement aux crises sécuritaires, politiques et socioéconomiques qui menacent le continent africain.
L’ordre des priorités du partenariat entre l’Afrique et l’Europe doit être revu et corrigé. C’est ce qu’a affirmé le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, M. Ahmed Attaf, dans une allocution prononcée, lors des travaux du 7e Sommet de coopération et de partenariat entre l’Union africaine (UA) et l’Union européenne (UE), hier à Luanda, en Angola. L’impératif de redéfinir les priorités de ce partenariat est dicté, a expliqué le ministre d’État, par «le contexte international d’une extrême complexité» dans lequel se tient ce sommet.
Un contexte marqué, a-t-il poursuivi, par «le désordre et les tensions dont les répercussions n’ont pas épargné notre continent». M. Attaf a estimé, dans ce sillage, que cette trajectoire appelle véritablement à tirer la sonnette d’alarme, pour quatre raisons. Il y a, d’abord, «le retour au premier plan du phénomène des changements non constitutionnels de gouvernements en Afrique». «Ces changements ne constituent plus de simples réactions conjoncturelles à des données passagères ou circonstancielles, mais sont devenus une réalité qui s’étend et s’enracine, alors même que les perspectives de retour aux systèmes constitutionnels espérés restent bouchées», a-t-il alerté. Il y a ensuite l’aggravation du fléau du terrorisme en Afrique, après son recul dans d’autres régions du monde.
«La zone sahélo-saharienne est devenue, aujourd’hui, l’épicentre mondial ou le point d’ancrage international de ce fléau qui a semé la corruption et le crime dans les États et les peuples africains, dans un silence international difficile à comprendre ou à expliquer», a-t-il relevé. Le troisième point suscitant l’inquiétude, selon le ministre d’État, c’est la prolifération des interventions militaires étrangères en Afrique. «Ce phénomène est devenu, aujourd’hui, un facteur structurel du paysage sécuritaire africain, un facteur qui complique les crises, prolonge leur durée et annihile les chances de les résoudre par des moyens pacifiques», a-t-il soutenu. Le dernier élément évoqué par M. Attaf, c’est «le repli du rôle diplomatique continental» et «l’intérêt international décroissant pour les priorités africaines en matière de sécurité et de politique, lesquelles ne bénéficient plus de l’attention requise dans l’agenda du travail multilatéral international».
C’est pour faire face à cette situation complexe et compliquée, que l’Algérie a appelé à réorganiser des priorités du partenariat afro-européen dans le domaine de la paix et de la sécurité. «La première priorité, a précisé le ministre d’État, est d’en finir avec l’état de léthargie internationale qui pèse sur les questions de paix et de sécurité en Afrique. Les défis auxquels fait face notre continent ne sont pas de simples difficultés locales ou limitées, mais bien des menaces transfrontalières, dépassant les frontières des pays et des continents, tant par leur nature que par leurs répercussions», a-t-il mis en avant.
La deuxième priorité, a-t-il ajouté, est la réhabilitation du rôle diplomatique africain et la promotion du principe des solutions africaines aux problèmes africains. «Notre organisation continentale a déjà prouvé sa capacité à assumer le rôle qui lui incombe chaque fois que l’espace nécessaire à son action lui a été accordé et qu’elle a bénéficié du soutien international requis», a-t-il souligné. La troisième priorité, toujours selon le ministre, est «l’investissement réel et efficace dans le développement, en tant que meilleure voie pour prévenir les crises et s’attaquer à leurs causes profondes, ainsi qu’à leurs dimensions socioéconomiques».
«Dans ce cadre, a-t-il affirmé, nous aspirons à voir se concrétiser les promesses d’investissement que l’Europe a faites à l’Afrique dans le cadre de l’initiative Global Gateway.» Cette initiative consiste en un programme d’investissement doté de 150 milliards d’euros destiné à renforcer les partenariats avec l’Afrique. La dernière priorité consiste en «la nécessité de mettre fin à la marginalisation de l’Afrique dans l’ensemble des espaces de prise de décision internationale, qu’ils soient politique, sécuritaire ou économique». «Cette marginalisation, a relevé le ministre d’État, demeure, en elle-même, l’un des principaux facteurs structurels qui compromettent la marche de l’Afrique vers la réalisation de ses aspirations et objectifs consacrés dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine.» M. Attaf a pris part aux travaux de ce sommet qui s’est déroulé du 24 au 25 novembre, en tant représentant du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune.
Intervenant, à l’ouverture du sommet, le président de la commission de l’UA, Mahamoud Ali Youssouf, a, pour sa part, appelé à un partenariat commercial plus équilibré entre l’Afrique et l’Europe. «Nous cesserons bientôt de jouer uniquement le rôle de fournisseur de matières premières. Le continent est en train de devenir un acteur clé à différentes étapes de la chaîne de valeur mondiale. C’est pourquoi nous appelons à un partenariat commercial plus équilibré», a-t-il affirmé. Placé sous le thème «Promouvoir la paix et la prospérité, grâce à un multilatéralisme effectif», le Sommet UA-UE visait à «examiner les questions prioritaires pour les deux parties, notamment celles liées à la paix, à la sécurité, au développement, à la migration et à la gouvernance», ainsi qu’à «évaluer le partenariat en place entre l’Afrique et l’Europe dans différents domaines».
Le dernier sommet UE-UA en date s’est tenu, les 17 et 18 février 2022 à Bruxelles. Les dirigeants africains et européens y étaient convenus d’«une vision commune pour un partenariat renouvelé».
M. A. O.
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Portugal, Tunisie, Côte d’Ivoire, Bénin… : les entretiens d’Ahmed Attaf à Luanda
Le ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l'étranger et des Affaires africaines, Ahmed Attaf, s’est entretenu, hier à Luanda, avec plusieurs de ses homologues, en marge du 7e Sommet de coopération et de partenariat entre l’Union africaine (UA) et l’Union européenne (UE). Ainsi, M. Attaf a rencontré son homologue portugais, M. Paulo Rangel, avec lequel il a abordé l’état des relations bilatérales et la nécessité de renforcer la dynamique positive qu’elles connaissent depuis, notamment, la visite effectuée par le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, à Lisbonne, en mai 2023. Les deux ministres ont évoqué la préparation des prochaines échéances entre les deux pays, mais aussi «les perspectives de renforcement du partenariat afro-européen, à la lumière des conclusions du Sommet de Luanda», a précisé un communiqué du ministère des Affaires étrangères. M. Attaf a également rencontré son homologue tunisien, M. Mohamed Ali Nafti, avec lequel il a fait le point sur les préparatifs de la prochaine session de la grande commission mixte algéro-tunisienne. Les deux ministres se sont félicités du «niveau exceptionnel des relations de fraternité et de coopération entre les deux pays», avant d’échanger leurs vues sur «les développements de la situation en Libye», relevant la nécessité de renforcer le rôle des pays voisins dans le rapprochement des points de vue entre les différentes parties dans ce pays frère.
Le ministre d’État s’est également entretenu avec son homologue ivoirien, M. Léon Kacou Adom. Les deux ministres sont convenus de lancer les préparatifs de la prochaine session de la commission mixte algéro-ivoirienne. Ils ont par ailleurs échangé leurs vues et leurs analyses sur l’évolution de la situation dans la région du Sahel, relevant l’importance de renforcer la coordination entre l’Algérie et la Côte d’Ivoire, notamment au sein du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine dans lequel siègent les deux pays. M. Attaf a également rencontré son homologue béninois, M. Olushegun Bakari.
Après avoir exprimé leur satisfaction quant à l’échange récent de représentations diplomatiques entre les deux pays, les ministres ont examiné les derniers développements de la situation dans l’espace sahélo-saharien, soulignant la nécessité de conjuguer les efforts pour y faire face. Le ministre d’État s’est également entretenu avec M. João Gomes Cravinho, représentant spécial de l’Union européenne pour la région sahélo-saharienne, avec lequel il a abordé les «récents développements de la situation dans la région du Sahel, aux plans politique, sécuritaire et économique», mais aussi les perspectives de «renforcement de la coopération et de la coordination en vue de soutenir les efforts visant à instaurer la sécurité et la stabilité dans cet espace régional».
Le ministre d’État a en outre rencontré Mme Odile Renaud-Basso, présidente de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Une rencontre qui a permis de passer en revue les relations de coopération entre l’Algérie et cette institution financière européenne, ainsi que leurs perspectives d’avenir, l’Algérie étant l’un de ses pays actionnaires. Mme Odile Renaud-Basso a ainsi exprimé sa disponibilité à «soutenir les efforts de l’Algérie visant à diversifier son économie nationale, notamment à travers le développement des capacités et de la compétitivité du secteur privé dans un certain nombre de domaines stratégiques, parmi lesquels l’agriculture et les énergies renouvelables».
M. A. O.